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La Saga d'Oksilden : Neige Anthracite [Ancienne version] - Page 2 Empty Re: La Saga d'Oksilden : Neige Anthracite [Ancienne version]

Jeu 11 Juil 2019 - 15:44
Le norse reprend du service !

Comme d'hab, pas grand chose à dire. Notre barbare se reconstruit, sa quête se précise, on continue d'en apprendre davantage sur son passé et son village. Plus Malal nous fait des elferies. Nan vraiment, que dire d'autre si ce n'est demander la suite Cool
Hjalmar Oksilden

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La Saga d'Oksilden : Neige Anthracite [Ancienne version] - Page 2 Empty Re: La Saga d'Oksilden : Neige Anthracite [Ancienne version]

Jeu 3 Oct 2019 - 23:32
Je ne vais pas mentir... Ce fut un chapitre difficile à écrire et il est encore sujet à changement. Mais au point où j'en suis, autant le sortir pour enfin figer des choses, sinon le tout n'avancera pas.

Voici donc, la suite !

******


     Quand Hjalmar ouvrit la porte d’entrée de la maison longue, il avait revêtu quelques vêtements chauds en plus, comme une paire de gants doublés de laine et un manteau qui couvrait ses épaules et son torse, le tout prêté par son frère. Cela le faisait presque ressembler à un norse banal, mais il n’en tint pas compte car cela allait changer bien assez tôt. Avec un léger frisson face à la brise glaciale qui lui gifla le visage en sortant, il mit le cap vers la forge de son frère.

     L’aube de cette fin de matinée était toujours belle et bien présente. La mer houleuse s’était teintée d’orange au même titre que la neige, donnant une fausse impression de chaleur ambiante. La vision était belle, mais c’était une beauté éphémère. Encore deux ou trois heures et la nuit reprendrait ses droits. Puis, d’ici quelques jours, elle règnerait sans partage avec les deux lunes durant les prochains mois. Telle était la loi de l’Hiver.

     En attendant, le norse se contenta d’apprécier le paysage sur son chemin. Ce dernier fut court puisque la forge du village était adjacente à la maison longue qu’Harald, Svaný et Varki habitaient, mais Hjalmar remarqua quand même l’agitation qui animait le village côtier. Divers habitants se pressaient vers la porte principale, ne serait-ce que pour un instant, afin de voir comment le tout avançait. Allaient-ils partir maintenant ? Dans une heure ? Deux ? Au coucher du soleil ? Attendait-on le retour de Gundmundr, grand absent des derniers jours ? Les gardes qui tenaient la porte tentaient de répondre comme ils pouvaient avec le peu qu’ils savaient. Tantôt poliment, tantôt par le biais de baffes pour calmer les plus excités. Il y en avait toujours un ou deux qui prenaient trop à cœur chaque évènement sortant de l’ordinaire.

     Quand Hjalmar fut aperçu sur le chemin de la forge, ou plutôt reconnu malgré son nouvel attirail, quelques têtes se tournèrent vers lui, puis d’autres encore alors que le brouhaha se taisait progressivement. Rapidement, ce fut la majorité de l’attroupement qui s’était mis à le dévisager d’un air austère, mais qui ne révélait rien de leurs intentions. Il n’y avait aucune animosité derrière ce geste, seulement une contemplation froide et passive. Rien de bien nouveau pour Hjalmar en somme qui avait subi ce « traitement de faveur » depuis le banquet. Ainsi, face à cela, l’intéressé leva un sourcil, puis ses épaules et continua sur sa route, faisant craquer et crisser la neige sous ses chausses montantes de cuir.

     Quelques pas plus loin et il atteignit la forge. Cette dernière était toujours allumée, cela se voyait comme cela se sentait. Elle n’était pas aussi imposante que certaines qu’il avait aperçu à Marienburg ou Couronne, mais elle était fonctionnelle. Le râtelier considérablement fourni d’armes et boucliers était d’ailleurs le seul meuble qui prenait de la place. On n’y retrouvait pas de fioritures ou autres établis débordant d’outils, seulement le nécessaire. Après tout, le surnom « pragmatique » d’Harald n’était pas tombé du ciel comme par enchantement, il l’avait forgé lui aussi.

     Assis dans la neige et dos à un mur de la forge, Varki observait sa hache intensément. La crête rousse du nain avait encore un peu de neige coincée dedans, reste d’une chasse récente surement. Il avait deux bracelets simples mais épais en métal sur ses poignets. Cela devait être la seule armure qu’il s’autorisait en tant que tueur nain. Quand il vit Hjalmar arriver, il leva son regard un instant, fit signe au nordique que son frère l’attendait et s’en retourna à la contemplation du fil de son arme. Comprenant qu’il n’arriverait pas à le faire sortir de son mutisme maussade, Hjalmar ne s’arrêta pas dans sa lancée et entra dans l’enceinte de la forge. Chacun avait sa propre façon de se préparer, la moindre des choses était de la respecter.

     « Eh ! » s’exclama Harald depuis une sorte d’entrepôt derrière le fourneau, indiquant de ce fait sa position et sa présence. Hjalmar ne pouvait qu’apercevoir vaguement la forme de son frère depuis là où il était, mais il préféra rester sur place. Les effluves de cendres et autres odeurs de métal brulé avaient beau être omniprésents, la chaleur intense du fourneau était trop agréable pour qu’il n’en profite pas pendant un instant.

     Après quelques secondes, la forme d’Harald apparut pleinement, encore vêtu de son tablier de cuir parcouru de traces de brûlures et portant quelque chose d’indistinct sous son bras gauche. Hjalmar, pendant ce temps, passait sa main sur le bord d’un bouclier de planches rond avec un umbo au centre, typique de la Norsca.

     « Te voilà enfin, j’ai failli attendre, ricana le forgeron en s’enlevant un reste de suie mouillée par la sueur de sa main droite. Ah ? Nouvelle coupe ?
     — J’avais besoin de… me préparer à la suite.
     — Hmrpf, j’imagine ! »

     Harald toussa sèchement un instant puis s’approcha d’un établi et posa rapidement ce qu’il portait dessus.

     « Les gars du coin n’ont pas arrêté de passer par ici pour me questionner – ou m’déconcentrer – sur la suite des évènements. Avec toutes ces conneries, j’ai failli m’esquinter l’annulaire en terminant la cotte de maille.
     — A ce propos, tout est prêt ? »

     Un sourire s’ouvrit parmi la broussaille blonde qui formait la barbe de son frère et ce dernier pointa fièrement du doigt l’établi avant de s’en approcher.

     « J’ai peut-être été trop pointilleux sur les détails, mais oui. » – En disant cela, Harald était en train de mettre à plat ce qui se révéla être des vêtements et des pièces métalliques. – « Tout est là. A toi de l’essayer maintenant. Je vais chercher quelques outils pour les retouches. »

     Et sur ce, le nordique s’en alla en toussotant gaiement. Hjalmar se souvint qu’il n’y avait que quand il manipulait l’acier que son frère était aux anges. Un véritable passionné, gloussa alors mentalement le baroudeur en voyant le forgeron farfouiller dans son coin. Et maintenant qu’il posait les yeux sur la version complète de sa commande – Harald voulant lui faire la surprise du rendu final – cette idée était plus que confirmée.

     Hjalmar se débarrassa alors des vêtements superflus, comme sa cape et ses gants pour ne garder que la chemise de laine et son pantalon tenu en place par une cordelette. Il ne lui restait plus qu’à s’équiper. Après avoir passé un moment à s’assurer que les bandes molletières de laine brune qui enserraient ses jambes jusqu’aux pieds tenaient toujours et que la paire de chaussettes, en laine épaisse aussi, n’avait pas bougé, le norse rééquipa ses chaussures de cuir.

     Jusqu’ici, tout ce qu’il portait avait été aux dimensions de son frère et flottait quelque peu sur le norse qui était plus fin. Il avait juste fallu ajuster un peu la longueur à cause de sa plus grande taille, mais rien de bien insurmontable. Et puis, ce n’était pas forcément un mal puisque cela laissait respirer les vêtements et la ceinture resserrerait le tout à la fin de toute manière. Mais là, cette cotte réhaussée d’une ligne de bronze au niveau du col et des manches qui reposait sur l’établi, elle, c’était autre chose. En la prenant à pleines mains pour s’en équiper, Hjalmar eu instantanément un sourire en coin en remerciant déjà son frère à demi-mot. C’était autrement plus léger que les idioties de fanfare qu’il avait portées jusqu’ici. Toute cette armure hétéroclite de plaques, cuir, bronze et mailles qui ressemblait à tout et à rien, faite de bric et de brocs au fur et à mesure de ses voyages, pesait un âne mort. Et même s’il s’y était attaché, il était bien heureux de s’en être débarrassé pour utiliser quelque chose de pratique pour changer.

     Sans plus attendre, Hjalmar enfila la cotte de mailles à manches longues pour s’assurer qu’elle lui allait. Il ne fallut pas bien longtemps, juste assez pour attacher sa ceinture de cuir autour de sa taille, pour se rendre compte que oui. Elle était presque aussi longue que sa tunique de laine et lui arrivait donc jusqu’à la moitié de la cuisse. Le poids était conséquent mais réparti dans ses hanches et ne le gênait en rien. C’était bruyant certes, mais au vu de ce qu’il affrontait, la discrétion n’était plus de mise. En fait, si le nordique s’était arrêté là, il aurait toujours pu se fondre dans la masse avec ses congénères du Nord. Cependant, Hjalmar avait eu le temps de réfléchir à son affaire. Plusieurs semaines de réflexion même auxquelles les conseils d’Harald s’étaient ajoutés pour voir ce qui était faisable en fonction de ses réserves. Ainsi, le nordique récupéra ce qui restait sur l’établi : une paire de gantelets qui iraient par-dessus ses gants en cuir de phoque, des brassards d’avant-bras ainsi que des solerets et des grèves. Le tout avait été pensé pour que la cotte de maille puisse être maintenue par les brassards afin d’éviter qu’elle ne remonte intempestivement. Et la plupart de ces pièces étaient adaptables grâce à diverses lanières de cuir pour être facilement montable en fonction de la tenue qu’il portait. Leur apparence était plutôt crue – on était loin de l’armure d’un général impérial – mais c’était solide et facilement remplaçable.

     Ce qu’il fallait retenir avant tout, c’était que Hjalmar ne voulait pas d’une réédition de son armure précédente. Il voulait des outils pour tuer des démons. Le reste, il savait gérer de toute manière. On pourrait se dire que l’objectif était tristement spécifique, voire borné, mais après ce qu’il avait vécu récemment, disons que ses priorités avaient été revues. Et les dernières paroles de Malal avaient confirmé ses craintes.

     On parlait donc de saloperies semi-intangibles garnies de crocs et griffes, avec des armes qui se riaient de la plus épaisse des plaques d’acier et parfois bien plus rapide que lui parce qu’eux n’avaient pas d’armures justement. La réponse avait donc été simple, s’équiper du strict minimum afin de rester mobile tout en gardant assez de protection pour parer au plus simple. La cotte de mailles, par exemple, était là uniquement pour limiter l’impact du tranchant d’une lame, voire même coincer une griffe au passage. Les gantelets et solerets, eux, avaient en partie pour but de protéger autant que faire se peut les membres importants de sa personne : sa mobilité et sa capacité à tenir une arme. Mais ils étaient avant tout là pour lui permettre de flanquer un pain à un démon sans trop se bousiller la main ou le pied. Certes, si un démon lui envoyait une épée enchantée sur son brassard, la pièce d’acier n’allait rien arrêter. Mais en gérant proprement son coup, il était possible de dévier un assaut ennemi avec, le tout lui évitant par la même occasion de se brûler la peau, ou autres joyeusetés propres aux engeances chaotiques.

     Quant à sa tête ? Découverte. Cela donnait une cible évidente à ses ennemis et un casque ou équivalent l’empêchait de voir proprement.

     Alors qu’il effectuait divers mouvements pour essayer la tenue, Harald revint avec un petit coffre ouvert.

     « Eh bien ça ne rend pas si mal à ce que je vois. Hmm…Il faut quand même que je resserre un peu le soleret droit.
     — Tu es sûr ?
     — Hjalmar, lâcha son frère sur le ton d’un professeur en pleine explication. J’ai reçu des leçons de forge naines. D’accord, elles étaient courtes et cryptiques. Mais s’il y a un truc que j’ai retenu d’eux, c’est que la forge est un art précis et pointilleux et qu’il ne faut rien laisser au hasard. »

     Aussitôt, Harald se baissa, et attrapa sèchement le pied de son frère. Après avoir farfouillé quelque secondes dans son coffret avec force grommellements, il récupéra un petit marteau et un poinçon avant de se mettre au travail.

     En y jetant un coup d’œil, la diversité d’outils de tous horizons dans ledit coffret laissa Hjalmar quelque peu curieux. En fait, l’organisation de la forge, la manière de travailler presque dans le secret complet, tout cela sortait de l’ordinaire pour le baroudeur.

     « Dis-moi… tenta alors Hjalmar.
     — Hmm ? répondit vaguement son frère alors qu’il s’échinait à redresser une lamelle d’acier.
     — D’où est-ce que tu sors toutes ces nouvelles techniques ? J’veux dire, tu étais proche des nains bien avant mon départ, mais des leçons ? Et puis… »

     Un regard rapide vers l’endroit où était Varki lui indiqua que le tueur avait décidé de partir faire un petit tour autour du village en attendant.

     « Et puis, maintenant ton meilleur ami est un tueur nain ? C’est un autre degré d’investissement ça. »

     Harald eu un soupir, arrêta son travail et leva son regard pour retrouver celui de son petit frère.
     
     « Écoute, je suis heureux que tu sois revenu parmi nous, mais pendant longtemps je t’en ai voulu. Réellement. Par ta faute, le nom d’Objarsson a été teinté de honte. J’ai souhaité rattraper cela et ça impliquait d’améliorer mes techniques de forge. Alors, j’ai sauté le pas et j’ai fait tout mon possible, et j’entends bien tout, pour apprendre des nains au nord-est. J’ai même réussi à comprendre des morceaux de leur langue en les écoutant. Et eux, au moins, ne me jugeaient pas à cause des actes de mon frère puisqu’ils n’en avaient aucune fichtre idée. Je les ai aidés et ils m’ont aidé en retour. »

     Semblant se souvenir qu’il avait un travail à terminer, Harald repris là où il s’était arrêté, mais continua son histoire malgré tout.

     « Par moment, je suis sorti du village, avec des groupes de marchands, afin de trouver des trucs, des outils, un peu de savoir. » – Un instant, Harald releva les yeux – « J’avais peut-être aussi l’espoir de te retrouver au détour d’une ruelle. Mais bon… Puis, j’ai rencontré Varki à Gotland, à l’Est, chez les Sarls. Il parlait à peine autre chose que le Khazalid, avait besoin d’un pied-à-terre et semblait complètement perdu. Pour ce que j’en avais compris, il était un ancien forgeron ou pratiquant des arts runiques – pas bien sûr de ça. Mais ce qui était sûr c’est qu’il était récemment devenu tueur. Forcément, sa seule idée était de crever dans le Pays des Trolls. Mais j’ai réussi à le convaincre de venir avec moi après une expédition foireuse de crétins du sud. »

     Une fois satisfait de l’apparence du soleret, Harald libéra enfin la jambe de son frère et se releva.

     « Voilà pour moi. Et ton soleret devrait être bon maintenant. On passe au plat principal ?
     — Avec plaisir ! » lui répondit un Hjalmar tout sourire.

     Alors que son frère partait en toussotant dans sa réserve chercher le clou du spectacle, le baroudeur hésita à le complimenter pour sa vie bien remplie, ses aventures… Mais venant de lui, cela semblerait déplacé. Connaissant Harald, il avait dû détester l’idée de quitter le village. Dans un gloussement, Hjalmar se dit que son frère serait probablement capable de lui coller une autre baffe s’il faisait l’erreur de lui rappeler.

     En tout cas, il ne put tester cette hypothèse puisque Harald arrivait déjà avec l’arme qu’il lui avait commandé.

     « Et une hache d’arme pour monsieur », s’exclama Harald d’un ton grandiloquent en présentant l’arme. Il avait même ajouté une touche d’accent bretonnien pour la bonne mesure.

     Pour faire simple, une hache d’arme était une hallebarde, mais d’environ deux mètres et avec une tête de marteau à l’opposé du fer de hache au lieu d’un crochet et une « dague » (la pointe) plus courte. Plus simple et versatile d’utilisation, elle permettait de s’adapter facilement à tous types d’adversaires alors que la hallebarde était plus proche d’une lance améliorée. Le choix était donc logique aux yeux du norse.

     Là encore, l’arme avait été voulue simple et solide. La seule petite fantaisie que le forgeron s’était permis était un petit symbole gravé au centre du fer de hache, un entrelacs un peu grossier formant un loup mythologique. C’était la signature de son créateur en un sens, puisqu’Harald avait toujours été proche d’Olric.

     « J’ai fait ce que j’ai pu avec les fers de hache que j’avais à disposition, mais l’acier devrait être d’une qualité acceptable. Les languettes de métal sur le quart supérieur et le milieu de la hampe devraient protéger les bords et le bois est en wutroth.
     — Wu... Quoi ? parvint enfin à dire Hjalmar en sortant de sa contemplation de l’arme. Pourquoi pas en frêne ?
     — C’est le bois que les nains cultivent dans les montagnes. C’est une espèce plus lourde, mais aussi dure qu’un roc. La variante qu’ils ont ici en Norsca est soi-disant de moins bonne qualité que celle des Montagnes des Bords du Monde d’après les intéressés, mais je n’ai encore rien trouvé d’aussi solide. »

     Hjalmar prit enfin l’arme entre ses mains, testant son équilibre avec quelques mouvements rapides. Cela faisait plusieurs mois qu’il n’avait pas eu d’arme d’hast entre les mains, mais les réflexes revenaient vite. L’arme étant plus courte, l’inertie était bien différente de son ancienne hallebarde, mais cela devrait le faire. Et Harald ne rigolait pas avec son bois nain, ce truc était bien lourd… Mais ça ajouterait un peu de puissance aux chocs. En plus, il était relativement agréable en main.

     « Décidément, quand tu dis que tu apprécies les nains, ce n’est pas une blague.
— Eh, tu ne crois pas si bien dire. La pointe est en gromril. »

     Hjalmar eu besoin de bien quelques secondes pour se remettre de la nouvelle. Le métal des nains ? Mais ils n’en donnaient à absolument personne et il était impossible à fondre en dehors de leurs forteresses ! Il lança un regard ahuri à son frère qui avait pourtant l’air sérieux avant de ramener rapidement ladite pointe devant ses yeux. A première vue, cette dernière avait l’air d’être faite d’un acier tout ce qu’il y avait de plus normal. Mais en y regardant mieux, on pouvait remarquer un changement à sa base, une sorte de contraste entre la pointe et le métal environnant.

     « C’était un cadeau du maître forgeron Dungarr Bogarsson à Kraka Drak. Je leur avais ramené un vieux heaume datant d’un des ancêtres du roi, longue histoire mais gros coup de chance. Et il a trouvé que me donner un poinçon en gromril en tant qu’outil était une bonne idée pour me remercier. Il m’aura été très utile, mais tu en as plus besoin que moi. J’ai juste eu à souder le reste de l’acier autour à grand coup de marteau… Tiens, d’ailleurs ! »

     Harald tourna les talons un instant, récupéra un petit marteau près de la forge et revint.

     « C’est celui que j’avais utilisé pour adapter le métal autour de la pointe. Tu vois l’impact ici ? » – Le forgeron dit cela en pointant une crevasse longiligne sur la tête du marteau. – « J’ai frappé à côté en plein sur la pointe. Cette dernière n’a absolument rien, lui, en revanche, je suis obligé de le fondre. Donc crois-moi, avec ça, t’as de quoi embrocher n’importe quoi. »

     Hjalmar regarda à nouveau l’arme, la pointe devait être de la longueur de sa main et aussi épaisse que son pouce à la base. S’il revendait cette hache d’arme, il serait probablement riche jusqu’à la fin de ses jours. Par ses ancêtres, il avait aperçu quelques étapes durant la création de l’arme, mais Harald s’était bien gardé de lui annoncer ça !

     « Je… Je ne sais pas quoi dire. Merci encore, je t’en dois une, dit Hjalmar en prenant son frère par l’épaule. Vraiment.
     — Ha ha ! Soit sûr que je m’en souviendrais. »

     Puis, les deux frères restèrent ainsi là, à se regarder mutuellement en silence. L’un comme l’autre ne sachant pas quoi dire à la veille de ce départ. Mais on se disait parfois plus en ne parlant pas. Il suffisait d’un rien pour apercevoir des excuses, la compréhension ou même un encouragement sur le visage de son interlocuteur. Enfin, Harald leva lentement sa main et mima le coup de poing qu’il avait asséné quelques jours plus tôt à son petit frère, lui frôlant le menton de ce mouvement avec un léger sourire moqueur.

     « Écoute, j’sais que la famille, le clan, ce n’est pas ton truc… Mais essaie de revenir plus tôt cette fois, hein ? »

     Un gloussement léger fut la réponse de Hjalmar.

     « Je te promets qu’une fois tout ça loin derrière, je repasserais te saluer.
     — Et j’espère bien ! »

     Hjalmar voyait bien que son frère aurait voulu l’accompagner dans sa quête. Mais il approchait la cinquantaine, les escapades houleuses n’étaient plus vraiment au programme. Et cela le rongeait assez clairement d’avoir à accepter ce fait.

     Quand les deux norses s’écartèrent enfin, Hjalmar fit semblant de ne pas voir que les yeux de son frère s’étaient embués. Il aurait sûrement prétexté un problème comme une cendre dans l’œil ou un autre mensonge du genre de toute manière. Or, quand le baroudeur voulut partir rejoindre l’attroupement qui s’était formé à la porte du village, la patte d’ours qui servait de main à Harald lui attrapa le bras.

     « Eh, avant que tu ne partes. Y’a quelque chose dont je ne t’ai pas parlé.
     — Hmm ?
     — Il s’agit du paternel.
     — Ah. »

     L’expression d’Harald passa du remords à la circonspection.

     « Ça n’a pas l’air de te surprendre ?
     — Ces derniers jours, t’as bien voulu me parler de ta vie ici, de mère et même de la pêche locale sans problème, mais père, rien. »

     Et Malal n’avait pas arrêté de l’appeler Objarsson depuis quelques semaines. C’était le genre de détail qui faisait tiquer.

     « Il…commença Harald. Il est toujours en vie. Enfin, on espère. On n’a presque pas de nouvelles de lui depuis des mois et j’espérais vraiment qu’on n’en parlerait pas au vu du passif entre vous deux. Mais…
     — Il reste notre père, compléta Hjalmar.
     — Voilà, même si en choisissant de ne pas suivre sa propre famille et son clan, il a choisi de ne plus l’être.
     — Parce que j’suis mieux avec mon bannissement ? rétorqua Hjalmar.
     — Tel père, tel fils diraient certains, soupira Harald. Objarr… Notre père, est toujours à Stavgard. Après l’attaque par les Graelings au dernier hiver, il a catégoriquement refusé de partir. Il a invoqué les noms de plusieurs divinités en nous affirmant qu’il voulait protéger les terres où il était né, où sa femme était morte, tu vois l’idée. Il est vieux et il avait presque tout perdu, surtout ses repères probablement. Les évènements ont dû lui faire perdre pied.
     — Vous êtes passé le voir depuis ?
     — Je n’en ai pas la force. Pour moi, son choix est incompréhensible et… je ne lui ai toujours pas pardonné. C’est Svaný qui s’était occupé d’aller le voir avant le début de cet hiver.
     — Et on passera le voir sur le chemin », intervint une troisième voix féminine.

     Les deux frères se tournèrent pour apercevoir Svaný qui ajustait ses gants juste à côté de la forge. Une lance reposait dans le creux de son épaule ainsi qu’un arc et un grand bouclier rond était dans son dos, maintenus par une lanière de cuir. Ses cheveux avaient été arrangé pour faciliter ses mouvements et elle portait la tenue typique d’un norse paré pour la guerre, tunique verte de laine épaisse, pantalon, scramasaxe à la ceinture… Et son regard indiquait clairement qu’elle attendait depuis un bon moment la venue de ses grands frères, ce qui l’excédait quelque peu.

     La jeune dame détailla alors Hjalmar de bas en haut, étudiant ses vêtements.

     « Bel équipement, mais j’attends de voir ce que t’en feras. Allez !»

     Et elle tourna les talons un instant avant de se rendre compte que personne ne la suivait. En regardant par-dessus son épaule, elle s’aperçut que ses deux frères lui lançaient leur plus belle expression de hareng frit.

     « On n’a pas toute la journée, vous savez ! Ils t’attendent à la porte. Gundmundr est revenu, le thing avait statué sur le crépuscule et il est l’heure. Donc on bouge, Oksilden ! »

     Sur cette pique, la jeune dame reprit son chemin avec une démarche assurée et une prise sur ses armes qui indiquait qu’elle n’en était pas à sa première danse.

     « Oh jaklä, j’avais peur que ça arrive… grogna enfin Harald. Écoute, prends ta cape et capuche, on se rejoint à la porte. Je vais essayer de la raisonner.
     — De quoi ?
     — De ne pas partir avec toi, abruti !
     — Ah, oui, lâcha vaguement un Hjalmar abasourdi. Si tu le dis… Mais, attends, ça lui arrive souvent de partir comme ça ?
     — A mon goût ? Trop souvent. A son goût, pas assez.
     — Oh. »

     Hjalmar se souvint alors de deux choses. D’une, il avait bien vu à la carrure de sa sœur, l’état de ses mains et son caractère qu’elle devait pratiquer la chasse ou une autre activité sportive de manière régulière. De deux, c’était la troisième fois que sa sœur lui parlait directement depuis leur rencontre, donc il était bien loin de la connaître et devait s’attendre à d’autres surprises du genre. Cela promettait d’être folklorique.

     Puis, en voyant le forgeron courir comme un dératé en enlevant son tablier pour rattraper la jeune dame qui avançait imperturbablement, Hjalmar eut alors la seule réaction logique possible : il ria. Il avait un frère forgeron semi-nain qui vous trouvait du gromril et une sœur sanguine prête à prendre les armes de nulle part. Comment ne pas rire devant une famille pareille ? Les Objarsson étaient des fous et il avait de quoi en être fier.

     Ricanant toujours, le norse récupéra sa capuche et sa cape qu’il passa autour de ses épaules, laissant la fente de cette dernière au niveau de son bras droit et la ferma avec une fibule. Enfin, il posa sa hache d’arme sur l’épaule droite avant de partir rejoindre nonchalamment la troupe amassée devant la porte au loin. Son équipement était flambant neuf, il se sentait revivre avec une arme d’hast entre les mains et sa famille était tarée. En comparaison avec sa situation des jours précédents, oui, il y avait du mieux.

     Quand il arriva près de la porte cependant, son léger sourire disparu progressivement de ses lèvres alors qu’il se rappelait les enjeux derrière toute cette animation. La touche de bonne humeur lui avait fait du bien, beaucoup même, mais il était encore loin de son insouciance d’antan….

     Hjalmar passa alors sa main gauche sur son visage. Le cuir du gant – et même le bout métallique de son gantelet – frotta sur sa peau attaquée par le sel marin ambiant. Bon. Il était temps de positiver un minimum sinon ça n’en finirait jamais. Tiens, se concentrer sur la foule qui le regardait, là, tout autour, voilà une idée de truc à faire. Ce sera toujours plus utile que d’écouter les voix qu’il distinguait vaguement dans le fond de son crâne.

     Juste devant la porte s’était donc regroupée une bonne partie du village. Du moins, ceux qui n’avaient pas grand-chose à faire en hiver, donc des pêcheurs ou divers hommes sans véritables talents pour l’artisanat. Cela allait du jeune homme avec trois poils au menton au bourrin qui ne connaissait que la guerre, en passant par divers badauds qui s’ennuyaient. Enfin, à côté de la porte elle-même, étaient Gundmundr et sa garde personnelle, fraîchement revenue de Sverborg dans les temps. Ils avaient un peu de mal à imposer le calme aux habitants curieux, mais heureusement pour eux, l’arrivée de Hjalmar avait atténué les sons et, à présent, le tout murmurait, discutait, observait. De son côté, le goði lui lança un regard mauvais auquel il répondit de la même manière.

     Rapidement, il devint évident qu’une petite ligne d’une demi-douzaine de personnes sortait du lot des habitants. Au vu du contexte, il devait s’agir des volontaires pour accompagner Hjalmar dans sa quête. Sans surprise, Svaný en faisait partie, l’air toujours aussi déterminé qu’avant alors que Harald lui sifflait des reproches dans les oreilles avec force grognements. La présence de la jeune norse agitait apparemment la foule. Si la société norse laissait des libertés aux femmes, elle était patriarcale avant tout. Les autres devaient être… Deux chasseurs au vu des arcs, un type avec un chignon sur le côté du crâne – sûrement un chien de Gundmundr – un vieillard qui souhaitait goûter à nouveau à sa gloire passée et… Varki ? Le nain se tenait quelque peu en retrait, près de la porte, mais il était évident qu’il était là pour l’accompagner. En y réfléchissant cela faisait sens, c’était un tueur après tout et la quête du baroudeur était définitivement suicidaire par certains aspects. Hjalmar restait tout de même étonné que le nain ait décidé d’abandonner Harald aussi rapidement. Quoique, le forgeron devait s’être fait à l’idée que Varki pouvait ne pas revenir définitivement d’une de ses chasses intempestives.

     Une forme qui se révéla être celle de l’oracle – il ne l’avait même pas vu arriver avec toute cette foule – se plaça à côté de Hjalmar. D’un geste, elle calma les ardeurs de l’attroupement, car on se devait d’écouter un messager des dieux d’après les coutumes. Même en présence de Gundmundr, elle occupait officieusement un rôle de dirigeant en quelque sorte. Une position qui était réaffirmée par son lien de parenté avec ledit goði d’ailleurs. Réajustant sa capuche, elle clarifia sa gorge avant d’annoncer :

     « Notre goði étant revenu, la cérémonie de départ de Hjalmar ‘Oksilden’ Objarsson va pouvoir commencer. Puisse les dieux vous accorder leurs faveurs. Goði Gundmundr ? »

     Le goði attendit quelques instants pour utiliser le silence à son avantage. Puis, il s’avança d’un pas mesuré vers la ligne des volontaires :

     « Mon voyage pour Sverborg fut fructueux, mais ce n’est pas le point important en cette heure. »

     Hjalmar se fit la réflexion que cela signifiait qu’il y était allé juste pour l’éviter jusqu’à son départ, probablement pour empêcher une demande de holmgang intempestive. Prudent, mais lâche.

     « En ce jour débute ton périple, mais il te reste à choisir tes compagnons. Voici donc les braves qui ont décidés de te suivre dans ton voyage, à leurs risques et périls. »

     A peine avait-il terminée sa phrase que le grand gaillard avec son chignon s’avança. Rien qu’à sa démarche, Hjalmar sut qu’il allait poser un problème. Il avançait comme un chat, ses épaules roulant comme la houle. Sa main était posée nonchalamment sur le pommeau de l’épée qui pendait à sa ceinture et il avait un bouclier de bonne facture dans le dos. Cheveux blonds, barbe rasée, presque pas de cicatrices et vêtements de qualité, il annonçait bien. C’était un chasseur déterminé et sûr de lui, peut-être trop d’ailleurs. Au vu des regards envieux – surtout de la gente féminine – qu’on lui lançait, il devait même se prendre pour le héros local. Amusant qu’il ne se soit montré que maintenant, peut-être était-il revenu d’une chasse ? Bah, comme si c’était important.

     Après quelques pas sur le sol neigeux, le bonhomme se planta devant Hjalmar avec un sourire narquois.

     « Je… », commença-t-il mais il n’eut pas le temps de finir. Hjalmar en avait déjà entendu assez de la part de cet hurluberlu. Ainsi, il le coupa dans sa phrase par un crochet du poing gauche à la joue qui sembla surprendre le pauvre type aussi bien que l’assemblée toute entière. Le coup porta sensiblement, Hjalmar ayant toujours son gantelet, et fit tituber le type au chignon même s’il n’y était volontairement pas allé à fond.

     L’homme passa ensuite de la surprise à la rage en un peu moins d’une seconde et tenta de dégainer sa lame pour répondre à cette agression en bonne et due forme. Mais Hjalmar s’élança et bloqua cette option en posant fermement sa main sur le pommeau de ladite épée, la bloquant dans son fourreau. La manœuvre sembla décontenancer le norse qui en resta figé sur place, les yeux plongés dans ceux, presque amusés, de Hjalmar. Il tenta bien de s’écarter d’un mouvement sec, mais le baroudeur le suivit aussitôt, observant intensément ses traits.  

     Certes, la méthode de « bienvenue » de Hjalmar pouvait sembler complètement tordue. Mais s’il avait bien compris quelque chose à force de rencontrer des gens sur la route, c’était qu’une personne devenait véritablement elle-même dans la panique, quand on la surprenait. Flanquez un pain à bandit de grand chemin avant même qu’il n’ait pu lancer sa tirade, et il partait souvent la queue entre les jambes, trop effrayé à l’idée d’être tombé sur plus fort que lui. A l’inverse, une personne plus nerveuse pourrait subitement répliquer sans réfléchir aux conséquences. Le résultat était toujours aussi aléatoire que surprenant et formait donc une source constante d’amusement pour le nordique. Et puis, ça simplifiait parfois les demandes en duel.

     Pour en revenir à la situation présente, Hjalmar surpris tout le monde encore une fois en flanquant une petite claque amicale sur l’épaule de son adversaire.

     « C’est pas mal, mais j’ai vu mieux.
     — Huh ? Tu te moques de moi ?! aboya l’homme.
     — Nan, j’te salue. D’ailleurs, t’es qui et pourquoi devrais-je m’en soucier ? »

     En disant cela, Hjalmar s’était éloigné de l’homme et avait légèrement remis en place la hache d’arme qui n’avait pas quitté son épaule de tout l’incident. L’homme, lui, fulminait à en faire fondre la neige autour de lui.

     « Je suis Asgeir Hilmirsson », annonça l’homme au chignon en reprenant une certaine contenance, comme s’il s’attendait à déclencher une réaction chez son interlocuteur. Il n’obtint qu’un déni évident.

     « Et alors ? reprit Hjalmar. Tu n’as pas répondu à ma deuxième question.  
     — Mais… Tu te prends pour qui, Oksilden ?
     — Un débile qui parle souvent avec ses poings. Le reste est plus flou. Faut croire que c’est de famille.
     — Par les dieux, arrêtez ça ! » vociféra Gundmundr.

     Le goði s’interposa entre les deux hommes et les écarta sèchement avant de se tourner vers Hjalmar.

     « As-tu perdu l’esprit Oksilden ? Tu t’attaques à ton propre…
     — Ses réflexes sont trop lent et sa réponse brouillonne, le coupa Hjalmar. Au lieu de partir se faire tuer comme un idiot, qu’il reste ici et protège ton village.
     — Espèce de prétentieux ! »

     Le cri soudain d’Asgeir fila dans les airs, de même que le son d’une lame mise au clair. Hjalmar se retourna pour voir le nordique courir vers lui avec une rage renouvelée. Son orgueil avait dû en prendre un coup.

     « Voilà, ça, c’est une réponse valide à la deuxième question », gloussa Hjalmar avec calme.

     Asgeir chargea donc, une prière aux dieux sur les lèvres. Il leva son épée, assura ses pas et finit par terre, la tête dans la neige. Cela n’avait pris qu’une seconde à Svaný pour s’interposer et faire perdre l’équilibre à Asgeir par le biais de la hampe de sa lance, utilisant ainsi la course irréfléchie de l’assaillant contre lui-même. Ce dernier se releva à moitié, le visage aussi rouge de haine que couvert de flocons et de terre glacée.

     « Il faut savoir garder la tête froide », lança la jeune norse.

La pique déclencha une légère hilarité dans l’assemblée, pas chez Gundmundr.

     « Encore toi sale peste ! vociféra Asgeir. C’est la dernière fois que tu m’humilies devant le clan, tu…
     — Assez ! Asgeir, rentre chez toi, gronda Gundmundr. Nous reparlerons plus tard de ton comportement. Quant à toi Objarsdottir, tu ferais mieux d’enfin apprendre à respecter tes ainés et laisser les hommes régler leurs problèmes entre eux avant…
     — Et toi Gundmundr ! le coupa Svaný. Tu devrais laisser une famille régler ses propres problèmes au lieu d’envoyer tes chiots interférer.
     — Tu… ! Ton insolence ne t’emmènera nulle part, femme. D’ailleurs, comment oses-tu te présenter pour suivre l’Oksilden ? »

     Le regard de Svaný se tourna sans flancher vers Hjalmar qui observait la scène avec curiosité.

     « Réponds à la question, continua alors Hjalmar.
     — Tu es malheureusement de mon sang, Oksilden. En t’accompagnant, je veux m’assurer que tu ailles jusqu’au bout de la tâche que le thing t’a confié.
     — Et s’il n’y arrive pas ? enchaîna Gundmundr.
     — Je le tuerais pour l’empêcher de souiller encore plus notre nom. »

     Ce fut bref, mais l’esquisse d’un sourire apparut à la commissure des lèvres du goði.

     « Ça fait sens, avança alors Hjalmar en se grattant le front. Dans ce cas, tu n’as qu’à venir.
     — QUOI ? » vociféra Harald.

     Le forgeron agrippa alors Hjalmar par sa cotte de maille et entreprit de le secouer sèchement.

     « Est-ce que tu te fous de moi ? C’est ça qu’t’appelles la convaincre de ne pas venir ? T’as envie qu’elle se fasse tuer ou bien, espèce de malade ?!
     — Bien sûr que non, c’est ma sœur quand même !
     — Grbmblbl-ouais-mbmbl-mon-œil-gmblbl.
     — C’est le paternel qui veillera sur elle quand on ira le chercher à Stavgard.
     — … Par les couilles d’Olric, Hjalmar. J’vais te tuer.
     — Eh bien ? Elle a quand même le droit de choisir de ce qu’elle veut faire.
     — Mais je vais vraiment t’ouvrir les viscères, espèce de chiure de fimir ! Tu veux en plus ajouter Objarr à ta clique ? C’est quoi la grande idée derrière ?! Enterrer ce qui reste de notre lignée avec toi ou bien ? Allons-y alors ! Soyons complètement abrutis jusqu’au bout et disons que je vais t’accompagner dans ta fabuleuse quête pour accomplir ton fantasme débile de mort glorieuse en famille !
     — Impeccable, je savais que tu comprendrais. C’est Varki qui va être content, tiens ! Allez, en route. »

     Sur cet échange houleux, Hjalmar traversa la ligne des volontaires, qui l’étaient de moins en moins, et ce qui restait de la foule circonspecte pour s’avancer vers la sortie du village d’un pas décidé. Or, il fut intercepté par une intonation de Gundmundr qui, encore une fois, ne souhaitait pas laisser Hjalmar avoir le dernier mot.

     « Bonne chance à votre troupe familiale en ce cas, siffla-t-il. Soit simplement conscient que ta condition est connue du clan tout entier à présent. Ne décevez pas les dieux. »

     Sur ce, le goði tourna les talons et s’en alla sans plus de cérémonie avec sa garde rapprochée. Il ne plaisantait effectivement pas sur le fait qu’il voulait terminer cela au plus vite et sa pique à peine dissimulée ne disait rien qui vaille. Mais Hjalmar était content, il ne verrait plus cet énergumène avant un moment.

     Svaný suivit alors le mouvement et emboita le pas au norse sans piper mot. Ils se dirigèrent ensuite vers une petite luge posée quelques mètres plus loin avec des paires de skis et des vivres pour quelques jours. C’était tout ce qu’ils auraient à disposition pour se déplacer à travers les étendues neigeuses de la Norsca.

     Mais Harald, lui, resta derrière, immobile comme un roc et blanc comme un linge. Ce ne fut que quand il remarqua que Varki gloussait en silence qu’il émit un grondement réprobateur.

     « Oh allez, s’exclama le nain. Tu reconnaîtras qu’il t’a bien eu. Maintenant, dépêches-toi et va chercher tes affaires, vieux grincheux ! Ou bien tu vas laisser filer ta seule chance de protéger de près ta famille. »

     Et ce fut alors au tour du nain de rejoindre la procession qui sortait du village sans plus de cérémonie. Harald, lui, resta quelques secondes de plus sur place, à maugréer diverses malédictions à l’encontre de son imbécile de frère. Puis, une main se posa sur son poing fermé, celle de Ruthgerd, la vieille dame qui les hébergeait depuis tant d’années.

     « Va les rejoindre.
     — Mais… La forge, mes responsabilités ici…
     — Sont moins importantes que ceux de ton sang. »

     Harald adressa un regard perdu à Ruthgerd, puis vers le petit groupe prêt à partir et enfin vers son frère. Les dents serrées, il se mit ensuite à courir comme un dératé vers sa forge.

     Hjalmar, depuis l’extérieur du village s’imaginait déjà ce qui passait dans la tête du forgeron :

     « On allait lui en vouloir de partir, mais tant pis. Les gens de Stavgard avaient pris l’habitude de le voir battre le pays de temps à autre, alors les habitants d’Iskvard allaient devoir faire de même ! Et puis, il avait formé deux ou trois jeunes hommes à l’art de la forge, alors ils ne seraient pas complètement sans forgerons. Oui, ça pourrait aller. Non, ça devrait aller… Bordel, ce n’était plus de son âge ces conneries. Pourquoi fallait-il que cette tête brûlée se sente obliger de tout changer ? Oh ça, par Olric il allait lui éclater un genou à cet idiot. »

     Oui, Hjalmar était même convaincu que la dernière phrase devait se répéter en boucle à présent.

     Quelques minutes plus tard, Harald revint, mais équipé cette fois d’une hache et d’un bouclier de sa fabrication, d’un lourd manteau doublé de mailles et de quelques sacoches qu’il terminait d’attacher. Il dépassa en trombe la foule toujours amassée à l’entrée, ne remarquant même pas le regard inquiet de l’oracle et l’air peu amène du goði tandis que plusieurs norses acquiesçaient calmement son départ.

     Alors que Harald rejoignait le groupe avec, sur l’épaule, une des paires de skis restantes, une note grave se fit entendre dans l’air. Elle venait du village. Ladite note, qui était chantée, fut reprise par d’autres, s’amplifiant progressivement alors qu’ils s’ajoutaient à la symphonie. Une série de tapements de pieds ajouta une base au tout après quelques instants d’ailleurs. Le rythme était un peu hasardeux, mais ils s’en fichaient. C’était l’ambiance qui comptait.

     Le chant norse était simple, mais mélancolique et puissant à la fois. Les notes étaient longues, presque plaintives tout en gardant une certaine mélodie sauvage. Pour ce qui était du fond, le chœur des chanteurs reprenait en fait un couplet qu’on répétait parfois après quelques chopines dans la grande halle. Le message n’était pas vraiment important, beaucoup de comptines norses avaient des thèmes proches de toute manière. Mais c’était le genre de chansons qu’on répétait à tue-tête pour encourager les troupes, ou qu’on reprenait pour se souhaiter une belle mort.

Lífið er svo stutt,
O sonur norðurs.
Þú munt finna frið þína,
Í lok ferðarinnar.

La vie est si courte,
Ô fils du Nord.
Vous trouverez votre paix,
À la fin de votre voyage.

     L’air revint quelques fois, puis s’éteignit. La foule se dispersa. Derrière la troupe qui disparaissait derrière une colline, Iskvard continua à vivre.

     Hjalmar abandonna son sourire. Les problèmes commençaient.


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Ven 4 Oct 2019 - 11:58
Lífið er svo stutt,
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Þú munt finna frið þína,
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Ven 4 Sep 2020 - 18:05
Je reprends un peu mon retard sur tous ces superbes récits, et j'ai donc relu celui-ci.

Je me souviens que tu nous avais dis que tu n'avais pas eu l'envie de terminer ce récit, même si je ne me souviens plus des raisons exactes. De mémoire c'était une sorte d'ennui vis-à-vis du personnage de Hjalmar lui-même qui ne t'amusait pas autant que tes autres personnages. N'hésite pas à me corriger si je me trompe bien sûr. Toujours est-il que c'est en sachant que ce texte ne serait peut-être pas terminé que j'ai quand même souhaité m'y plonger. ça m'a permis de faire peut-être moins attention à l'intrigue globale et plus au texte lui-même.

Aussi, j'ai lu un peu de Gotrek et Félix il y a peu, donnant une comparaison intéressante avec ton histoire.

Bref, qu'est-ce que j'en pense?

Et bien que, en plus du texte toujours super agréable à lire, des descriptions de la culture de norsca qui nous immergent immédiatement dans ce pays (en particulier les éléments tristes-mais-c-est-la-vie, comme le frère bouffé par un loup), des dialogues sonnants toujours tellement vrais, et des pensées du personnage principal bien dosées et placées... Que l'histoire est très bonne, et que Hjalmar est un très bon personnage. En tout cas ça m’a beaucoup plu (bien plus que G&F).

Le début prend son temps, mais c’est très agréable et on ne s’ennuie pas. L'histoire semble alors tourner autour de la recherche d'un but par le nordique, où aller et quoi faire. Mais le récit lui donne de très nombreux buts et objectifs à peine pose-t-il le pied en norsca ! S'émanciper de Malal, découvrir sa famille, aller remplir la dernière quête avant liée à son bannissement… Et on sent très vite que l’histoire se dirige vers une très bonne aventure.
Pendant le récit, on a l'impression que Hjalmar, initialement morne et presque écrasé par son mal-être retrouve petit à petit une fière allure et presque une joie de vivre. J’ai l’impression qu’il vit pour la première fois une aventure où il a plus à perdre que sa vie, ou du moins que c’est la première fois que ce qui est en jeu est directement lié à lui (sa famille, l’honneur ses siens, les actions de ses vingts dernière années). J’ai le sentiment qu’avec ça, le personnage est sur le point de retrouver une étincelle de joie en vivant avec ce risque inconnu.
Le personnage donne aussi quelques traits de caractère qu’on avait finalement un peu moins vu lors de son aventure skavenite (skavenesque ? skavenatoire ?). On le voit amicale, mais pas joviale, bourrin, mais sachant apprécier la subtilité grâce à ses voyages (notamment quand par ses yeux tu commentes l’architecture du nord de la bretonnie), avec un certain esprit de famille mais visiblement sans l’esprit protecteur de son frère, sobre et frugal, mais appréciant un peu de confort. C’est un personnage qui fait très vrai. Je suis presque surpris en fait qu’il ne raconte pas plus son histoire, et que personne ne l’interroge plus dessus.
Et Hjalmar n’est pas le seul personnage qui rend bien : son frère lui ressemble par certains cotés, ouvert sur l’exterieur, sympathique mais avec des poings très expressifs. J’aime aussi beaucoup le chef du village. J’aime bien quand les antagonistes sont intelligents, fins et ayant des buts au-delà de leur propre interêt sans pour autant les oublier.
Quand aux compagnons de Hjalmar pour son futur voyage, ils ont tous un caractère bien trempé. ça va pas mal se taper dessus, ça va être sympathique.

Tout ça pour dire que j’ai passé un très bon moment à lire. Même s’il n’y a pas de suite immédiate, tu as arrêté avant d’avoir été engagé dans la partie suivante, et à la lecture on peut le sentir comme une sorte de « petite fin » : Hjalmar a retrouvé un début de joie, il sort d’un rapide duel tout à fait son genre, mais il y a aussi tous les buts cités plus haut pour donner une suite potentielle.

Et si la suite arrive un jour, je la lirai avec grand plaisir !

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Ethgrì-Wyrda, Capitaine de Cythral, membre du clan Du Datia Yawe, archer d'Athel Loren, comte non-vampire, maitre en récits inachevés, amoureux à plein temps, poète quand ça lui prend, surnommé le chasseur de noms, le tueur de chimères, le bouffeur de salades, maitre espion du conseil de la forêt, la loutre-papillon…
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Sam 5 Sep 2020 - 13:52
Je vais déjà commencer par te remercier ! C'est un récit assez difficile à écrire et voir qu'il arrive tout de même à plaire est une récompense en soit.

Ethgri a écrit:Je me souviens que tu nous avais dis que tu n'avais pas eu l'envie de terminer ce récit, même si je ne me souviens plus des raisons exactes.
Il y a en partie un ennui par rapport au personnage, mais surtout une impression de tourner autour du pot et de ne pas donner à ce récit un déroulé un peu plus clair. De plus, j'ai aussi le sentiment de m'être éloigné de ce qui donnait sa personnalité au personnage, son côté rigolard, idiot et et décalqué que l'on voyait dans le premier tome. En somme, Hjalmar est selon moi un très sympathique personnage secondaire, mais pas un acteur de premier plan. Et le fait d'avoir tourné le récit entièrement sur son point de vue a aggravé cette impression à mes yeux.

Qui plus est, mes relectures de l'année dernière pour m'y replonger n'ont fait qu'empirer le tout car je me suis mis à considérer le truc comme mal écrit et mal tourné.



...Néanmoins, au vu de tes remarques, il semblerait que ce n'est pas le cas ! Et j'en suis assez agréablement surpris Fou

Peut-être que mon ras-le-bol par rapport au récit est venu du fait que j'ai repensé le scénario facilement une dizaine de fois et que trouver une suite d'évènements après la sortie du village m'a fait m'arracher les cheveux. Relire encore et toujours les mêmes lignes m'en ont probablement dégoûté... En fait, ça m'a dégoûté d'écrire tout court vu que depuis j'ai à peine produit quelques vagues trucs comme le passage sur un personnage de JDR (dans récits divers et variés). Le forum RP où je passais de temps en temps m'a maintenu un peu mais même là le régime diminue. Rajoutons mon moral fluctuant et on obtient le combo gagnant. Ce qui fait qu'à l'heure actuelle, ma seule activité d'écriture est le scénario du JDR Warhammer que je meujeute et il apporte ses propres défis et surprises, mais c'est une autre histoire.



Pour ce qui est de la "fin" de ce récit, malgré tout ça, disons que j'ai de temps à autre une envie de m'y remettre. C'est que j'ai encore deux-trois autres tomes dans les cartons pour terminer cette histoire et ça me gêne un brin de ne pas la voir se terminer de la bonne manière. Or ce tome 4, je le crains autant qu'il m'intéresse. Il me reste encore beaucoup à faire et à arranger (et ce malgré 2000 mots de notes) et la frustration que j'ai décrite plus tôt a du mal à partir.

Je ne peux donc rien garantir. Un jour peut-être verrons-nous la suite, mais, pour le moment, je ne peux que m'excuser auprès des lecteurs pour cet arrêt.

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Edit du 06/11/2023 :

Reviendu d'entre les morts, ce sujet continue de hanter les couloirs de ce forum au même titre que ma psyché  Fou

Après discussion avec moi-même et d'autres membres du forum, j'ai décidé d'archiver ce sujet en un sens et de le laisser tel qu'il est ici. Depuis les multiples réécritures, le récit actuel est devenu obsolète et cela me gêne de modifier les posts précédents, ne serait-ce que pour la postérité des remarques.
Un nouveau sujet avec une version plus à jour du récit sera posté sous peu et me permettra de repartir avec une base plus à jour qui a été revue mainte fois. Ce qui, je l'espère, me permettra d'avoir une meilleure chance de le terminer.

Je vous remercie d'avance pour votre compréhension.

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