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Anton Ludenhof

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Le siège de Leicheberg Empty Le siège de Leicheberg

Mer 31 Aoû 2011 - 22:27
Bonjour à tous !

Petit prologue qui me fait replonger dans un vieux récit "La Menace du Stirland", que j'écrivais alors chaque dimanche pour le Conseil Impérial, et qui a duré tout une année.. Pour l'essentiel, l'histoire décrira la bataille finale de ce long texte qui avait été un vrai petit feuilleton, avec une suite chaque dimanche. Ciel, quelle nostalgie !

Allez, lecture !





Galopant dans la plaine du Stirland, un cavalier ne cessait de presser sa monture à aller encore plus vite. Projetant sa figure aussi bien en avant qu’en arrière, ses yeux indiquaient clairement la peur qui l’habitait. Combien fois aurait-il simplement voulu les fermer, chasser cette vision d’horreur qui le hantait. Peinant à retenir ses propres gémissements terrifiés, il avait tout juste la force d’éperonner son cheval. Le cliquetis de son épée venant frapper ses étriers, le son caractéristique d’un galop effréné, et le vent, ce maudit vent glissant depuis les ténèbres, voilà ce qui agitait la douce prairie à l’heure où le calme s’y imposait d’ordinaire. La lune éclairait encore de tout son éclat les champs et les pâturages de la région, qui n’attendaient que l’aube pour apercevoir leurs tranquilles paysans décidés à y travailler. Cependant, inexorablement, de puissants et lourds nuages noirs se rapprochaient. Entraînés par ce vent mystique, ils ne tarderaient pas à avoir raison de cette dernière lueur. La nature n’y était pas insensible. Les hautes herbes se courbaient, les arbres pliaient, les volets des quelques masures délabrées claquaient. Tant de signes qui ne faisaient que confirmer ce qu’avait vu ce soldat.

Une armée venue tout droit des confins de la Sylvanie marchait sur le Stirland.

La terre sacrée des Asoborns, cette immense province dont la ruralité écrasait le moindre éveil intellectuel, allait de nouveau être confrontée à son angoisse perpétuelle. Bien que le comte Martin ait réussi à faire valoir ses droits sur les duchés de la Sylvanie lors de la battaile d’Hel Fenn de 2145, en terrassant de sa propre main le dernier des vampires, le terrible Mannfred von Carstein, jamais le Grand Comté n’avait pu faire entendre sa loi sur ces hameaux désolés et hantés par les pires abominations qui soient. Dès lors, sa partie orientale n’était plus qu’un affrontement éternel entre les quelques troupes d’infanteries et ces créatures, à la fois démons, bêtes et revenants.

De nouveau, il était certain que les baronnies vampiriques avient choisi de se rallier sous une même bannière. L’agitation n’avait pas été soudaine. Cela faisait déjà plusieurs mois que les guetteurs avaient observé des rassemblements. Des légions entières de squelettes marchaient au son des cors ensorcelés, et jamais les cieux n’avaient été aussi noirs. Des éclairs scintillants d’une lumière verte se lançaient dans un bal assourdissant, signe évident qu’une puissante magie était à l’œuvre.

Ces avertissements furent prirent très au sérieux dans les palais de la capitale.
Á Wurtbad, le comte-électeur Albérich Haupt-Anderssen avait pressé le Haut Commandement d’agir rapidement face à cette menace venue d’outre-tombe. Si auparavant celle-ci n’était le fruit que d’une rumeur, elle fut rapidement confirmée par de nouveaux rapports. Le pire était à craindre. Les mains tremblantes, le regard affolé, le jeune suzerain demanda au commandant suprême de ses armées de prendre la tête des opérations. Souriant à cette mission, le plus grands des officiers du Stirland fit exécuter sans plus attendre les premiers ordres veillant à la mobilisation des troupes, premiers d’une très longue série.

Anton Ludenhof, ce prince aux ambitions démesurées, tenait là une chance d’asseoir encore un peu plus son pouvoir dans les plus hautes instances de la province. L’influence qu’il avait sur les ministres, les émissaires, les conseillers, jusqu’au plus petit aristocrate, était telle que cela faisait bien longtemps que la famille électrice ne prenait plus la moindre décision sans en avoir eu préalablement son consentement. Cet homme de génie, aux stratégies innovantes, à la pensée militaire révolutionnaire, mêlait autant de bravoure que de détermination à atteindre ses buts, qui, s’ils n’étaient que le fruit d’un esprit arriviste, servaient toutefois avec la plus grande des ardeurs la défense du Grand Comté.

Et c’était lui qu’il fallait à tout prix avertir.

Soudain, un loup sortit du bois. Le cri qu’il poussa manqua de peu faire chuter le cavalier, sa monture s’emballant à ce son strident.

-Allez ! Fonce ! Mais fonce ! hurla-t-il, essayant de donner du courage aussi bien à lui qu’à son coursier.

Encore un coup d’étrier, inutile tant l’animal gémissait de peur. Il pouvait sentir l’odeur nauséabonde de cet être qui se rapprochait. Le loup n’était qu’une silhouette, et pourtant, le bruit de ses pas résonnait dans l’esprit du pauvre éclaireur. Il eut alors la mauvaise idée de se retourner.

Ces yeux. Ces yeux de braise qui exprimait une haine sans nom envers la vie. L’espace d’un instant, le soldat fut comme tétanisé par une telle vision.

Les grognements se rapprochaient.

Et une seconde créature sortit des ténèbres.

-Mais… Pu'tain ! C’est pas vrai !

Le cavalier n’avait pas d’autre espoir que d’attendre la forteresse de Leicheberg, le dernier bastion du Stirland face à son effrayant voisin. C’était là que l’armée du commandant suprême s’était installée. Anton Ludenhof attendait le retour de ses éclaireurs.

Il ne lui restait que quelques lieues à traverser. C’était déjà un exploit d’être arrivé jusque là. Le passage par les collines hantées était le plus court, mais également le plus périlleux. Le Stirlander n’avait alors jamais combattu de goules. C’était chose faîte. Lui et son cheval en étaient ressortis indemnes. Oui, c’était déjà un exploit. Certains diraient même un miracle. Mais il semblait évident désormais que sa route n’en serait pas plus tranquille.

Ils se rapprochaient. Quoique le coursier puisse faire, et ce alors qu’il mettait toutes ses forces à tenter de les distancer, la terreur le poussant encore et toujours à galoper d’avantage, ils se rapprochaient.

Tout à coup, un autre cri se fit entendre. Plus strident encore.
Le cavalier eut tout juste le temps de voir cette chose difforme fendre les airs, la gueule pleine de crocs et le regard aussi embrasée que les autres monstres. S’étant jeter à terre in extremis, la créature s’acharna sur l’encolure du cheval.

Le soldat percuta violemment le sol.

Le siège de Leicheberg 12.36
Le Grand Comté du Stirland

La vision de son cher compagnon, lui-aussi à terre, se débattant inutilement contre la férocité de cette chose le fit se relever, malgré sa douleur.

Les deux loups n’étaient plus très loin.

Dégainant son épée, il chargea l’immonde créature.

-Asoborns ! cria le soldat, appelant ainsi le soutien divin de Freya.

Le monstre avait de gigantesques ailes déchirées, et ne pouvait attaquer qu’en faisant des petits bonds, ou en s’agrippant à sa proie. Les cris du cheval sonnaient comme des appels à l’aide pour le jeune éclaireur. D’un trait de lame, il débarrassa son ami de cette chauve-souris, celle-ci gargouillant dans ce qui lui restait de sang. Le cavalier continua son office en la piétinant, accablé par l’angoisse et le chagrin.

En ayant terminé avec cette horreur, il se mit aux côtés du coursier. Celui-ci s’était redressé, et ne savait que faire. Il partait dans telle direction au triple galop, avant de revenir, puis de se cabrer, avant de repartir à nouveau. Enfin, le Stirlander se saisit des rennes, força l’animal à le regarder droit dans les yeux et s’écria d’un vive « Ho ! ». Le cheval s’arrêta. Il était loin d’être calmé, mais au moins, son maître pouvait inspecter sa blessure. Il fallait faire vite. Les deux monstres n’étaient plus très loin. Peinant à y voir clairement, la lune s’étant effacée de moitié, il remarqua toutefois que la plaie n’était pas profonde. Du sang saignait abondamment, mais c’était sans importance. Enfin, il n’y avait pas le temps pour hésiter. Bondissant sur la selle, il pria de toutes ses forces Taal d’aider ce courageux destrier à continuer sa route.

Á l’énième cri d’un des loups, le galop reprit de plus belle.

Néanmoins, il était trop tard. Ces monstres allaient les rattraper. Cette maudite chauve-souris leur avait fait perdre la maigre avance qu’ils avaient sur eux. C’était l’affaire de quelques instants seulement. L’éclaireur pouvait d’ores et déjà discerner les crocs qui s’acharneraient sous peu sur son cou.

-Sigmar… par pitié… ! gémit-il, ne sachant que faire d’autre.

Une idée lui traversa alors l’esprit. Lors de son premier passage sur ces terres, n’y avait-il pas une petite rivière, affluent du Stir ? Oui, il y avait bien le bachheld qui coulait non loin. C’était un projet désespéré que d’essayer de l’attendre avant les loups dont la vélocité ne faisait aucun doute. Et rien n’assurait que l’eau empêcherait ces monstres de continuer dans leur funeste entreprise. La rivière devait se trouver quelque part. Se repérant à la lune, le cavalier fit diriger vers le sud-est sa monture. Les loups n’étaient plus qu’à quelques pas de lui. Que faire ? Par les Dieux, mais que faire ? Était-ce là la fin ? Non, il devait atteindre cette rivière. Pas simplement pour sa vie. De sa survie dépendait l’avenir de toute la province, voir de l’Empire.

-Aidez-moi… ! Par pitié !

Sa prière fut entendue.

Quelque chose apparut, sortant d’un des champs. Aucun doute. C’était bien un autre cavalier. L’éclaireur put distinguer que sa monture était alezane… était-ce… ?

-Pour le comte ! hurla celui qui avait des allures de sauveur.

Sabre au clair, un long pistolet fermement tenu, une détonation fit grand bruit. La fumée de la poudre renforça son aura héroïque.

Mais le coup avait été tiré à côté.

Un des loups se précipita sur lui. Au cri qu’il avait lancé, il ne pouvait s’agir que de Markus Lied.

-Sigmar, merci !

Il fallait lui venir en aide.
Ayant tout juste eu le temps de mettre pied à terre, Lied se tenait prêt à recevoir la charge de la féroce créature. En un coup de coude, il envoya son cheval en retrait.

-Ah, mais bordel ! cria-t-il, esquivant de justesse la première attaque maladroite du loup. Et dis moi, l’ami… eh ! Eh ! Edmund ! T’aurais pas l’intention d’m’aider ?!

Se retournant dans sa fuite en entendant cet appel, ledit Edmund fut jeté au sol.

La bête était sur lui. La gueule grognant de rage, elle prit une dernière seconde avant de s’abattre sur sa gorge. C’était sans compter l’incroyable fidélité du destrier. Prenant appui sur ses membres antérieurs, il l’envoya valdinguer. La bête sonnée, Edmund en profita pour porter la main à son fourreau. L’épée n’y était plus. Dans sa chute, la ceinture avait cédé.

-Pu'tain,  elle est où ?

Pendant ce temps, Markus tenait bon face à la créature des ténèbres. Il avait compris qu’elle n’attaquait qu’en se jetant en avant, et si les sauts étaient puissants, il parvenait encore à anticiper ses attaques. Durant ce face à face où il ne pouvait qu’éviter son agile adversaire, Lied remarqua qu’il ne s’agissait pas d’un loup comme les autres. Certes, son regard laissait croire à quelque malédiction. Mais jamais il n’aurait cru devoir affronter une telle horreur. Des lambeaux de chair pendaient de part et d’autres de cette chose, la bête était couverte d’un poil moisi, et par endroit, il était teinté d’un rouge sombre que seuls les quelques rares éclats de la lune faisaient refléter. Il aurait pu croire que ce n’était que du sang coagulé. Non, il était frais. Et cette créature semblait pourtant être exsangue. L’éclaireur eut une sombre pensée. Qu’était-il arrivé aux autres cavaliers envoyés en reconnaissance ? Son frère aîné était avec eux.

C’était donc ça, un loup funeste…

Ayant enfin retrouvé sa lame, Edmund guettait le monstre. Il s’était relevé. Désormais, il prenait plaisir à tourner autour de sa victime. Comme Markus, le jeune cavalier avait envoyé sa monture se mettre à l’abri. Il lui devait déjà beaucoup, et il était hors de question de risquer une fois de plus la vie de son compagnon. De toute manière, c’était bien de la vitesse de son destrier que dépendait sa propre survie. Il fallait faire vite. D’autres créatures devaient être en approche. Et derrière elles, la terrible armée qui s’avançait inexorablement vers l’intérieur du Stirland. Décidé à chasser de pareils songes, Edmund attaqua. Tentant une passe d’arme grossière, alourdie par la peur qui faisait trembler tous ses membres, le loup ne se contenta pas de parer une telle attaque. Il s’était saisi pleinement de l’épée du soldat, et d’un coup sec, la brisa.

-Oh… pu… tain…

Grognant de joie, le loup gratta le sol de ses pattes. Le festin était dressé.

Tout à coup, il reçut quelque chose dans son cou. Lançant un cri plaintif mêlé d’incompréhension, il tourna la tête sur le côté. Une nouvelle fumée blanche entourait la figure endiablée de Markus, la botte posée triomphalement sur la bête qu’il venait d’occire.

-Euh…
-Bon, s’rait p’tètre temps de se magner le fondement ? Qu’est-ce t’en penses l’ami Fritz ?
-Oui. Je… J’te suis !

Les deux cavaliers se précipitèrent vers leurs montures. Dans leur course, Edmund adressa un regard plein de gratitude envers Markus.

-Ouais… je sais, t’inquiète.



Anton !   Sun glasses


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Banshee
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Jeu 1 Sep 2011 - 10:20
très sympa comme récit Smile Cool a quand la suite ? Clap
Blood-Dwarf

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Jeu 1 Sep 2011 - 13:29
Récit intéressant, surtout si la suite parle d'invasions vampiriques ! Devil

J'ai dû relever une faute en le lisant, mais le temps d'écrire ça que je l'ai déjà oubliée... Fou

J'imagine que vu qu'il a déjà été écrit, tu pourras nous poster la suite très prochainement, et je l'attends avec impatience !

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Ne cherchez pas à comprendre : il n'y a rien à comprendre.
Anton Ludenhof

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Jeu 1 Sep 2011 - 13:38
Ah non, le récit n'est pas écrit ! Je ne fais qu'un "remake" du premier gros texte Sourire

Mais oui... suite !





***




Ayant bondi sur son cheval, Edmund remarqua que celui-ci conservait ses oreilles baissées en arrière. L’animal sentait-il par là seulement cette atmosphère angoissante si palpable, ou bien l’approche d’une nouvelle créature ? Dans tous les cas, il n’y avait pas une minute à perdre. Même accompagné par Lied, le danger était toujours présent. Leurs vies étaient en jeu.

-Leicheberg, c’est par là ! indiqua Markus, pointant du doigt l’ouest.
-Oui, mais ça serait passer par la plaine.
-Et ?
-Il y a une rivière, un ruisseau, je sais plus, le bachheln.
-Il se jette pas dans le Stir c’lui là ?
-Si.
-Alors il passe forcément par la plaine, suivant le nord ! Bihst du Dumh ? lança Lied, terminant sa phrase en utilisant une expression typique d’un Stirlander qui s’assumait.
-Par le nord-ouest plus exactement. Bon bref, tu veux pas tenter de le traverser ?
-Tu crois que ça pourrait les ralentir ?
-Au moins les perdre à l’odeur, supposa Edmund, essayant de rassurer son destrier.
-Hmmm…
-Bon, dans tous les cas, ‘faut se magner là ! Tu me suis ?
-Tu vas nous rallonger la route. Il faut prévenir Ludenhof, merde !
-On est pas prêt de l’avertir si on se fait buter par ces saloperies !
-Rha ! Merde, à la fin ! J’te suis !
-Yah ! cria Fritz, étalonnant son cheval, et filant vers le sud-ouest.

La lune avait disparu. Seules quelques étoiles qui n’allaient pas tarder à être aspirées par cette aura ténébreuse éclairaient encore faiblement la route des deux soldats. Bien sûr, il aurait été beaucoup trop dangereux d’allumer des torches. D’ailleurs, avant même de partir, tous les éclaireurs avaient daigné de prendre la moindre lanterne. Ils étaient entraînés à voir dans l’obscurité. Néanmoins, le manque de visibilité restait une gêne terriblement contraignante, qui ne faisait qu’exacerber leur angoisse. Par où arriverait leur prochain adversaire ? Que discerner de l’avancée des troupes ennemies ? Étaient-ils bien sûr de l’orientation qu’ils avaient prise ? Tant de questions qui ne pouvaient espérer trouver une réponse. A cette nuit qui engouffrait tout, se mêlait désormais un léger brouillard. Pour le moment, il ne faisait que caresser le sol, empêchant seulement les deux cavaliers de voir les sabots de leurs montures respectives, mais ils savaient que sous peu, il allait se relever, se redresser, à la manière de ceux dont il annonçait la venue. Markus et Edmund devaient se diriger à l’ouïe. Encore fallait-il qu’un son puisse leur parvenir, déjà qu’ils peinaient à entendre autre chose que le galop des chevaux. Ils ne pouvaient penser à rien d’autre. Ils étaient absorbés par ce qui les entourait. Tant que le ruisseau n’était pas en vue, ils étaient condamnés.

Âmes damnées en fuite, que pouvait-il bien leur rester, si ce n’était l’espoir, au moins le devoir.

Enfin, le bruit d’un cours d’eau se fit entendre. Fritz ne s’était pas trompé. Quelques instants plus tard, les chevaux s’arrêtèrent brusquement. Le brouillard monté jusqu’aux jambes des cavaliers, le ruisseau n’était pas visible.

-Eh merde ! Comment on sait si on traverse à gué ?
-Ah ben… y’a pas trente-six solutions… !

Edmund fit avancer avec peine son cheval. Il était terrorisé. Et ce n’était pas les coups d’étriers qui allaient changer quoique ce soit. Seules les paroles rassurantes de son maître purent lui faire faire quelques pas. L’eau était glaciale. Inhabituellement glaciale. Edmund pouvait la sentir, elle lui arrivait aux cuisses. Même au printemps, elle n’était pas censée atteindre une telle température. Quelque chose de maléfique devait se passer près de sa source. Ce fut à ce moment là qu’il s’aperçut que de la buée émanait de sa bouche. L’air ambiant était tout aussi froid. Après quelques maladresses, un sabot glissant sur une pierre, un sursaut inattendu de la part du cheval, ou des rennes serrées avec précipitation en ayant cru entendre un bruit, Fritz atteignit enfin l’autre rive.

-Allez, c’est bon ! Ramène-toi !

Même si Edmund ne put voir son ami entrer dans l’eau, il entendit clairement les pas de son destrier, et sur les protestations du cavalier.

-Rha, mais bordel… ! Elle est gelée !

Un bruit.
Cette fois, aucun doute.
Il y avait bien quelque chose.

Dégainant son épée, Edmund regarda frénétiquement aux alentours. Il ne pouvait voir qu’à quelques pas.

-T’as entendu ?
-Quoi ?
-J’crois qu’il y’a…

Un grognement.
Ce n’était pas celui d’un loup. Une puanteur comme jamais il n’en avait senti vint jusqu’à ses narines. Aussi immonde que fut cette odeur, elle lui indiqua la position de ce qui la dégageait. Il décida de mettre pied à terre. Le cheval s’éloigna un peu, confirmant par là la présence de la chose. Serrant son épée de toutes ses forces, Edmund fit preuve d’un immense courage en faisant le premier le pas. La petite marche qu’il entreprit était un exploit. La créature pouvait surgir de toutes parts. Où était-elle ?

La réponse n’allait pas tarder.

Quelque chose transperça la brume. Était-ce humain ? C’était beaucoup trop agile pour être un de ces morts-vivants qu’Edmund avait déjà eu l’occasion de voir. Ce monstre voûté, aux griffes et aux crocs acérés, avec toujours ce même regard de braise… c’était une goule.

Elle attaqua à nouveau. Poussant un cri de haine autant envers ce monstre qu’envers sa propre peur, il l’accueillit par un puissant coup de taille. Les griffes à un rien du visage de son adversaire, la goule s’effondra. Edmund eut du mal à reprendre sa respiration. Haletant, il se décida à terminer son office. Prudent, il se contenta de donner des coups maladroits. Frappant ce qui se trouvait à portée, il parvint à réduire en lambeaux la créature.

-Oh…
-T’arrive à temps.
-C’est quoi ce truc ?
-Une goule, répondit Fritz, allant chercher son coursier et essayant de dissimuler la peur qui l’habitait encore.
-Tu crois qu’il y en a d’autres des comme ça ?
-Tu crois que j’en sais quelque chose moi ? Dépêchons nous, tu veux ?

Et les deux cavaliers reprirent leurs routes, plus inquiets que jamais.

Cette fois, le brouillard était complet. Plus rien n’était visible. Ils étaient plongés dans une masse aux reflets bleutés, guettant chaque son, et perpétuellement rongé par une angoisse qui ne faisait que s’amplifiait. Une branche qui se cassait. Un caillou remué. Une feuille qui tremblait. Tout les pétrifiait.

-On est toujours dans la bonne direction ? Pu'tain, on y voit rien !
-Ferme là ! Tu veux qu’ils viennent jusqu’à nous ! chuchota Edmund, recourbait sur son cheval.
-On va par où là alors ? reprit Markus, imitant son camarade.
-Á la louche, on continue tout droit.
-T’es sûr ?
-Qu’est-ce que tu veux que j’te dise ? On est censé tomber sur un village.
-Lequel ?
-Neuheim.
-Neu quoi ?
-Neuheim, bordel !
-Mouais…
-Quoi ?
-Si on était passé par la plaine… !
-… on serait mort ! Schnauzh ! siffla Edmund, s’en était retourné au dialecte du sud Stirland.
-Eh ho… non mais.

Fritz avait eu raison. Après une longue course, ils arrivèrent enfin au village. Ils ne pouvaient discerner qu’une maison après l’autre. Il n’y avait aucun signe de vie. C’était normal. Les habitants devaient être terrés chez eux. Décidés à s’accorder une courte pause, les deux cavaliers attachèrent leurs chevaux, non sans les avoir préalablement essayé inutilement de les rassurer.

-Je suis pas sûr qu’on est vraiment le temps pour ça…
-Attends, Fritz, tu permets ? J’ai pas posé mon cul depuis trois jours. On reste une heure, pas plus.
-Non, hors de question. Pas une heure. On a pas le temps !
-Bon, d’accord, « un peu moins » !
-Tu connais quelqu’un ici ?
-Non, mais on s’en fout, déclara Markus, frappant à la première porte venue.

Pas de réponse.

-Bon…
-Attends, j’essaye encore.
-Tu crois qu’ils vont t’ouvrir avec ce qu’il y a dehors ?
-‘va bien voir.

Toujours aucune réponse.

-Eh ho ! Y’a quelqu’un ?
-C’est bon, laisse tomber, on va voir à une autre maison.
-Mouais… louche quand même. Surveille les chevaux.
-J’y vais.

Edmund n’avait pas envie de contester l’autorité déplacée de Lied. Il savait qu’il ne fallait pas tenir compte de ses manières. Markus restait un soldat aussi loyal que téméraire. En pareille situation, sa présence était une bénédiction. Qu’il aille se reposer, Fritz n’aimait pas laisser les coursiers seuls. Il en profita pour regarder la blessure de son compagnon. Il n’y voyait pas grand-chose, même si la plaie semblait définitivement bénigne.

-Brave Innst, tu m’auras sauvé la vie plus d’une fois… fit le cavalier en caressant l’encolure du bel alezan.

Il y avait là aussi Kräfin, la jument de Markus. Agitée, elle n’avait pourtant perdu qu’un fer. Á cette pensée, Edmund se baissa pour voir l’état de ceux qu’il avait fixé quelques temps auparavant à Innst. Il ne lui en restait plus qu’un seul.

-Zo eihne Misst ! cracha-t-il, laissant parler à nouveau son patois.
-Quoi qu’y a ?
-J’ai perdu trois fers !
-Ah moche. Bon, y’a personne là-bas non plus.
-Euh… t’en déduis quoi ?
-Les habitants sont sans doute allés à se réfugier à Leicheberg.
-Ou… ?
-Ferme-la. ‘toute façon, on a qu’à rentrer.
-Ça va bien oui ?!
-C’est bon, j’ouvre la porte, j’prends du pain, on s’casse.
-Vas y, j’reste ici.
-J’te ramène quelque chose ?
-Ouais, trois fers.
-T’es con.

Markus s’éloigna. Il choisit de se rendre à la seconde maison. Elle lui semblait plus cossue. La porte était faîte d’un bois solide, mais le loquet ne résisterait certainement pas à sa dague. Sortant ladite arme de sa botte, il la glissa à travers la fente, et comme il l’espérait, la porte s’ouvrit. Accompagné d’un grincement d’agonie, le soldat pénétra dans la demeure. Comme il s’y attendait, elle n’avait pas d’étage. Si, il crut discerner une échelle, au sol. Sans doute pour aller au grenier. La pièce principale servait tout aussi bien de chambre, de cuisine que… de maison finalement. La pauvreté était accablante. De la paille, voilà ce qui recouvrait les quelques misérables planches de bois. Sur la table, une miche de pain.

-Attends… deux minutes là !

Ce n’était pas logique. Si les habitants avaient fui comme il le pensait, ils n’auraient pas oublié ce qui représentait un véritable festin pour tout paysan du Stirland oriental. Et cette échelle ? Pourquoi était-elle par terre ?

-Oh… purée. Edmund ? Edmund… ?

Dans les ténèbres du grenier, des yeux le fixaient. Des silhouettes se mouvaient. Des plaintes sourdes et discordantes peinaient à se faire entendre. Puis, l’odeur vint confirmer les craintes du cavalier. Faisant demi-tour, il se mit à courir comme jamais vers Fritz.

-Pu'tain, pu'tain, pu'tain, pu'tain, pu'tain ! On dégage ! On fout le camp d’ici !
-Mais quoi ?
-Les hab… les habitants !
-Bordel, mais quoi ?!

Edmund n’avait encore jamais vu son ami dans un tel état. Qu’est-ce qu’il y avait de si grave.

-Pu'tain, mon gars… ! Ils ont pas fui !
-Hein ?!
-Ils sont toujours là !

Á ces mots, une plainte similaire leur parvint. Derrière le rideau de brume qui masquait l’essentiel du village, des bruits de pas approchaient. Plusieurs êtres gémissaient.

-C’est quoi que tu as vu, par Sigmar ! Dis le moi !
-Des zombies.




Dernière édition par Anton Ludenhof le Lun 5 Sep 2011 - 11:34, édité 1 fois

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Ven 2 Sep 2011 - 11:24
Héhéhé... Ils sont pas dans la merde ces deux-là!
Une suite très plaisante (c'est marrant, je commente le même texte sur deux forums, difficile de ne pas se répéter Razz ) avec une ambiance lourde, des ténèbres insondables et des Morts-Vivants qui sortent de tous les côtés! Que demander de plus?

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Dim 4 Sep 2011 - 18:56
+1 pour Thomov! Ils devraient aller aux toilettes...
==> [ ]

Texte bien sympathique, malgré mon incompréhension du dialecte du Stirland. Le siège de Leicheberg Fou4_gif

Edmund Fritz... je suppose que c'est fait exprès Le siège de Leicheberg Happy_gi

Le siège de Leicheberg Clap_gif

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Lun 5 Sep 2011 - 7:49
Eh ! J'viens d'm'appercevoir qu'il y avait une censure automatique ! Mais non, ça pourrit tout le texte ! Crying

Pour le dialecte, c'est de l'allemand mixé à du bavarois, avec quelques ö/h pour modifier le tout Sourire

La suite très très vite !

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Lun 5 Sep 2011 - 9:19
Une censure automatique?! Quelle horreur...
Il n'est malheureusement rien que je puisse faire pour arranger cela Anton.
Je te suggère d'éditer tes textes et de remplacer ledit mot censuré par un équivalent qui passera entre les mailles du filet.
Sincèrement désolé de cette situation.

EDIT: Un autre modérateur à proposé de simplement modifier l'orthographe du mot en question, comme par exemple ajouter un accent ou encore couper le mot par un point. Pas terrible mais manifestement c'est au dessus de notre pouvoir de changer cela...

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Mer 7 Sep 2011 - 17:56
Suite !



Les silhouettes commencèrent à apparaître. Chancelantes, vacillantes, titubantes, elles se traînaient, les mains pointées vers ce qui pourrait combler leur appétit. Animées par un instinct de survie qui n’avait plus d’autres soucis que de se sustenter d’une manière ou d’une autre, leur marche semblait implacable. Les épaules allant de gauche à droite, la tête d’avant en arrière, elles ne quittaient pourtant pas des yeux les deux soldats. D’autres bruits. Il y en avait d’autres. Ils arrivaient par les côtés. Une tuile alla même se fracasser en contre bas. Il y en avait même sur les toits.

-Bon… une suggestion… ? demanda Edmund, reculant mécaniquement vers les chevaux.
-Il faut repasser la rivière !
-La goule de tout à l’heure ne pouvait pas être la seule. Il doit y en avoir des dizaines !
-Et tu préfères quoi ? Whas denkst du endlich ?! Faut partir d’ici !

Les morts-vivants avançaient. Ce n’était plus qu’une question de minutes avant qu’ils ne soient sur les pauvres Stirlanders.

-Glöb mir ! Y’a pas plus dangereux qu’une meute de goules… !
-Mais bordel ! Tu veux qu’on fasse quoi ? Tu crois qu’on va tenir ?
-Il faut continuer la route.
-La route, elle est bloquée, pauvre con ! Tu l’vois pas ?!
-Leicheberg est devant, répondit froidement Edmund.
-De… quoi ? Qu’est-ce tu dis ?

Fritz monta sur Innst. Curieusement, le cheval ne semblait pas tendu, seulement attentif. Il agitait néanmoins ses sabots, cherchant à faire comprendre à son maître qu’il était temps de partir. Edmund entendait lui donner raison.

-Il faut passer, cria-t-il, dégainant son épée.
-Tu te fous de moi là ?! répliqua Markus, montant sur sa jument.
-T’es avec moi ?

Le cercle de la non-vie se rapprochait…

-Attends… tu vas quand même pas… ?
-Gloire et honneur au Grand Comté ! hurla Edmund, éperonnant Innst.

Le coursier se cabra, et à toute vitesse, fila en direction des morts-vivants. Il y en avait plus que ne l’avait pensé le cavalier. D’instinct, le cheval sauta par-dessus la première ligne, Edmund ayant manqué de peu d’être désarçonné. Il se retrouvait maintenant entre ceux qui suivaient auparavant ceux qui se retournaient maintenant.

-Si. Il l’a fait. Yah !

Markus ordonna à sa monture de le rejoindre. Mais celle-ci n’eut pas le même courage qu’Innst, et chargea maladroitement les premiers zombies. Ce qui était censé être une fuite aussi véloce que précise tournait désormais à un corps à corps dont l’issue était fatale.

-Bordel ! T’en as d’autres des idées à la con comme ça ?!
-Ta gueule ! ne sut que répondre Edmund, trop occupé à transpercer de sa lame une énième abomination. Faut foutre le camp !
-Non, sans déconner ?! Tu crois ? Non parce qu’on peut servir de pique-nique si tu veux !

Presque simultanément, les deux chevaux prirent appui sur leurs membres antérieurs et flanquèrent un coup sec dans la masse de ces créatures. Plusieurs furent jetés à terre, les autres furent bousculés.

-Allez merde, on arrête tes conneries, et on dégage !

Edmund n’allait pas contester une proposition aussi clairvoyante.

De chaque ruelle, de chaque maison, de chaque porte, de chaque fenêtre, sortaient les villageois devenus des serviteurs de la non-vie. Il y avait des hommes, bien sûr, des fermiers et des palefreniers, mais également des femmes, et des enfants. Le cri d’effroi d’un bébé glaça le sang des cavaliers. La vision d’un soldat animé de la même sorcellerie leur fit vite comprendre que ce n’était pas le moment de s’attarder sur cette horrible vision. La mort n’était pas seulement ce qui les attendait s’ils se faisaient capturer, puis certainement dévorer. C’était bien une éternité d’asservissement, éloignés pour toujours de la lumière de Freya et de Sigmar.

-Pu'tain, y’en a partout ! C’est pas vrai !

Markus avait raison. Les rues étaient envahies par ces êtres revenus de l’au-delà. Les éclaireurs se faufilaient comme ils pouvaient, tels des flèches transperçant un océan de décomposition et de putréfaction. Edmund nota tout ceci. Dans sa fuite, il comprit qu’il ne pouvait pas s’agir uniquement des habitants Neuheim. Il y en avait trop. Non, il s’agissait bel et bien d’une première offensive, visant à ratisser les villages environnant la citadelle de Leicheberg. L’armée qui était en mouvement ne souhaitait donc pas être ralentie. Par déduction, Edmund en conclut que celle-ci se déplaçait alors à toute vitesse. Mais il y avait quelque chose qui l’inquiétait beaucoup plus, ce qui n’était pas peu dire. Les cadavres qui griffaient Innst de leurs ongles crasseux étaient dans un état… inhabituel. Regardant de part et d’autre, esquivant tantôt ce qui sautait des toits aussi bien que ce qui se jetait sous son cheval, il ne put s’empêcher de constater que ces zombies étaient atteints d’un pourrissement tel qu’il ne pouvait être l’œuvre que d’une puissante magie. Il y avait au moins d’anciens habitants de Neuheim ici, c’était certain. Et il avait déjà vu des « serviteurs frais ». Ceux-là n’en étaient pas au point de ramasser leurs boyaux. De la nécromancie. Un de ces mages noirs avait fait abattre sa malédiction sur la malheureuse bourgade. Ce n’était pas un détail. Cela supposait que l’armée venue de Sylvanie pouvait éteindre l’étincelle de vie de toute une population locale afin de l’asservir sur l’instant. Ce n’était pas des corps relevés. Les habitants n’étaient pas morts au combat. Ils avaient dû se terrer chez eux, priant les Dieux de les épargner, les pères et les fils barricadant les portes, les mères et les filles rassurant tant bien que mal les enfants. Oui, les portes avaient été clouées ou bien cadenassées. Markus n’avait-il pas forcé la porte de la seconde maison ? Edmund ne pouvait pas se permettre de tomber ici. Ce qu’il venait d’apprendre, le commandant suprême devait impérativement le savoir. Les vampires avaient un atout contre la forteresse.

-Il doit le savoir !
-Hein ?
-Continue !

Mais c’était impossible. Les zombies s’étaient rassemblés. Ils bloquaient la sortie du village. Un d’eux, qui portait un uniforme et qui tenait fermement une torche d’une main et un pistolet dans l’autre, tira un coup de feu. La balle partit se loger dans le crâne d’un de ses homologues, celui-ci se retournant vers son supérieur, l’air hébété et contrarié. Les chevaux n’eurent d’autres choix que de s’arrêter. Le reste des morts-vivants refermaient lentement leurs arrières.

-Oh… pu'tain.
-Non… non ! Il faut qu’on passe !
-On est foutu, fit Markus, descendant de sa jument.
-Qu’est-ce que tu fous ?!
-Ils ne m’auront pas facilement.

Ces mots avaient été prononcés avec le même regard de haine que celui qu’abhorraient ces créatures. C’était là le regard d’un Stirlander envers ce qui rongeait sa terre natale. Edmund le connaissait bien. L’épée à la main, il alla aux côtés de son ami. Les deux coursiers ne savaient que faire. Ils restaient finalement au plus près de leurs maîtres.

-Ce fut un honneur, Edmund.
-Pareil pour moi.
-On aurait dû prendre par la plaine.
-Oh… mais va te faire ! lança Fritz, s’accordant un sourire de désespoir.

Markus jeta un coup d’œil sur la vague qui arrivait depuis le centre du village. Elle était nettement plus nombreuse que ceux qui leur barraient la route. Mais ceux-là avaient établi une barricade. Non, il n’y avait aucun moyen de passer. Cordonnerie. Taverne. Entrepôt. Tannerie. Menuiserie. Tisseranderie… Tannerie ?

-Oh pu'tain !

Markus fonça vers la tannerie. La porte était fermée, heureusement, elle n’était pas barricadée. Essayant de l’enfoncer de plusieurs coups de bottes, elle bloquait toujours l’accès. Edmund lui, eut à peine le temps de voir son camarade agir de la sorte.

-Wahs machst du dah ?!

La porte céda enfin. Elle tomba net à l’intérieur de la maison du tanneur. Markus se précipita à l’intérieur.

-Retiens les un moment !
-Ah… ! Ben ouais, pas de problème ! ironisa Fritz, pourtant très inquiet de l’avance des zombies.

Lied fouilla dans tout l’atelier. Ouvrant tonneaux et autres récipients, il était animé d’une réelle frénésie. Il y avait encore un espoir pour les deux hommes de s’en sortir. Encore un dernier.

-Mais pu'tain, mais où elle est bordel de bordel de bordel de merde ?! Où tu l’as foutu, connard de tanneur !

Une plainte. Encore une.

-Ah mais non ! Pas maintenant !

Ledit tanneur était là. Il semblait sourire, tel un ahuri qui venait de piéger un copain.

Á l’extérieur, Edmund ne comprenait toujours pas ce que faisait Markus. Les deux chevaux restaient collés à lui. S’il tendait l’épée, il toucherait déjà un de ces monstres.

-Crève charogne ! hurla Lied une fois qu’il en eut fini avec le tanneur. Ah, c’que tu m’auras tanné toi !
-Eh connard, tu crois que c’est le moment de faire des calembours à deux ronds ?! cria Edmund, ayant entendu le jeu de mot de son ami.
-Retiens-les j’t’ai dit !
-Quand t’es comme ça, ça m’énerve ! cria encore Edmund Fritz.

Un dernier tonnelet. C’était le bon.

-Oh pu'tain ! Je l’ai ! Je l’ai ! Par Sigmar, je l’ai ! Ah, mais ouvre toi bordel ! Ouvre toi !
-Et merde… Au nom du Stirland ! lança Edmund, décidant de s’engager dans le combat.

Il continua de s’encourager, de se donner le moindre espoir, à chaque coup qu’il donnait. En quelques passes d’armes, il avait déjà mis à terre une dizaine de ces zombies, mais ils étaient innombrables. Et cette fois, il ne fallait pas compter sur les deux chevaux.
Tout à coup, Markus se précipita dehors. Dans une danse furieuse, il répandit sur la masse mort-vivante le contenu du tonnelet. Même Edmund resta bouche bé en voyant le comportement du soldat.

-Euuuuuh… ?

Il ne fallait pas être un zombie pour parler leur langage.

-Á cheval ! Bordel à cheval ! hurla encore Markus, ayant fini de tout vider.

Sans réfléchir, et profitant de l’incompréhension des cadavres, Edmund obéit.

-Attention ! On y va mon gars ! On fonce !
-Hein ?!
-Au nom du comte !

L’épée au clair, il décapita d’un revers splendide le chef des morts-vivants. L’instant d’après, il en était déjà à se dépêtrer de cet ensemble purulent. Fritz en fit autant, sans comprendre.

Il obtint enfin sa réponse en voyant les zombies s’enflammer.
Markus était un génie.

Toutes ces abominations se transformèrent en véritables torches. Il n’en fallut pas plus pour affoler les chevaux et leur donner l’énergie de bondir au-delà de la masse. La barricade était trop haute pour être franchie et les côtés étaient encore gardés par des morts. Mais les flammes allant d’un corps à un autre, ils furent incapables de se saisir de ces proies pourtant si fragiles, si frêles. Markus et Edmund les regardaient, figés, les voyant se débattre, se tordre dans tous les sens, gémissant encore et encore. Si beaucoup se rapprochèrent, espérant les amener avec eux, aucun ne put aller au-delà du tranchant des épées des deux cavaliers.

-Alors là… guht gespielht
-Mon oncle est tanneur.
-Je sais. Tu crois que ça va les contenir ?
-On nous ouvre la voie ! On y va !

Markus avait encore une fois raison. Les quelques zombies qui protégeaient les bords de la barricade n’étaient plus qu’un tas de chair et de cendre. Les autres, ceux qui venaient de l’intérieur du village, n’allaient pas tarder à passer le mur de feu que constituaient encore leurs malheureux camarades. Il était temps pour les deux Stirlanders de poursuivre leurs route.



Vers Leicheberg.

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Mer 7 Sep 2011 - 18:21
Bien, toujours aussi intéressant (des zombiiies Love ) ! Cependant, j'ajouterais quand même que bien qu'ils soient soldats du peuple, et tout et tout, je trouve que le fait de trouver des jurons à chaque coin de phrase alourdit le texte sans raison apparente le plus souvent. Enfin ce n'est que mon avis, et il peut très bien être démenti par d'autres membres du forum ! Smile

Sinon, j'ai juste relevé une sorte d'incohérence : comment un zombie peut-il tirer au pistolet ? Déjà qu'en terme de jeu, il me semble un peu bancal qu'il puisse tenir une arme comme un bout de bois, mais alors qu'il utilise un ustensile aussi complexe qu'un pistolet, ça frise le non-sens... Tout dépend bien entendu, et il se peut aussi que la personne soit morte le pistolet à la main et ait appuyée maladroitement sur la détente. Enfin bref !

Sinon, et bien j'attends la suite, car elle promet d'être alléchante ! Cool

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Mer 7 Sep 2011 - 18:46
Merci pour ton commentaire l'ami !

Et pour ce qui est du zombie, eh bien sache que ça existe ! Il n'est pas si loin le temps où les boucaniers de la Côte des Vampires faisaient transpirer les hobbyistes qui s'étaient essayés à la Campagne de Lustrie ! Et ces mêmes boucaniers pouvaient user d'armes à poudre noire !

Pour les insultes... oui, à surveiller. Mais le prochain passage sera tout à fait différent Innocent

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Mer 7 Sep 2011 - 19:27
+ 1 pour Blood-Dwarf. Quelques jurons, c'est bien pour le côté comique ou encore pour faire savoir que ces hommes ne sont pas les amis de Karl Franz, mais trop ça gâche tout.

Sinon, on peut dire qu'ils ont eu de la chance!

Suite!

Le siège de Leicheberg Clap_gif

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Jeu 8 Sep 2011 - 15:22
Une suite une fois de plus fort savoureuse avec de la tension et une fuite audacieuse.
Comme l'ont dit mes chers confrères; l'abus de jurons nuit gravement à la santé (euh, je voulais dire alourdit le texte).
Cela dit, vu la situation désespérée, ça peut encore se justifier.
Nous prions tous Sigmar pour que la suite arrive prochainement.


Dernière édition par Thomov Le Poussiéreux le Ven 9 Sep 2011 - 9:51, édité 1 fois

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Jeu 8 Sep 2011 - 19:08
Comme l'on dit mes chers confrères
C'est mon jour de bonté, je ne dirai rien Le siège de Leicheberg Icon_mrg


Dernière édition par Arken le Ven 9 Sep 2011 - 12:58, édité 1 fois

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Ven 9 Sep 2011 - 9:53
Arken a écrit:C'est mon jour de bonté, je ne dirais rien Le siège de Leicheberg Icon_mrg

Tu voulais dire: "je ne dirai rien", non? Shifty
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Dim 11 Sep 2011 - 23:41
Je viens de tout lire, et je n'ai qu'une chose à dire : chapeau Clap !

On s'y croirait vraiment. La terreur, la résolution des deux hommes, l'attaque des zombies, et j'en passe...

Sincèrement, je ne peux que te conseiller de continuer sur cette voie, car là tu nous prend vraiment par les sentiments.

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Mer 14 Sep 2011 - 18:15
Souiteuh !




La forteresse de Leicheberg.

Elle était enfin là cette citadelle que l’on disait imprenable, tellement d’ailleurs que lors de la dernière des guerres vampiriques, elle était passé à l’ennemi une dizaine de fois. Il n’en restait pas moins qu’elle se tenait là, arborant fièrement les couleurs du Grand Comté.

Leicheberg.
La montagne de cadavres.
La citadelle portait bien son nom. Cinq murailles protégeaient le bastion intérieur, protégeant chacune des quartiers entiers d’une ville qui comptait plus de casernes que de tavernes. L’essentiel des forces du Stirland y étaient constamment en garnison. Même lors de la terrible Tempête du Chaos qui ravagea le nord de l’Empire, le graf de Wurtab s’était refusé à dégarnir Leicheberg. Cette citadelle qui avait connu tant de sièges, tant de massacres, tant de morts, était le seul rempart viable face aux invasions sorties de la Sylvanie. Son nom, elle l’avait gagné par les monticules de corps qui avaient jonché son sol aux différents niveaux de la cité, mélangeant aussi bien les soldats que les horreurs invoqués par les nécromants. Ce type de forteresse n’était en soit pas une exception au sein de l’Empire. L’influence des nains en matière d’architecture militaire était partout. Mais Leicheberg avait la particularité d’être l’une des plus vieilles. Sa construction remontait déjà au temps de Sigmar, où elle n’était alors qu’un bastion de bois et de paille. On racontait néanmoins que le premier Empereur y avait séjourné, peu après la bataille où il parvint à unifier toutes les tribus. Par ailleurs, même si le tourisme n’était guère développé, le comte von Stople, en charge de la forteresse, mettait à la disposition des visiteurs un musée où quelques babioles de ce temps là avaient pu être conservées. Le terme était pleinement approprié. Qui pourrait s’ébahir d’un bout de fourrure moisi, si légendaire soit-il ? Mais la fonction de la forteresse restait évidemment militaire. Passé le temps des guerres contre les orcs, contre les morts-vivants, et également contre le Talabecland durant la guerre civile, la citadelle décida de s’enterrer, notamment face à la menace que représentait peu à peu l’artillerie. Ainsi, aux cinq murailles qui s’élevaient sur le pic, des souterrains que l’on pourrait presque appeler des catacombes permirent de protéger la cité au mieux. L’importance de Leicheberg était telle que le quart des productions agricoles du Grand Comté y étaient destinés, en réserve, quitte à affamer les paysanneries. Beaucoup à Nuln ou à Altdorf pensaient que le Stirland investissait d’une manière démente sur ce bastion, d’autant que cela faisait des années et des années que la Sylvanie se tenait tranquille. Ils ne comprenaient pas que c’était de cette forteresse que dépendait la survie même de la province. Le souvenir des guerres vampires était toujours bien présent dans chaque famille du Stirland. Il était hors de question de penser ne serait-ce qu’une seconde à désarmer Leicheberg. Ce fort qui protégeait aussi bien leur terre que l’Empire lui-même était une fierté, un orgueil que chacun pouvait avoir, s’approprier. Á tel fait d’arme du Middenland, à telle bravoure de l’Ostermark, à telle invention de Nuln ou à tel palais du Reikland, le Stirland se contentait de rester ce qu’il avait vocation à toujours rester : la terre sacrée de la dernière reine guerrière, le sol immaculé où les horreurs de la mort et de l’au-delà seraient à jamais vaincues.

Mais cette forteresse avait bien des défauts. Là où on parlait d’héritage, beaucoup pensait déjà à la rusticité de la chose. Á Altdorf, on n’hésitait pas une seconde à qualifier la citadelle d’obsolète. Et pour cause. Depuis que le Stirland n’était plus à la tête de l’Empire, son règne s’étant terminé sur le malheureux épisode de Dieter IV, les comtes électeurs de la province n’avaient plus les moyens de maintenir le fort au goût du jour selon les standards de l’époque, si tant est qu’ils eussent eu déjà l’occasion de mener ce genre d’entreprise. Ainsi, les efforts étaient suffisamment considérables pour espérer seulement maintenir la forteresse en état. Cela n’empêchait malheureusement pas d’en faire une vitrine bien esthétique du comté. Il était préférable d’en rester aux faits d’armes. En soit, le fort  n’avait pas tant de retard à rattraper vis-à-vis de ses homologues impériaux. Militairement, la place était défendable. D’ailleurs, et l’anecdote valait d’être remarquée, aucun plan d’invasion du Stirland émis par quelque province belliqueuse n’envisageait sérieusement l’hypothèse d’un siège. Sans l’avouer, cela aurait été une folie. En vérité, la forteresse n’était tombée que par l’obstination toute « naturelle » des levées sylvaniennes. Aucune armée humaine ou simplement mortelle ne pouvant s’en prévaloir, elles préféraient passer son chemin, et la sévère défaite du Talabecland sur le fort laissait nettement à penser qu’il valait mieux continuer ainsi. Certes, contrairement aux autres grandes forteresses impériales, la mécanique n’avait pas lieu d’être ici. L’armée du Stirland entretenait tout juste un train d’artillerie dont l’efficacité tenait plus de la figure diplomatique que de la réelle performance militaire, alors s’imaginer voir équipée la citadelle de prouesses technologiques hors de prix, c’était là pure folie.

Le siège de Leicheberg 12.74
Leicheberg, à sa grande époque.

Sensiblement, le schéma tactique de Leicheberg restait très classique. Les défenses offraient aux assiégés de quoi repousser l’ennemi, et les murs de la citadelle étaient à même d’entreposer de quoi entretenir un siège. Petite merveille, l’alimentation en eau ne dépendait pas seulement des puits. La rivière steyr avait été détournée pour passer sous la forteresse, et la déviation avait été faîte de main de maître, puisque la chose était souterraine, et puisque ladite rivière se tenait nettement plus à l’ouest que le fort situé dans la partie occidentale du Stirland, un risque de contamination venue des troupes de la Sylvanie était minime. Par sécurité toutefois, en période de guerre, c’était aux prisonniers d’inspecter la qualité des eaux, en entendant évidemment par là qu’ils devaient la goûter et en subir les conséquences si empoisonnement il y avait eu. Non, militairement la citadelle constituait un obstacle de taille.

Mais des défauts, il n’en manquait pas, et notamment concernant un critère sur lequel le Stirland n’était pas prêt à faire évoluer les choses. L’esthétisme voyait là sa Némésis. Qualifier la place de « bordel » serait une insulte même à ces lupanars que les Stirlanders appréciaient tant. Se retrouver dans le dédale de ruelles qui s’était installé entre les murailles tenait de l’exploit. La seule chose dont on était à peu près sûr, c’était que les habitations les plus nobles se situaient « vers le haut ». Encore fallait-il que de nobles il y ait. Plus aucun aristocrate, à l’exception de la famille du comte von Stople, n’habitait les lieux. Le dernier niveau était donc un spectacle de maisons bourgeoises abandonnées qui lui donnait presque une allure fantomatique lorsque l’on regardait en contrebas la nuée de soldats mêlée à la populace, l’un et l’autre ne pouvant se distinguer que sous les yeux d’un pur natif de la province. Personne n’avait eu le courage de faire un plan, et encore moins un plan des souterrains. Mais si seulement il n’y avait que cela… il flottait en permanence une odeur nauséabonde. La merde conjointe à la pisse prenait le museau de n’importe quel animal muni du plus minable des odorats. La disposition des latrines était un tel fiasco que désormais il était impossible d’y remédier. Du moins, même une fortune n’aurait pas convaincu le moindre ouvrier de s’y rendre corps entier dans ce lieu cent fois maudit. On avait bien essayé encore une fois de forcer des prisonniers, mais une fois la pelle à la main, il n’y avait pas un seul qui résistait au malaise, et tous finissaient par rejoindre l’objet de leurs hypothétiques travaux. Horrible vision que celle de voir un homme, si criminel soit-il, être aspiré vivant par cette masse stagnante.

Qui avait bien pu être le crétin d’architecte qui avait pensé qu’installer ces aisances autour des murailles du premier niveau serait une bonne idée ? Certainement un de ces Tiléens que le Stirland débauchait afin de s’éviter les honoraires des érudits venus de Nuln.

Cet anneau putride englobait littéralement tout Leicheberg, et n’avait aucune peine à parvenir aux narines des niveaux les plus élevés. Même les souterrains en étaient imprégnés. Il n’était pas rare de croiser des familles entières avec des feuilles, voir des cailloux, faisant avec ce qu’elles avaient sous la main, profondément enfoncées dans les cavités nasales. Ce qui avait par la même occasion causé beaucoup d’accidents malheureux. Tout le monde avait en mémoire la tragique fin du petit Raimund qui avait eu la mauvaise idée d’inspirer profondément par le nez alors même qu’il s’était muni de la sorte. La pierre avait atteint le cerveau au bout de plusieurs heures de dérive agonisantes. Les médecins avaient été impuissants. Enfin, les médecins. Ceux qui avaient déjà désinfecté une plaie avec plus ou moins de succès.  Et si l’hiver apportait une couche de neige qui permettait à peine de couvrir l’odeur, l’été était un cauchemar. Des milliers et des milliers de mouches s’agglutinaient sur les déjections devenues un véritable cloaque aux liquides à ce point compact qu’une hache aurait pu s’y maintenir à la surface. Et gare à l’imprudent qui tombait des échelles menant aux murailles. Les soldats avaient surnommé cette abomination le « slourp ».

Enfin, il aurait été difficile de mesurer la laideur du reste de la cité après cet aspect déjà si horrible. La pierre était noircie de toutes parts, les rues n’avaient presque plus de pavés, laissant des chemins de boue en guise de voie urbaine… il n’était pas rare que lors de grandes pluies, toute l’eau tombée sur le sommet se précipitant vers le bas, les quartiers inférieurs se retrouvaient inondés jusqu’au genou. La vermine était abondante, et seules les quelques rares judicieuses précautions des autorités avaient pu sauver les réserves. Sortir de nuit était une folie. Ces quartiers là n’avaient pas le moindre éclairage. Et puisque les citadins étaient en permanence au contact des soi-disant troupes régulières du Stirland, la criminalité prenait un tout autre visage. Trafics en tous genres, prostitution non déclarée, vol, marché noir, recel, et tant d’autres activités qui n’étaient jamais réprimandées. Tout se faisait « dans le feutré ». Il était très rare de se faire agresser en plein jour. Mais dès la nuit tombée, et à l’intérieur d’une de ces centaines maisonnées qui tenaient plus du taudis que d’une habitation décente, les maux de l’humanité trouvaient un refuge des plus douillets. Il fallait bien comprendre les pauvres habitants. La plupart n’étaient que des paysans effrayés qui avaient choisi initialement de s’installer provisoirement à Leicheberg, espérant bientôt retrouver leurs fermes. Mais c’était sans espoir. Chaque mois, leur autorisation de départ n’était pas délivrée. Á vrai dire, pratiquement aucune n’avait été donnée, et ce depuis plus d’une décennie. Á une population fière de sa citadelle, se mêlait désormais une masse misérable qui n’avait plus rien à voir avec ce qu’avait pu connaître autrefois la cité. Et c’était sans compté que c’était à Leicheberg que tous les hommes trouvés ci et là aux abords de la Sylvanie étaient jetés. Tous les hommes, y compris les populations venues du nord de l’Empire, ayant fui l’invasion du Seigneur de la Fin des Temps. Aux populaces rurales de la province se mêlait donc sans distinction des hommes du Hochland, de l’Ostermark, du Nordland ou encore de l’Ostland. Il était parfaitement inutile de préciser à quel point les tensions sociales étaient palpables.

Et c’était à cet homme, à ce prince d’exception, à ce génie de l’art militaire, à ce politicien hors pair, à Anton Ludenhof, le commandant suprême des forces du Stirland de faire front depuis ce rocher de misère.


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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Mer 14 Sep 2011 - 18:39
Quelle belle suite, aux paysages émouvants! Le siège de Leicheberg Icon_mrg
Personnellement, je n'aurais jamais tenu une description aussi longtemps. Respect!

Il n’était pas rare de croiser des familles entières avait des feuilles
Vu le sens de la phrase, j'aurais mit "avec"...

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Mer 14 Sep 2011 - 18:44
Hiiii... j'ai fait ça rapidos ce matin !

Bien vu pour la faute de frappe !

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Mer 14 Sep 2011 - 19:02
Euh, alors je vais te l'avouer, je n'ai pas eu le courage de tout lire.

La raison est simple : un gros pavé comme ça, c'est toujours intimidant. Est-ce que tu pourrais mettre quelques sauts de lignes de temps en temps ? Ça aérerait le texte et le rendrait beaucoup plus agréable.

EDIT : voila, c'est bien plus agréable comme ça.

Concernant la cité, elle correspond assez bien à la description faite dans "les chroniques von Carstein", mais il me semble que la ville est en Sylvanie, pas dans le Stirland (sauf si on considère que la Sylvanie fait partie du Stirland). Mais bon, je n'ai pas sur moi mon exemplaire de "les maîtres de la nuit", alors je ne peux pas le confirmer.


Dernière édition par Arcanide valtek le Mer 14 Sep 2011 - 19:51, édité 1 fois

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Mer 14 Sep 2011 - 19:35
Pitètre un peu mieux Sourire

Edit réponse :

Ah ben ça alors ! Y'a une description de la cité ? Moi, j'suis parti en freelance ! Sourire
Selon les sources que j'avais, c'est là le "dernier fort du Stirland", donc, ça n'appartiendrait pas à la Sylvanie (qui oui, appartient au Stirland Whistling ), et d'ailleurs, c'est confirmé quand on regarde les cartes de la Sylvanie et du grand comté Sun glasses

(bon après, hein !)

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Jeu 15 Sep 2011 - 9:53
Excellent mon cher Anton!
Cette description pour le moins savoureuse m'a fait une forte impression; on a qu'une seule envie, c'est celle de visiter cette perle touristique du Stirland! Happy

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Le siège de Leicheberg Empty Re: Le siège de Leicheberg

Mer 12 Oct 2011 - 20:02
Très pris ces derniers, je vous propose une petite suite en attendant... la suite ! lol


***


Il était là.
Il se tenait là.
Et il regardait.

Le commandant suprême, bras croisés, scrutait l’horizon. Il guettait cet Est qui lui avait tant de fois apporté la victoire, mais il ne s’était jamais offert le luxe de penser que ce ne pouvait être autre chose qu’un beau lancé de dés. De temps à autre, il baissait les yeux. La cité était en pleine ébullition. Soldats et citoyens couraient de part et d’autres. Les premiers se préparaient au siège aux ordres des officiers qui les pressaient encore et encore, tant le temps leur manquait. Les seconds fouillaient désespérément chaque ruelle, se bousculant, se battant même, pour ne serait-ce qu’attraper une planche moisie, la considérant alors comme la relique qui barricaderait un tant soit peu leur misérable bâtisse. En regardant de plus près, il s’agissait surtout d’enfants. Le général n’avait pas oublié qu’il avait lui-même ordonné la mobilisation de tous les hommes valides et aptes au combat. Selon les critères militaires du Stirland, cela impliquait de faire subir la conscription à tous les fils de la province, dès dix ans et jusqu’à… jusqu’à l’âge où ils n’étaient qu’une gêne de plus pour les régiments. Malgré cette petite pagaille somme toute plus que prévisible et finalement assez habituelle, la mise en ordre de la forteresse avançait. Il ne faisait aucun doute que jamais ils n’auraient le temps d’en saisir toutes les ressources. Il était trop tard pour ça.

Ces nuages. Ces maudits nuages noirs. Le prince les connaissait. Même s’il attendait le rapport de ses éclaireurs, il était intimement persuadé que l’assaut de la citadelle ne tarderait pas. Lui, comme ses officiers et ses soldats, ne s’était autorisé aucune pause, et ce depuis plus d’une semaine. Ce petit temps d’observation n’en constituait aucunement une. Envoyant ses lourdes paupières valdinguer, le commandant suprême était attentif au moindre détail, et ce malgré une fatigue qui était flagrante. Ses cernes tranchaient tellement avec le bleu vif de ses yeux, et ajouté à ses cheveux bruns qui d’ordinaire auraient reçu un soin approprié, il abhorrait là une figure qui reflétait pleinement ses préoccupations. Il ne restait de sa prestance que son uniforme, pourtant lui aussi usé. N’ayant pas une stature très développée, il savait toutefois tirer avantage de son buste. Un superbe pourpoint noir accueillant le grand collier du collège militaire de Wurtbad et qui laissait voir par de larges fentes sa chemise aux couleurs de sa province mettait en valeur cet homme qui prenait tant soin de son image. On s’arrêtait souvent sur ses jambes, car il était bien des fois préférable de baisser la tête devant lui. Sa culotte reprenait le vert et le jaune de sa chemise, mais le tout se terminait par des bas blancs qui rejoignaient de petits souliers à boucle d’or. Un baudrier de cuir caché par une écharpe d’apparat rouge portait son sabre, insigne honorifique de sa prestigieuse fonction. Tout le monde savait qu’il ne s’en servait jamais. Il préférait nettement plus une arme qu’il gardait précieusement et qu’il ne dévoilait qu’aux moments les plus critiques. Enfin, un grand chapeau à large bord, dont les plumes aux couleurs si attendues voyaient leurs pointes dissimulaient derrière la croix du Stirland, pièce d’orfèvrerie majeure, où l’or se rejoignait en une superbe émeraude.


Le siège de Leicheberg 15.105
Le commandant suprême des forces du Stirland, Anton Ludenhof

Du coin de l’œil, Anton Ludenhof savait qu’il ne pouvait s’attarder plus longtemps sur cet exercice, pourtant si indispensable. Un essaim d’aides de camps et d’estafette l’entourait, tous attendant leurs ordres. Dans un léger soupir, il leva doucement l’index et le majeur de la main droite, signe tant espéré de la part de cette nuée impatiente. Comme tout le monde n’ignorait pas que le prince punissait sévèrement le désordre, c’était presque d’instinct que le groupe désignait de lui-même celui dont le tour avait sonné. Il fallait faire vite. Si le geste du général venait à être répété, le court entretien qui serait accordé ne s’annonçait guère engageant.

L’un d’eux fit un pas. Puis s’approcha du général, tremblant de tout son corps au point d’en tenir à peine son parchemin.

-Votre Excellence…
-Je vous écoute, monsieur Bauerreis, accueillit Anton d’une voix qui laissait entendre qu’il était disposé à prendre un peu de son temps avec l’aide de camp.
-Je viens de la part du capitaine Rodörfy, il vous informe que la fortification du second couloir de la troisième aile souterraine de la cité ne pourra pas être effectuée dans l’heure comme initialement prévue, enchaîna le pauvre homme, apeuré.
-Que me dîtes-vous là ?
-Un éboulement a fait chuter les premiers renforcements, monsieur le commandant suprême.
-Un éboulement ?! s’exclama le prince, saisissant violemment le parchemin de l’estafette et parcourant des yeux les quelques lignes qui constituaient le maigre rapport du capitaine. Vous avez l’ampleur des dommages ?
-Le capitaine a assuré qu’il ne s’agissait là de rien de très préoccupant. Il a tout de suite ordonné à ce que l’on emmène des poutres afin de soutenir les endroits… instables. A part un retard certain, il ne devrait pas y avoir d’autres incidents, Excellence.
-Retournez là-bas, faîtes savoir à Rodörfy qu’il me tienne impérativement au courant de l’avancée des travaux, et inspectez moi chaque niveau des souterrains. Je veux que soyez en mesure de m’assurer qu’il n’y ait pas eu d’autres éboulements. Vous avez vos ordres, Bauerreis, termina Anton en rendant le document au soldat.
-Ce serait fait, Excellence !
-Bauerreis… ?
-Oui… ?
-Vous avez une demi-heure. Bougez-vous le fion, voulez-vous ?

Ecarquillant les yeux de terreur, l’estafette fit un bond avant de se précipiter vers la sortie, dégageant tous ceux qui se trouvaient sur son passage. Avec un léger sourire, Anton fit de nouveau le signe qu’attendaient ceux qui venaient d’être bousculés dans leur insoutenable impatience.

Le prochain, cette fois, accouru, éjecté de l’essaim.
-Monsieur Terpitz. Quelles nouvelles du capitaine von Rinauer ?
-Excellence ! Le capitaine vous signale des mouvements de contestation parmi les civils !
-Une contestation ?
-Rien de grave, monsieur le commandant suprême, juste quelques cas de désobéissance, mais le capitaine souhaitait vous avertir que pour faire taire tout début de mutinerie, il avait choisi de séparer et de répartir différents groupes de miliciens. Il les a envoyé au service des officiers Meltburg, Kraemer, von Kläm et Rodörfy.
-Et pourquoi êtes-vous là s’il a déjà bien la bonne décision ?
-C’est que… notre régiment, originaire de Malburg, a toujours voulu notifier le moindre de ses agissements au commandement, répondit, quelque peu embarrassé ledit Terpitz.
-Cher ami, faîtes moi le plaisir de déguerpir. Vous ne reviendrez que pour me signaler autre chose que le début d’un rien du tout !

Là, Anton avait levé la voix. L’estafette eut prit tout juste le temps de s’incliner avant de repartir. Les autres se regardèrent un moment, et à peine eussent-ils désigné celui qui devait s’avancer qu’une porte s’ouvrit avec fracas.

Un superbe officier entra. Malgré son jeune âge, il ne manquait pas d’allure. Son uniforme respectait les couleurs de sa province, mais quelque chose trahissait son passé. Son fourreau adoptait la forme d’un cimeterre, un de ces magnifiques sabres orientaux. Pour le reste, il avait tout du petit bourgeois fraîchement promu, mais qui ne n’hésitait pas à revendiquer son grade. Celui de Main du prince.

-Messieurs, laissez nous, trancha-t-il aussi sec.

Le commandant suprême n’eut pas levé un sourcil que les aides de camp se retirèrent, non sans tenter vainement de faire valoir une dernière fois leur audience auprès de Ludenhof. Quelques instants plus tard, seuls quelques gardes et les deux officiers étaient encore dans la pièce.

-Pardonnez moi, commandant, mais j’ai pensé que l’objet de notre entrevue devait rester aussi confidentielle que possible, continua le jeune homme, s’avançant protocolairement vers son supérieur.
-C’est une dépêche confidentielle que vous tenez là ?
-Précisément.
-Et vous vous êtes permis de la lire ?
-Ah… euh, c’est que… eh bien votre Excellence, c’est que j’ai pensé que… ne sut vraiment que dire Meltburg, embarrassé par la situation.
-Vous n’êtes pas mon second pour rien. Vous pourriez éviter d’en être gêné. D’ailleurs, vous me faîtes gagner du temps, ce dont je manque le plus. Alors, que m’annoncez-vous ? Les rapports des éclaireurs ?
-Oui… Oui, votre Excellence. L’éclaireur Markus Lied est revenu.
-Lied… douzième cavalier de la sixième patrouille ? voulut s’assurer Ludenhof.
-Celui-là même.
-Ce n’est pas le plus sérieux d’entre tous. Enfin, qu’est-ce qu’elle raconte votre dépêche ?

Meltburg marqua une pause, lâchant même un soupir. Enfin, il releva les yeux et annonça à son supérieur la raison de sa venue.

-L’ennemi approche, mon commandant. Ils ont passé Neuheim.
-Neuheim… vous me dîtes, commença à réfléchir Anton, ses yeux trahissant les calculs de temps et de distance qui l’agitaient. Ils seront là dans dix heures, onze tout au plus.
-C’est ce qui est à craindre, effectivement.
-Approchez Swen, approchez, fit le prince, lui faisant signe de venir à ses côtés. Regardez les, et maintenant, poursuivez.

Le capitaine n’ignorait pas que lorsque le commandant suprême l’appelait par son prénom, c’est qu’il avait besoin de son avis. Il aurait pu croire que son analyse lui serait utile, mais la réalité était tout autre : Ludenhof cherchait simplement la sincérité de son second afin de mieux l’évaluer. D’ailleurs, il savait très bien comment s’y prendre. Meltburg était terriblement exposé, là, face à ses deux mentors : la troupe et le prince.

Anton n’avait pas peur. Ou du moins, il ne le montrait pas. En tant qu’élève, il fallait que Swen use du même art.

-Monsieur le commandant, Lied affirme avoir vu la population locale être tombée sous les forces de la Sylvanie. Ils n’ont pas fait de prisonniers. Les pauvres êtres suivent maintenant les rangs de l’ennemi, reprit Meltburg, avalant difficilement.
-Il a parlé de l’état de ces cadavres ? demanda brusquement Ludenhof.
-Non, le sergent Pförmann ne m’a rien dit de particulier à ce propos. Mais Lied était terrifié, désorienté, sonné même lorsqu’il a rendu son rapport. D’après mes lieutenants, il ne cessait de demander si on avait retrouvé un de ses camarades.
-Lequel ?
-Un certain Fritz. Je n’ai pas le nom de tous mes soldats en tête.
-Et vous pensez que son jugement a été altéré par son état ?
-Je pense plutôt qu’il faut peut-être s’attendre à de nouvelles indications, lorsqu’il aura repris des forces, précisa Swen, fixant les contrebas du donjon.
-On a une confirmation du nombre ?
-C’est imprécis. Mais on doit s’attendre à près de quinze mille lances.
-Et ce n’est qu’un minimum. L’ennemi va se renforcer… autre chose ? Il a vu quoi exactement votre éclaireur ? Des engins de siège ? Quelques bonnes bestioles dont la Sylvanie a le secret ?
-Rien de tout cela, pour l’instant. Je vais y retourner et l’interroger personnellement. Je vous laisse son rapport ? Le peu qu’il y a d’écrit peut être utile. Du moins, on sait maintenant le temps qu’il nous reste, conclut Meltburg, redressant le buste.
-Faîtes ça, oui. Et vous, comment vous sentez vous ? questionna Ludenhof, adoptant ce regard d’émeraude si perçant qui déstabilisait tous ceux qui le croisait.
-Je suis à mon poste, monsieur. Vous savez que je vous suis tout acquis, je vous dois tout, répondit sur le même ton le jeune disciple.
-Si vous avez peur, je le saurais, Swen. Je le saurais. Allez à la rencontre de ce Lied, et tirez de lui ce que vous pourrez. Vous m’enverrez au plus vite monsieur Schoeher. Pour le reste, faîtes connaître aux autres officiers que je veux les voir à ma table ce soir.
-Selon vos instructions, Excellence, termina le capitaine en s’inclinant et se retirant tout doucement.

Avant que la porte ne s’ouvre, Swen entendit une dernière phrase de son supérieur.

-Vous masquez mal votre peur. Faîtes mieux que ça, voulez vous…




'ton !


Dernière édition par Anton Ludenhof le Mer 15 Mai 2013 - 18:03, édité 1 fois

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Ven 14 Oct 2011 - 9:45
Énorme, tout simplement!
Le Commandant à une prestance et un charisme magnifiquement rendus et cette succession de messages est un vrai petit bijou.
Juste quelque petites fautes par-ci, par-là; mais la qualité du texte me laisse pantois.

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Sam 22 Oct 2011 - 18:38
Ouaaaa elle est trop bien cette histoire Clap

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Sam 22 Oct 2011 - 18:43
Cool! Un lecteur de plus dans la section récit!
Je crois qu'on va bien s'entendre messire VonBlood Le siège de Leicheberg Happy_gi

Sinon, super texte d'introduction du commandant. Le siège de Leicheberg Clap_gif

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Sam 22 Oct 2011 - 18:50
J'ai BIP toutes les BIP VonCarstein (livre GW). Et crois moi les BIP de BIP me BIP tongue

Ps: Je suis en train d'écrire une petite histoire courte ^^

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Sam 22 Oct 2011 - 18:53
Oh! Un lecteur-écrivain! C'est vraiment dommage, tu es arrivé juste après le concours annuel de récits...


Dernière édition par Arken le Sam 22 Oct 2011 - 18:59, édité 1 fois

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Sam 22 Oct 2011 - 18:56
BIP bien disons que je n'ai jamais eu d'avis sur mes BIP...Donc j’espère que tu BIP connecté pour le voir et me donner ton précieux avis Mr. Green

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Sam 22 Oct 2011 - 19:01
Avec plaisir, comme tous les autres (surtout Thomov qui est très patriotique envers cette belle section Le siège de Leicheberg Happy_gi)

Par contre, si tu pouvais relire ta signature... Les fautes d'orthographe gâchent tout... Le siège de Leicheberg Blushing

Ah, justement : Récits

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