- SenghienGarde des cryptes
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Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mer 4 Avr 2012 - 20:12
Dramatis Personae
Essen, la cabale
Alexandre Malvoisier, comte vampire.
Gregor, Premier Intendant, ex-mercenaire et maitre d’hôtel.
Orlean, servante, sœur d’Angouleme.
Anna, servante.
Angouleme, servante et comptable, sœur d’Orlean.
Yelov Rhenser, Templier de la Lumière Eternelle.
Leo Von Graf, Premier conseiller du comte d’Essen.
Essen
Comte Hans Von Oesterlen, régent d’Essen
Friedrich de Denesle, Templier de la Lumière Eternelle
Indépendants :
Jonas Rykehuss/ Lucic Skaugen, Frère-Inquisiteur, Ordre du marteau d’argent
Hreidmar Barikson, Navigateur du Liorne
Sous-Essen :
Heechrigar fulmine-os, ancien chef du Clan Abys
Chang-Qee, Technomage du Clan Abys
Teer-Aquol, Prophète Gris du Clan Abys
Hiirceek, apprenti de Chang-Qee
Préface:
Il est fréquent pour un autobiographe de demander à quelqu'un qu'il a admiré de rédiger la préface de l'œuvre de sa vie. malgré nos nombreux affrontements et désaccords, j'en conclu que Jonas Rykehuss en était venu à me considérer comme un accomplissement, la lune sous laquelle il hurlait dans la nuit, un miroir dont il n'était que le pâle reflet. Moi-même et avec toutes les considérations dues à la position qui est restera mienne, je me vois obligé d'admettre que je respectait cet homme dont la flamme a éclairé ma longue immortalité. C'est avec une certaine surprise que je reçu ce manuscrit écrit de sa main et avec cet héritage la vision relativement éclairée qu'il avait du monde et notamment de ma race.
Je ne reprendrai pas ce qui a été couché de sa main, peut-être ajouterais-je quelques précisions si j'estime que cela est nécessaire à la compréhension de cet ouvrage. Je précise également qu'en tant que natif d'Averland, avait une opinion très tranchée en ce qui concernait les autres provinces, point sur lequel nous nous rejoignons également.
Sincèrement
A.M
CHAPITRE UN
[/b]J'étais officiellement Inquisiteur depuis trois semaines, dont deux à voyager sur les routes neigeuses qui reliaient le Reikland à l'Ostermark. Heureusement, mon titre nouvellement acquis m'autorisait quelques privilèges et c'est donc dans une voiture à cheval et non sur le dos de celui-ci que je me rendis jusqu'à Bechafen où je devais rencontrer le Cardinal Karinov. Le voyage ne fut pas plus rapide mais le toit m'offrit une protection toute relative contre les intempéries. Le froid, la pluie et l'odeur du cocher eurent raison de mon enthousiasme et je devais encore plus déchanter à mon arrivée lorsqu'enfin ma destination m'apparut. Une, peut-être deux douzaines de milliers de personnes devaient s'entasser dans ce qui semblait de loin une tâche noirâtre et enfumée dans la pâleur de l'hiver. La majeur partie des habitations semblaient faites de bois, à l'exception notable du palais du comte, de la Grande Cathédrale de Sigmar et des murailles qui apportaient un semblant de civilisation à cette ville.
Un vieux prêtre m'attendait sur la place centrale et son air me suggérait que ce devait être plus une corvée qu'un honneur. Il me grogna quelque formule de bienvenue sans en penser un mot et me guida froidement à travers la ville jusqu'au temple pontifical. Même le climat était plus accueillant que le clergé local pensais-je, les Inquisiteurs ne sont jamais désirés et toujours accueillis avec suspicion. Le pouvoir et l'autorité quasi suprême sur la majeur partie des administrations de l'Empire allaient de pair avec quelques problèmes relationnels et une courte vie plutôt agitée. La plupart d'entre nous ne s'en préoccupent guère, ils fréquentent assidument les dévots les plus fanatiques et apportent la lumière de Sigmar à grand renfort de bûchers. Ce n'était pas réellement la carrière que je désirais mais les décennies que mes prédécesseurs avaient passé à arpenter les campagnes avaient laissé dans le cœur des citoyens une mauvaise réputation hélas fondée.
Je fut brutalement sorti de mes pensées lorsque mon guide stoppa devant l'imposante cathédrale de pierres noircies par la fumée. Mon guide me laissa et d'un mot m'intima d'attendre. Bien, le message du Cardinal était clair et sans grande subtilité. "Vous n'êtes pas le bienvenu ici, ni ma priorité et quelque soit votre autorité, vous êtes chez moi". Et c'est ainsi que je dus encore patienter, planté en plein vent sur le parvis comme la hallebarde des gardes tout aussi indifférents à ma présence. Ma patience était déjà bien entamée lorsque j'entendis les gonds des lourdes portes grincer. J'ajustai mon manteau, dévoilai l'insigne de ma fonction et fit face au nouvel arrivant en affichant un sourire jovial peu orthodoxe. C'était un jeune novice à en juger par sa bure. A la différence du vieil aigri, celui-ci était pressé, presque paniqué et s'inclina précipitamment en se confondant en excuses.
- Monseigneur! veuillez pardonner cette attente, je suis profondément désolé.
Malgré le froid ambiant, le moine suait à grosse gouttes. Il avait dû traverser toute la cathédrale au pas de course, chose qui ne devait pas être habituel pour quelqu'un plus porté sur les écritures que l'effort physique. Je le laissais reprendre son souffle quelques instants.
- Repurgateur Rykehuss, lui annonçais-je, Il n'était pas nécessaire de courir jeune homme, je ne suis plus à quelques minutes près.
Il paru se détendre quelque peu, bien que cela n'arrangeât nullement sa respiration sifflante
- Monseigneur, le Cardinal vous attend.
Il repassa devant moi et s'engagea dans l'interminable couloir obscur, bien plus lentement qu'à son arrivée.
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- Par Sigmar, pourquoi avez vous été envoyé ici?
La chose qui avait prononcé ces mots irradiait d'une aura d'antipathie qui me frappa dès que j'entrai dans la salle. Il avait établi son cabinet dans une grande pièce circulaire située dans les annexes de la cathédrale et son bureau était aussi richement décoré que l'extérieur inspirait la pitié. Des piliers entouraient un trône surélevé d'où le cardinal pouvait avoir une bonne vue sur les formes encapuchonnées qui se dissimulaient dans les ombres tels des goules. La pièce empestait l'encens mais les saintes herbes ne parvenaient pourtant pas à effacer complètement les odeurs de nourriture et de gras qui flottaient dans l'air renfermé. Je ne répondis pas tout de suite, étant étrangement plus curieux de savoir comment le cardinal avait pu monter les marches qui menaient à son Saint Siège malgré sa corpulence.
- Excellence, je n'en sais moi même rien, répondis-je respectueusement, feignant d'être pris au dépourvu en fixant ses pieds boudinés dans ses chaussons pourpres. Je... ne peux que présumer des motivations de mes supérieurs
- Eh bien parlez!
Je laissai transparaitre une pointe d'embarra et regardai mon interlocuteur en face afin qu'elle soit visible. J'hésitai encore un bref instant jusqu'à ce qu'il s'impatiente et me jetai à l'eau.
- Votre Excellence, rien n'aurait pu plus me faire plus honneur que de suivre mes frères à l'Ouest et anéantir les vestiges de la tempête qui a déferlé sur notre Très Saint Empire... Cependant comme vous l'avez constaté je suis promu depuis peu et encore néophyte dans bien des aspects de ma Sainte fonction.
Tout ce que je venais de dire n'était qu'une suite de mensonges éhontés. Le premier était que le Middenland grouillait encore d'adorateurs des Dieux Sombres, de guerriers en armure noire et de monstres de toutes sortes qui traînaient encore après la dissolution de la Horde du Seigneur de la Fin de Temps. A coté de cela, l'Ostermark était une promenade de santé malgré sa mauvaise réputation et comme c'était la seule alternative j'avais, mon choix fut vite fait. Le deuxième était que bien que je sois effectivement repurgateur depuis peu, j'avais passé près de dix ans auprès de l'un d'entre eux et que sans fausse modestie, je connaissais assez bien les ficelles du métier.
- Je présume donc que mes mentors ont voulu me donner quelque expérience en m'envoyant dans votre, et j'insistais bien sur ce mot, province où votre habileté à la traque des sorciers est reconnue.
Je fus assez satisfait de mon discours que j'avais préparé de longue date. La difficulté avait été de paraitre plus zélé que je n'étais tout en prenant le Cardinal pour moins stupide qu'il devait être. J'avais une certaine expérience de la psychologie et le Cardinal, improbable croisement entre un corps de crapaud obèse et une face de fouine rachitique semblait tenir des records d'imbécilité. Le véritable pouvoir venait des hordes de conseillers et de prêtres qui semblaient avoir mis leurs guerres intestines de coté pour me fixer avec méfiance et mépris depuis l'ombre des alcôves de la nef. Leur prochaine action serait probablement de me garder loin de leur petit monde d'intrigues et de complots pour m'envoyer dans une autre ville, loin de la frontière avec Kislev et donc de ce fait plus loin encore de la ligne de front. Ce qui était par le plus grand des hasard exactement mon but.
Le cardinal me regarda quelques secondes avec les yeux inexpressifs d'une dinde cuite puis éclata d'un rire gras en direction de ses larbins.
- Bien, Jeune Frère, je suis sûr que nous pouvons trouver quelque exutoire à votre saine émulation. Peut-être reste-il quelques sorciers ou bêtes que nous pouvons vous confier.
J'encaissai cette nouvelle insulte sans broncher d'un air reconnaissant et béat. La seule partie de sa phrase que je trouvais amusante était le parallèle avec les bêtes. Son apparence n'avait rien à envier à bien des créatures qui avaient connu une fin précipitée sur un bûcher, d'autant que la quantité de graisse que son corps devait abriter aurait pu illuminer un village pendant plusieurs heures... La voix du Cardinal résonna de nouveau et ôta de ma tête ces douces pensées.
- Soit. Le mal semble être revenu en Sylvanie et les gueux recommencent à faire flamber leurs filles et leurs femmes du coté d'Essen. Allez donc y remettre un peu d'ordre, je n'aimerais pas que ces effluves de viande grillée ou les émeutes n'arrivent ici, s'éclaffa-t-il bruyamment. Il fut pris d'un hoquet et je me surpris à espérer sans réelle conviction qu'il crache ses poumons et cesse ses blasphèmes mais cela n'arriva pas.
- Vous partirez sur l'heure, un cheval vous attend à l'écurie.
Je sursautai. Pas de répit après deux semaines de voyage, pas de voiture. J'avais sous estimé cette chose. En plus de son manque total de retenue, de compétence, d'intelligence et de savoir vivre, il était également un sacré enfant de catin.
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Seulement de nos jours il y a de moins en moins de techniciens pour le combat à pied. L'esprit fantassin n'existe plus. C'est un tort.
- MysterJZGarde des cryptes
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 7 Avr 2012 - 11:46
C'est bien écrit. J'aime bien.
Le "plus" éventuellement apportable serait peut un peu plus de description de l'environnement/contexte. Chose qui n'est aisé lorsque l'on écrit à la 1ere personne.
Sinon c'est très sympa.
La suite
Le "plus" éventuellement apportable serait peut un peu plus de description de l'environnement/contexte. Chose qui n'est aisé lorsque l'on écrit à la 1ere personne.
Sinon c'est très sympa.
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L'éternité c'est long, surtout vers la fin...
MysterJZ
- ArkenMaîtresse des fouets
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Lun 9 Avr 2012 - 19:23
L'histoire est intéressante, surtout avec le prologue qui laisse beaucoup de suspens...
Mais s'il te plait, relis-toi... Il y a plusieurs fautes (mineures quand même ), des fautes de frappe, et surtout des phrases qu'on arrive à comprendre mais qui n'ont pas de sens grammaticalement.
Ton texte est bien écrit, mais ce serait plus agréable de le lire sans trop de fautes.
La suite !
PS : Tant que tes textes/topics ont du sens et que l'on reste dans le sujet, je pense que les modos ne te diront rien
Mais s'il te plait, relis-toi... Il y a plusieurs fautes (mineures quand même ), des fautes de frappe, et surtout des phrases qu'on arrive à comprendre mais qui n'ont pas de sens grammaticalement.
Ton texte est bien écrit, mais ce serait plus agréable de le lire sans trop de fautes.
La suite !
PS : Tant que tes textes/topics ont du sens et que l'on reste dans le sujet, je pense que les modos ne te diront rien
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Ceux qui ne croient pas en la magie ne la trouveront jamais.
- SenghienGarde des cryptes
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 14 Avr 2012 - 19:18
Je n'ai pas la prétention de dépasser mon ami pour ce qui est de la création artistique. J'ai eu bien des occupations mais la passion créatrice m'a quitté lors de ma seconde naissance. Je profite de ce récit pour mettre en avant un autre protagoniste qui a eu part belle des évènements qui suivirent et apporter des précision qui ne furent pas connues du perspicace Inquisiteur.
Respectueusement
A.M
CHAPITRE DEUX
Alexandre Malvoisier sentit revenir à lui la parodie de vie qui l'animait alors que le soleil agonisait au delà de la cime des arbres. Les mains toujours croisées sur son ventre, il inspira une grande bouffée d'air, non pas par nécessité mais parce qu'il aimait l'odeur de ce mélange d'épices, de peinture et de cuir légèrement moisi. Cette myriade de senteurs commençait à fourmiller dans ses narines et réveillait en lui de vieux souvenirs. Il avait besoin de cela pour se rappeler et ne pas sombrer dans la mélancolie qui guette ceux qui comme lui ont trop vécu. Les bruits de l'activité frénétique de dizaines d'hommes et de femmes à quelques mètres au dessus de sa tête parvinrent enfin à ses oreilles et il se laissa submerger par la cacophonie des voix et des sons entremêlés des rues nocturnes d'Essen. Il imagina, ici un chien errant chassé de l'étal d'un boucher de mauvaise humeur à la voix rauque, là la course frénétique de bottes ferrées, sans doutes la milice à la poursuite d'un mendiant qui ne devait pas avoir d'autre choix que de voler une pomme ou un bout de lard pour survivre à cet hiver rigoureux.
Il soupira et se décida à se lever. D'un bond agile, Alexandre s'extirpa hors de son cercueil et atterrit sans bruit sur le sol de sa crypte. Il parcourut des yeux la salle circulaire et constata avec soulagement que Stefan avait balayé le parterre en mosaïques et ôté la poussière des sept vitraux. Tous brillaient comme à la lumière du jour grâce à l'ingénieux système de miroirs et de roches brillantes qui restituait la lumière à son abri souterrain. La voûte gothique était perpétuellement en travaux et les échafaudages qu'il pensait temporaires débordaient maintenant de jarres en terre cuite aux étiquettes illisibles, de tableaux et d'étranges appareils sans compter le planétarium de cuivre patiné sous lequel il s'endormait. Il se dirigea vers sa grande armoire de chêne mais se ravisa. Sa tenue était parfaite pour ce qu'il avait prévu ce soir, une veste ample de couleur ivoire, sobre mais distinguée et décorée aux attaches et aux manches de broderies dorées, un pantalon sombre, de hautes bottes et une autre large pièce de tissu qui tombait aux genoux, soigneusement taillée dans un étendard pourpre frappé d'un soleil à visage humain de couleur sang. Alexandre s'arracha à ses souvenirs et monta à l'échelle, vers la trappe qui s'ouvrait vers la surface.
Le cellier dans lequel il arriva était aussi bien entretenu que son sous-sol. Aucun n'éclairage n'était utile dans cette pièce où les ténèbres régnaient. Le sol et les murs étaient lisses et de pierres parfaitement ajustées, complètement vides à l'exception d'un petit soupirail grand d'un pied qui devait servir à évacuer l'eau et d'une porte massive. Alexandre manipula distraitement quelques leviers et fit sauter le verrou qui maintenait son sas clos. Il poussa la porte et fit son entrée dans le monde des vivants, débouchant discrètement sur le rez-de-chaussée d'un hôtel particulier assez luxueux et chaleureux pour les standards de la région. Les boiseries étaient cirées et plusieurs servantes s'affairaient à ravitailler en hydromel des clients richement habillés et particulièrement bruyants. Un petit homme en costume noir, les traits tirés commandait ses employées de sa voix de crécerelle et s'assurait, aidé des deux videurs kislevites, qu'aucun invité ne se montre trop entreprenant avec elles. Il se rendit compte brusquement de la présence du nouvel arrivant et son visage s'éclaircit. Il délégua rapidement la gestion des lieux à grand renfort de gestes amples et noms d'oiseaux divers et se dirigea vers son hôte en trottinant pour l'accueillir.
- Monsieur a-t-il fait bonne journée? demanda-il poliment.
La voix de Gregor parvint indistincte à ses oreilles. Alexandre était bien plus intéressé par les gonflements réguliers sous la peau du cou des humains présents dans la salle. Le battement de leurs cœurs à l'unisson réveillait ses plus bas instincts en une entêtante symphonie de percussions étouffées. Il se rendit compte que cela faisait plusieurs semaines qu'il ne s'était pas nourri mais il avait été trop absorbé pour s'en rendre compte. Ses yeux prirent une teinte rouge et ses crocs commencèrent lentement à s'allonger.
- Monsieur, vos dents...
Gregor avait prononcé ces mots avec le ton qu'il aurait pris pour conseiller une bonne bouteille de vin Bretonnien et son intervention tira le vampire de son monde imaginaire. Ses canines se rétractèrent instinctivement lorsqu'elles piquèrent sa gencive inférieur et ses yeux reprirent leur couleur vert émeraude.
- Monsieur désire-il-quelque... rafraichissement avant de sortir? demanda Gregor toujours du même ton impassible.
Alexandre n'était pas affamé au point de sombrer dans la frénésie aveugle, c'était un simple instinct animal, une pensée fugace et morbide où apparaissaient des fontaines de sang jaillissant de gorges ouvertes et d'insipides vies rejoignant l'autre rive du Styx. C'était un fantasme qu'il laissait prospérer et satisfaisait dans sa tête pour ne pas avoir à le faire réellement. C'était en même temps une bête sauvage, imprévisible et impitoyable lorsque sa survie était menacée. Une bête qu'il craignait tout autant qu'il adorait et dont il s'occupait comme d'un individu retors qu'il lui fallait régulièrement corrompre pour avoir droit à la tranquillité. D'autant plus que ses intérêts était exorbitants...
- Soit, mon vieil ami! acquiesça Alexandre le plus cordialement du monde. Il serait impoli de faire attendre mon créancier. Je suis persuadé que tu t'en es occupé...
- On ne peut rien cacher à Monsieur, répondit le maitre d'hôtel. Anna a fait le nécessaire il y a trois nuits, j'espère que ce sera à votre convenance.
Gregor mena Alexandre jusqu'à une arrière salle faiblement éclairée de quelques bougies à moitié fondues. Des tapisseries étaient tendues tout autour des tables et donnaient l'impression d'être dans une arène et non un gîte. Le vampire entra seul, s'écroula lourdement sur un imposant coussin et se saisit d'une choppe d'étain qu'il porta à sa bouche. Le liquide, métallique et salé était encore chaud, nourrissant mais sans plus. Alexandre restait silencieux et maussade, tentant d'apprécier ce présent malheureusement sans saveur. Gregor sentit la frustration de son maitre et resta à bonne distance du vampire.
- Monsieur désire-il un cru plus récent? hésita-il. Nous avons ici quelques jeunes personnes qui pourraient vous satisfaire.
- Hélas non mon brave... dit-il avec lassitude. Je me suis nourri tant de fois à leurs veines que je saurais en reconnaitre toutes les nuances. Ces filles sont là parce qu'elle cherchent de l'argent, un protecteur ou je ne sais quoi d'autre. Rien de sincère, rien d'authentique et cela me manque Gregor.
Le domestique parut désarçonné par l'expression mélancolique du vampire. Il était habitué à ses sautes d'humeur mais ni lui ni aucun autre occupant de la maison ne pouvait avoir la moindre influence sur Alexandre. Il choisit longuement ses mots avant de répondre:
- Monsieur, vous êtes au dessus de ces futile préoccupations humaines. Notre vie est si courte que nous nous y accrochons désespérément et la vivons parfois même sans en trouver le but.
- Et toi mon bon Gregor, sacrifierais-tu ta courte existence pour moi, moi qui suis immortel? N'est-ce pas égoïste de ma part de te demander cela?
- Monsieur, ma vie arrive bientôt à son terme et je remercie Sigmar de me l'avoir si bien remplie. J'ai pu trouver des femmes, de l'aventure et surtout quelqu'un à servir.
Quelqu'un? Alexandre restait pensif mais une expression inquiétante était apparu sur son visage qui vieillissait à vue d'œil. Ses traits s'allongèrent et se durcirent, le sang reflua et donna à sa peau morte la teinte grise d'un cadavre. Ses cheveux noirs devinrent cendrés et ses yeux couleur sang. Sa voix était un grognement grave.
- Gregor, Gregor... Pourquoi t'obstiner à voir en moi ce que je ne suis pas? Les miens ont pillés, tué et se sont nourris de milliers d'humains au cours des âges, pourquoi serais-je différent?
Gregor tremblait. Une peur irrationnelle s'emparait progressivement de lui. Il pouvait compter sur les doigts d'une main les fois où il avait vu Alexandre dans cet état et il ne s'y était jamais habitué. Cet être, car il n'avait plus rien du séduisant jeune homme qui se tenait à sa place trente secondes avant, exsudait le meurtre et violence, le scrutait avec appétit en passant une langue rouge sur ses dents longues comme des couteaux. Le vieux domestique parvint soudain à se maitriser et répondit avec une surprenante assurance.
- Monsieur, quelque soit le visage que vous montrez, voila près de trente ans qu'il n'y a pas eu de disparitions, de cadavres vidés de leur sang dans les rues de cette ville. Et la population ne vous aurait pas toléré si vous étiez réellement ce que vous prétendez être.
Quel dommage que Gregor ai été si vieux, Alexandre commençait à l'apprécier pour son franc-parler, son assurance et ses histoires d'ancien mercenaire. Dans quelques années, le vieillard quitterait ce monde pour le royaume de Morr et il lui faudrait trouver un remplaçant pour gérer ses affaires, ou bien quitter la ville...
Mais ce soir, Alexandre avait prévu tout autre chose de bien plus mondain. Ce soir, il allait au théâtre.
Respectueusement
A.M
CHAPITRE DEUX
Alexandre Malvoisier sentit revenir à lui la parodie de vie qui l'animait alors que le soleil agonisait au delà de la cime des arbres. Les mains toujours croisées sur son ventre, il inspira une grande bouffée d'air, non pas par nécessité mais parce qu'il aimait l'odeur de ce mélange d'épices, de peinture et de cuir légèrement moisi. Cette myriade de senteurs commençait à fourmiller dans ses narines et réveillait en lui de vieux souvenirs. Il avait besoin de cela pour se rappeler et ne pas sombrer dans la mélancolie qui guette ceux qui comme lui ont trop vécu. Les bruits de l'activité frénétique de dizaines d'hommes et de femmes à quelques mètres au dessus de sa tête parvinrent enfin à ses oreilles et il se laissa submerger par la cacophonie des voix et des sons entremêlés des rues nocturnes d'Essen. Il imagina, ici un chien errant chassé de l'étal d'un boucher de mauvaise humeur à la voix rauque, là la course frénétique de bottes ferrées, sans doutes la milice à la poursuite d'un mendiant qui ne devait pas avoir d'autre choix que de voler une pomme ou un bout de lard pour survivre à cet hiver rigoureux.
Il soupira et se décida à se lever. D'un bond agile, Alexandre s'extirpa hors de son cercueil et atterrit sans bruit sur le sol de sa crypte. Il parcourut des yeux la salle circulaire et constata avec soulagement que Stefan avait balayé le parterre en mosaïques et ôté la poussière des sept vitraux. Tous brillaient comme à la lumière du jour grâce à l'ingénieux système de miroirs et de roches brillantes qui restituait la lumière à son abri souterrain. La voûte gothique était perpétuellement en travaux et les échafaudages qu'il pensait temporaires débordaient maintenant de jarres en terre cuite aux étiquettes illisibles, de tableaux et d'étranges appareils sans compter le planétarium de cuivre patiné sous lequel il s'endormait. Il se dirigea vers sa grande armoire de chêne mais se ravisa. Sa tenue était parfaite pour ce qu'il avait prévu ce soir, une veste ample de couleur ivoire, sobre mais distinguée et décorée aux attaches et aux manches de broderies dorées, un pantalon sombre, de hautes bottes et une autre large pièce de tissu qui tombait aux genoux, soigneusement taillée dans un étendard pourpre frappé d'un soleil à visage humain de couleur sang. Alexandre s'arracha à ses souvenirs et monta à l'échelle, vers la trappe qui s'ouvrait vers la surface.
Le cellier dans lequel il arriva était aussi bien entretenu que son sous-sol. Aucun n'éclairage n'était utile dans cette pièce où les ténèbres régnaient. Le sol et les murs étaient lisses et de pierres parfaitement ajustées, complètement vides à l'exception d'un petit soupirail grand d'un pied qui devait servir à évacuer l'eau et d'une porte massive. Alexandre manipula distraitement quelques leviers et fit sauter le verrou qui maintenait son sas clos. Il poussa la porte et fit son entrée dans le monde des vivants, débouchant discrètement sur le rez-de-chaussée d'un hôtel particulier assez luxueux et chaleureux pour les standards de la région. Les boiseries étaient cirées et plusieurs servantes s'affairaient à ravitailler en hydromel des clients richement habillés et particulièrement bruyants. Un petit homme en costume noir, les traits tirés commandait ses employées de sa voix de crécerelle et s'assurait, aidé des deux videurs kislevites, qu'aucun invité ne se montre trop entreprenant avec elles. Il se rendit compte brusquement de la présence du nouvel arrivant et son visage s'éclaircit. Il délégua rapidement la gestion des lieux à grand renfort de gestes amples et noms d'oiseaux divers et se dirigea vers son hôte en trottinant pour l'accueillir.
- Monsieur a-t-il fait bonne journée? demanda-il poliment.
La voix de Gregor parvint indistincte à ses oreilles. Alexandre était bien plus intéressé par les gonflements réguliers sous la peau du cou des humains présents dans la salle. Le battement de leurs cœurs à l'unisson réveillait ses plus bas instincts en une entêtante symphonie de percussions étouffées. Il se rendit compte que cela faisait plusieurs semaines qu'il ne s'était pas nourri mais il avait été trop absorbé pour s'en rendre compte. Ses yeux prirent une teinte rouge et ses crocs commencèrent lentement à s'allonger.
- Monsieur, vos dents...
Gregor avait prononcé ces mots avec le ton qu'il aurait pris pour conseiller une bonne bouteille de vin Bretonnien et son intervention tira le vampire de son monde imaginaire. Ses canines se rétractèrent instinctivement lorsqu'elles piquèrent sa gencive inférieur et ses yeux reprirent leur couleur vert émeraude.
- Monsieur désire-il-quelque... rafraichissement avant de sortir? demanda Gregor toujours du même ton impassible.
Alexandre n'était pas affamé au point de sombrer dans la frénésie aveugle, c'était un simple instinct animal, une pensée fugace et morbide où apparaissaient des fontaines de sang jaillissant de gorges ouvertes et d'insipides vies rejoignant l'autre rive du Styx. C'était un fantasme qu'il laissait prospérer et satisfaisait dans sa tête pour ne pas avoir à le faire réellement. C'était en même temps une bête sauvage, imprévisible et impitoyable lorsque sa survie était menacée. Une bête qu'il craignait tout autant qu'il adorait et dont il s'occupait comme d'un individu retors qu'il lui fallait régulièrement corrompre pour avoir droit à la tranquillité. D'autant plus que ses intérêts était exorbitants...
- Soit, mon vieil ami! acquiesça Alexandre le plus cordialement du monde. Il serait impoli de faire attendre mon créancier. Je suis persuadé que tu t'en es occupé...
- On ne peut rien cacher à Monsieur, répondit le maitre d'hôtel. Anna a fait le nécessaire il y a trois nuits, j'espère que ce sera à votre convenance.
Gregor mena Alexandre jusqu'à une arrière salle faiblement éclairée de quelques bougies à moitié fondues. Des tapisseries étaient tendues tout autour des tables et donnaient l'impression d'être dans une arène et non un gîte. Le vampire entra seul, s'écroula lourdement sur un imposant coussin et se saisit d'une choppe d'étain qu'il porta à sa bouche. Le liquide, métallique et salé était encore chaud, nourrissant mais sans plus. Alexandre restait silencieux et maussade, tentant d'apprécier ce présent malheureusement sans saveur. Gregor sentit la frustration de son maitre et resta à bonne distance du vampire.
- Monsieur désire-il un cru plus récent? hésita-il. Nous avons ici quelques jeunes personnes qui pourraient vous satisfaire.
- Hélas non mon brave... dit-il avec lassitude. Je me suis nourri tant de fois à leurs veines que je saurais en reconnaitre toutes les nuances. Ces filles sont là parce qu'elle cherchent de l'argent, un protecteur ou je ne sais quoi d'autre. Rien de sincère, rien d'authentique et cela me manque Gregor.
Le domestique parut désarçonné par l'expression mélancolique du vampire. Il était habitué à ses sautes d'humeur mais ni lui ni aucun autre occupant de la maison ne pouvait avoir la moindre influence sur Alexandre. Il choisit longuement ses mots avant de répondre:
- Monsieur, vous êtes au dessus de ces futile préoccupations humaines. Notre vie est si courte que nous nous y accrochons désespérément et la vivons parfois même sans en trouver le but.
- Et toi mon bon Gregor, sacrifierais-tu ta courte existence pour moi, moi qui suis immortel? N'est-ce pas égoïste de ma part de te demander cela?
- Monsieur, ma vie arrive bientôt à son terme et je remercie Sigmar de me l'avoir si bien remplie. J'ai pu trouver des femmes, de l'aventure et surtout quelqu'un à servir.
Quelqu'un? Alexandre restait pensif mais une expression inquiétante était apparu sur son visage qui vieillissait à vue d'œil. Ses traits s'allongèrent et se durcirent, le sang reflua et donna à sa peau morte la teinte grise d'un cadavre. Ses cheveux noirs devinrent cendrés et ses yeux couleur sang. Sa voix était un grognement grave.
- Gregor, Gregor... Pourquoi t'obstiner à voir en moi ce que je ne suis pas? Les miens ont pillés, tué et se sont nourris de milliers d'humains au cours des âges, pourquoi serais-je différent?
Gregor tremblait. Une peur irrationnelle s'emparait progressivement de lui. Il pouvait compter sur les doigts d'une main les fois où il avait vu Alexandre dans cet état et il ne s'y était jamais habitué. Cet être, car il n'avait plus rien du séduisant jeune homme qui se tenait à sa place trente secondes avant, exsudait le meurtre et violence, le scrutait avec appétit en passant une langue rouge sur ses dents longues comme des couteaux. Le vieux domestique parvint soudain à se maitriser et répondit avec une surprenante assurance.
- Monsieur, quelque soit le visage que vous montrez, voila près de trente ans qu'il n'y a pas eu de disparitions, de cadavres vidés de leur sang dans les rues de cette ville. Et la population ne vous aurait pas toléré si vous étiez réellement ce que vous prétendez être.
Quel dommage que Gregor ai été si vieux, Alexandre commençait à l'apprécier pour son franc-parler, son assurance et ses histoires d'ancien mercenaire. Dans quelques années, le vieillard quitterait ce monde pour le royaume de Morr et il lui faudrait trouver un remplaçant pour gérer ses affaires, ou bien quitter la ville...
Mais ce soir, Alexandre avait prévu tout autre chose de bien plus mondain. Ce soir, il allait au théâtre.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Dim 15 Avr 2012 - 11:07
Génial ! Ton récit m'a captivée, j'étais même prête à aller au théâtre
L'ambiance est bien rendue. Continue comme ça !
La suite !
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Lun 16 Avr 2012 - 11:48
Yop, je viens de tout lire (j’avais un peu de retard hélas) et je trouve que ton récit est très savoureux. Les personnages sont à peine esquissés que l’on s’y attache déjà ; depuis le nouveau répurgateur plus finaud que la moyenne jusqu’au vieux Vampire blasé et mélancolique en passant par le serviteur résigné et fidèle.
Tu parviens à mettre en place une certaine ambiance qui ne manque pas de charme et à entretenir notre curiosité (la fin qui dévoile son intention d’aller au théâtre est magistrale).
Bref, je te félicite et t’encourage à poursuivre sur cette voie.
PS : pour ce qui est des multiples sujets, pas de soucis tant que tout reste dans la section appropriée. Il n’est pas de limite réelle du nombre de sujet par membre (et encore heureux !). Tu peux même ouvrir un nouveau sujet pour juste un texte, comme je l’ai d’ailleurs fait Moi-même avec ceci.
PPS : Arken à raison sur toute la ligne ! La qualité est surprenante mais on tique à chaque nouvelle faute de frappe et/ou d’orthographe ou à chaque construction de phrase trop biscornue. Ca brise l’immersion pourtant très forte dans ton histoire et il faut absolument que tu te relises et que tu corriges ces quelques erreurs.
Si tu le souhaites, on peut regarder ça ensemble tranquillement par MP. La balle est dans ton camp.
Tu parviens à mettre en place une certaine ambiance qui ne manque pas de charme et à entretenir notre curiosité (la fin qui dévoile son intention d’aller au théâtre est magistrale).
Bref, je te félicite et t’encourage à poursuivre sur cette voie.
PS : pour ce qui est des multiples sujets, pas de soucis tant que tout reste dans la section appropriée. Il n’est pas de limite réelle du nombre de sujet par membre (et encore heureux !). Tu peux même ouvrir un nouveau sujet pour juste un texte, comme je l’ai d’ailleurs fait Moi-même avec ceci.
PPS : Arken à raison sur toute la ligne ! La qualité est surprenante mais on tique à chaque nouvelle faute de frappe et/ou d’orthographe ou à chaque construction de phrase trop biscornue. Ca brise l’immersion pourtant très forte dans ton histoire et il faut absolument que tu te relises et que tu corriges ces quelques erreurs.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Lun 23 Avr 2012 - 23:33
CHAPITRE TROIS
Fatigue et privations avaient prélevé leur dû et ma vigilance s'était lentement amoindrie. Le paysage froid et monotone défilait lentement sans que mon esprit n'y prenne garde, alternant toundra brulée par le froid et forêts recouvertes de neige. Je n'avais pu passer qu'une poignée de nuits abrité sous un toit, les autres en me serrant entre un feu de camps et la chaleur de mes chevaux. J'essayais de garder mes pensées claires et vives en me remémorant la foule de détails que j'avais rassemblé sur l'Ostermark et plus particulièrement ma destination. Essen était une ville relativement importante et tristement célèbre. Ses hautes murailles avaient été bâties avant les premières guerres vampiriques par le baron de l'époque en un vain signe de défi contre Von Carstein. Depuis ce sanglant épisode, Essen avait subi l'influence des vampires Sylvaniens et leur marque y était restée gravée. Chaque année, de grandes et macabres célébrations se tenaient pour la victoire de Hel Fenn et certaines lois étranges édictées par Konrad Von Carstein lui même étaient encore appliquées.
Je continuais mes investigations et tentais de creuser ce qui n'était que des rumeurs dans les rares auberges que je pouvais fréquenter le long de la route. Les gens du coin étaient plutôt bourrus de prime abord mais accueillants autour d'un bon feu, quelque alcool local brûlant dans le gosier et une couronne de plus dans leur bourse. Il semblait que bien peu de sorciers avaient été détruits par le feu ces derniers mois, pas grand chose qui puisse étayer les dires du Cardinal à propos de la supposée montée en puissance de cultes flagellants et rédemptionistes. Je me sentais paradoxalement partagé entre soulagement et nervosité. D'un coté je préférais de loin n'intervenir que lorsque la situation l'exigeait et exercer le reste du temps une vigilance discrète, de l'autre je gardais de très mauvais souvenirs de toutes les fois où j'avais été mêlé à diverses affaires et que les renseignements que j'avais étaient erronés. Pour faire simple, je détestais les surprises, simplement parce dans mon métier, elles sont dans l'écrasante majorité des cas mauvaises.
Et pourtant, une rencontre inattendue rendit mon trajet bien plus intéressant. Cela commença par la vision d'un puissant cheval de guerre caparaçonné de plates brillantes dans la cour d'une ferme puis l'intervention de son propriétaire. Je portais à ce moment là des fourrures pour me protéger du froid et sous elles une longue veste matelassée qui me tombait sous la taille, striée de noir et jaune et par dessous une cotte de mailles protégée des intempéries, ainsi qu'un pantalon ample et de hautes bottes de voyage. Ajoutez-y le fait que j'avais les séquelles de plusieurs jours et nuits de voyage et que mon apparence tenait plus du mercenaire rude et malvenu que de l'envoyé Impérial et vous comprendrez que les premiers mots que j'eu avec Friedrich de Denesle, Templier de la Lumière Eternelle ne furent guère amicaux. Les épées ne furent pas tirées mais il fut assez difficile de convaincre le templier que je n'étais pas une menace. Je savais leur Commanderie établie à Essen et je ne voulais pas initier de mauvaises relations avec une des plus importante force militaire de la région en mentant à un de ses membre avant même mon arrivée. Je n'avais néanmoins pas pour habitude de révéler mon statut sans bonne raison parce que cela a tendance à attirer plus de problèmes que cela n'en résout. Dans le meilleur des cas, les zélotes vous proclament porte bannière de leurs stupides croisades, et dans l'autre ce sont les sectateurs qui font de vous la cible à abattre pour vous empêcher de fourrer votre saint nez dans leurs sales affaires. Et bien souvent, le premier cas entraine le second...
Je finis par convaincre Friedrich que je n'étais qu'un ancien soldat d'Averland faisant route sur Essen pour porter un message et dans un certain sens, c'était le cas. J'avais derrière moi quelques années à exécuter les moindres volontés, aussi farfelues soient-elles du très paranoïaque comte Marius Leitdorf en tant que membre de ses redoutés services de renseignement. Tout au plus, ce n'était qu'une petite omission. Quant à Friedrich, l'attitude qu'il pris la première fois qu'il me vit m'en apprit long sur lui. Il était par sa posture un combattant au dessus de la moyenne, par son discours plutôt intelligent et également juste et zélé défenseur des miséreux. Peut-être un soupçon trop méfiant et hostile envers les étrangers comme moi.
Nous décidâmes toutefois de rallier Essen ensemble. Le Chevalier venait de terminer une semaine de patrouille lors de laquelle il avait visité les familles de fermiers et prodiguait soins et remèdes contre les fièvres. Il devait vouloir me garder à l'œil et s'assurer que j'étais bel et bien digne de confiance et pour ma part, sa présence faciliterait mes interactions avec la population locale. Je dois bien reconnaitre que sous son attitude froide, fière et austère, Friedrich s'avéra plutôt chaleureux pour un guerrier qui a voué sa vie aux Ordres de Chevalerie. J'appris qu'il n'était pas un noble mais le fils du bourgmestre de Drüselnoff, un petit notable de la région et qu'il ne devait son adoubement qu'à ses capacités et sa volonté de réussir. Il avait vu son lot de mort et d'horreur lors de la Tempête du Chaos comme tout ceux qui avaient fait face et survécu. J'étais plutôt admiratif, voir reconnaissant envers cet homme qui n'avait pas hésité à affronter face à face les plus terrifiants adversaires pour que d'autres comme moi puissent tranquillement affronter l'ennemi intérieur, souvent bien moins grand en taille mais tout aussi dangereux.
Je tentais comme à mon habitude sous couvert de banales conversations de continuer mes enquêtes mais Friedrich se montrait très évasif, ses réponses souvent sous forme de saintes paroles et je ne pus en apprendre plus. Il était néanmoins plutôt tranquille, alerte mais détendu et cela me confortait dans mon idée qu'il n'y avait pour l'instant aucune raison de s'inquiéter. Je ne me sentais cependant pas rassuré, je dois l'admettre. En effet, Friedrich avait décidé de couper à travers les collines lugubres, soi-disant pour gagner deux jours mais je le soupçonnais en réalité de vouloir m'intimider et le bougre y arrivait plutôt bien. Les chemins sur lesquels il me guida serpentaient inlassablement à travers les forets d'arbres morts. La brume épaisse et froide rendait la visibilité difficile et curieusement, aucun son n'était audible hormis les sabots de nos chevaux et le cliquetis de l'armure du templier. Celui-ci menait la marche et je le suivais quelques pas derrière. Lui comme moi ne prononçâmes le moindre mot dans la forêt menaçante, de peur de perdre notre seul moyen de détecter une éventuelle attaque de bandits ou de bêtes sauvages.
J'appris plus tard que cette manie que lui et ses frère avaient de constamment se mettre en danger et prendre des risques était liée à la malchance légendaire dont leur ordre était affligé. Friedrich semblait prendre la chose avec un étonnant flegmatisme et considérait que le destin était joué quoiqu'il fasse, qu'un risque de plus ou de moins n'y changerait rien. Il va sans dire que je ne partage absolument pas cette vision défaitiste de la vie. Comme un de mes mentors avait dit un jour, s'il y a un risque, c'est que tu t'es trop approché du danger...
Nous ne passâmes qu'une journée à parcourir les collines maudites mais elle me sembla bien longue, puis le paysage changea brutalement. La sinistre forêt escarpée laissa place à des champs de terre nue et fertile et notre destination plantée telle une tâche noire au milieu de la plaine. Friedrich se retourna vers moi avec une petit sourire narquois et me demanda le plus naturellement du monde:
- Alors visiteur, nos routes sont bien moins ennuyeuses que chez vous, n'est-ce pas?
Je me gardais bien d'exprimer à voix haute tout le bien que je pensais de sa puérile démonstration de bravoure. J'avais au moins la satisfaction de constater que je ne m'étais pas trompé sur ses intentions et je commençais à craindre que tous les habitants de la région soient aussi inconscients face au danger que lui. Malgré la mauvaise réputation des contrées environnantes, Essen avait quelque chose de sécurisant. Je me sentais ici dans mon élément, les environnements urbains offrent bien des avantages pour ceux qui privilégient autre chose que la brutalité.
Une mission, un combat en ville est une partie de régicide réelle à ceci près qu'il n'y a pas de règles. Les pièces sont remplacées par des leurres, des filatures, des enquêtes, des embuscades et des trahisons tandis que l'échiquier se résume à un réseau complexe de bâtiments, de rues et de tunnels sur plusieurs niveaux. Malheureusement, la nature même de l'Inquisition force souvent ses agents à agir de manière offensive, rapide et à miser sur effet de surprise, laissant bien peu de place à la stratégie élaborée. Nos ennemis en revanche ont pour eux la connaissance du terrain et savent parfaitement se fondre dans la population pour frapper vite et fort. Une mission qui s'éternise finira invariablement dans un bain se sang et tout Inquisiteur qui souhaite l'éviter devrait garder cela à l'esprit avant de brandir son insigne et se révéler au grand jour. Voila pourquoi je voyageais seul, ma rosette soigneusement dissimulée et résolvant mes problèmes comme n'importe quel autre citoyen jusqu'au moment propice.
A ce moment précis, le simple citoyen que j'étais était obligé de corrompre un gros soudard puant pour avoir le droit d'entrer en ville et commençait à avoir le doigt de la gâchette qui démangeait.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Ven 4 Mai 2012 - 12:11
et commençait à avoir le doigt de la gâchette qui démangeait.
A part cette petite erreur, aucune ne m'a sautée aux yeux. Magnifique progrès !
La suite !!
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mar 15 Mai 2012 - 21:39
Bonsoir, je livre à vos bon soins cette petite suite. Merci des commentaires, ça m'évitera de me faire taper sur les doigts pour double post . Je prévois le retour de mon cher Alexandre dès le chapitre prochain, be patient...
Il y a plusieurs arrangements mis en place par Notre Vénérée institution pour garantir la tranquillité des chasseurs comme moi au cours de leurs pérégrinations. L'une d'entre elle est la présence dans la majorité des grandes villes d'agents dormants chargés de tous les problèmes logistiques. De tout petits détails permettent à un œil entrainé de les reconnaitre, cela peut être une lettre effacée sur une enseigne, une bobine de fil sur la devanture d'un magasin ou encore un volet cloué au mur pour l'empêcher de tomber. Ensuite, des phrases codées à l'aide d'expressions, d'intonations de voix et de gestuelle assez subtiles pour passer inaperçue face à un observateur non initié nous permettent normalement de communiquer. En théorie du moins car l'entretient de ces cryptages nécessite de la pratique et la majorité de mes estimés confrères jugent plus rapides de se présenter au temple de Sigmar ou sur la grands place du village pour demander, ou plutôt ordonner qu'on leur apporter de l'huile, du bois et un hérétique.
Je n'avais pas vraiment envie de me mettre en quête de ce contact dès mon arrivée en ville. Il faisait presque nuit et je ne désirais qu'une chose: trouver la meilleur auberge de la ville, prendre enfin un vrai repas avec plus de trois plats et un bon bain avant de dormir dans des draps de soie. L'alter-égo que j'utilisais le plus souvent était celle d'un bretteur Averlander itinérant, assez proche de ma véritable nature pour ne pas être démasqué par une parole de travers. Cet identité appréciait le luxe, la bonne nourriture et les réceptions mondaines et c'est tout naturellement qu'elle se mit en route vers la haute ville, là où selon toute probabilité elle trouverait un établissement à la hauteur de ses attentes. J'arrêtais mon choix après quelques minutes de recherche sur une sorte d'hôtel judicieusement nommé le Poney Rôti. La rue était propre, sentait le tabac et non l'urine comme ailleurs dans la basse-fosse et apparemment, cette auberge était un établissement historique comme indiqué sur la pancarte. Selon la légende, Konrad Von Carstein en personne s'y était arrêté et avait demandé à manger un poney. Les aubergistes l'avaient dupé avec un veau rôti mais l'écriteau ne racontait pas la fin de l'anecdote et restait ouvert à toute sorte d'imagination, ce qui ne manquait pas de me faire sourire. Au moins il y avait entre ces murs une sorte d'humour morbide qui finit de me convaincre de pousser la porte.
Le vent froid fit brièvement irruption avec moi dans la grande salle et une paire de clients se retournèrent. La pièce était à moitié remplie et les consommateurs plutôt aisés à en juger par leurs pourpoints colorés. De la viande grillée et nombre de chopes d'étain emplissaient les tables et me faisaient saliver d'avance. Je fit particulièrement attention à mon entrée en scène et affichait avec l'entrainement de l'habitude l'air confiant mais décontracté de l'officier qui avait l'habitude d'être obéi. Ma tenue avait beau être poussiéreuse, elle n'en restait pas moins exotique et mon petit numéro porta ses fruits car ce fut une serveuse et non un des videurs qui s'avança pour m'accueillir.
Je réservais une chambre avec verrou, un luxe facturé à prix d'or dans ces régions excentrées et demandais à ce que les affaires que j'avais laissées à l'écurie me soient apportées. Quelques dizaines de minutes plus tard, mes bagages arrivèrent et je pus enfin goûter au repos bien mérité. La chambre était propre et chaude, heureusement, étant donné que j'y avais mis le prix. Un accès sur le couloir, un autre sur la rue via les toits de l'auberge qui pouvait avoir son utilité en cas d'évacuation rapide. Il n'y avait pas d'autre précautions à prendre pour le moment excepté garder ma cotte de maille sous mes vêtements et de tout faire pour rester vif et concentré, ce qui passait par l'alimentation et le repos. Le premier besoin fut rapidement comblé lorsque je descendais dans la grande salle pour m'y mêler à l'environnement si particulier de cette ville.
Comme je l'avais déjà remarqué, la salle était à moitié pleine, au total dix personnes, sept clients, deux servantes et une armoire à glace plantée devant la porte du fond. Les cicatrices de ce dernier semblaient indiquer que son travail n'était pas uniquement dû à sa stature et en faisaient une menace potentielle. Les tenues et postures aguicheuses des filles de services en disaient également long sur le genre de services qu'elles pouvaient offrir une fois le service terminé, ce qui pouvait être un danger à long terme sur le repos du corps et de l'âme. Quant aux autres, ils semblaient opulents, déjà bien arrosés et après m'être accordé quelques courtes secondes de réflexions, je me joignis à eux.
De mes précédents contacts avec les locaux, j'avais retiré quelques rudiments d'étiquette régionale. A bien des égards, certains cultes sont bien plus accueillants que les Osterlandër refrognés et hostiles mais il suffisait de savoir s'y prendre. Quelques Reikmarks ou un soupçon d'autorité peuvent suffire pour persuader un paysan grincheux de vous héberger, mais gagner la confiance de marchants déjà assez gras et pourvus en métaux précieux requière une tout autre approche. Il faut savoir dans ces cas deviner les intérêts, orientations politiques de vos interlocuteurs et ceci est d'autant plus indispensable dans le cas d'une conversation que vous voulez désintéressée. Et à moins d'être capable de lire les esprits, il est conseillé d'être capable d'improvisation et d'adaptation. Par exemple, les commerçants, marchands et petits bourgeois ont à cœur leurs propres intérêts et verront probablement d'un mauvais œil toute augmentation de taxes et impôts décidés par les têtes pensantes de la ville.
Le Comte Hans Von Oesterlen était, à mon humble avis, une des meilleur chose qui soit arrivé à la cité depuis bien longtemps. Il avait la stature d'un dirigeant, l'autorité d'un officier et quelques lauriers à son actif mais son attachement à reconstruire sa ville avec l'argent des commerçants le rendait quelque peu impopulaire auprès ce cette tranche de la population. Il se trouve également qu'en matière de dirigeants impopulaires, mon Averland avait été fort bien pourvu et j'avais donc de nombreuses critiques et histoires plus ou moins authentiques à raconter...
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Le gros bonhomme en costume rouge s'empourpra et faillit recracher son vin. Il toussa et gronda
- Ce ne sont que des foutaises!
- Absolument pas Herr Jurgen répondis-je calmement en fixant ma choppe d'un regard absent.
Je me remémorais les derniers détails de mon histoire et poursuivi à voix haute:
- Le Comte Leidorf, Electeur Imperial a bel et bien déclaré la guerre à une race d'hommes-poissons imaginaires car ils lui avaient volé ses sels de bains, et en trois occasions!
- Et le conseil a approuvé? il y a bien des conseillers à la cour de votre comte, non? fit remarquer un deuxième homme. Celui-ci se nommait Gerhart et était notaire à ce que j'avais pu comprendre. Il devait être habitué aux intrigues et manipulations car il se montrait particulièrement méfiant.
- Vous savez bien Herr Gerhart, plus c'est gros et excentrique, plus ça passe, grimaçais-je. Quant aux soi-disant conseillers, ils laissaient Leidorf faire ce qu'il voulait pourvu qu'il les laisse gouverner et se servir dans les caisses...
Ce n'était pas totalement vrai mais ce mélange de flatterie et d'ennemi commun sembla faire son petit effet. Il se détendit assez pour ne pas poser de questions supplémentaires mais garda son air maussade.
- Et vous dites que vous avez travaillé pour ce Leidorf? Comme cela devait être excitant! demanda un troisième jeune homme, plus curieux que les autres. Je me fit pensif et amer pour lui répondre.
- Pas tant que cela en réalité, il m'a fallu trouver des objets inexistants, fabriquer et empailler des animaux imaginaires mais le pire était l'escorte des sels de bains du Comte. Il exigeait qu'ils voyagent lentement et uniquement sous un ciel sans nuages pour ne pas qu'ils perdent leur propriétés... Pas le genre de chose qu'un soldat rêve de faire, pas vrai?!
Mes camarades de tablée émirent de petits rires narquois et se resservirent à boire dans leurs choppes mais cette fois, remplirent la mienne en même temps. Peut-être n'étais-je pas encore accepté mais au moins toléré, ce qui restait relativement rare comme Gerhart me l'avait ironiquement fait remarquer. Malheureusement, le temps et la force de poursuivre cette agréable entrevue commençaient à me manquer. La nuit était déjà bien avancée et mes objectifs étaient largement atteints, même si pour cela j'avais du prendre quelques libertés avec mon code de conduite. L'ivresse se faisait de plus en plus présente et je pris congé de mes compagnons qui en profitèrent pour me lancer quelques remarques acerbes à propos de résistance à l'alcool. Je les acceptais de bon gré et m'engouffrais à l'étage jusqu'à ma chambre.
La marque sur la poignée de la porte n'avait pas bougé et rien n'avait été déplacé dans la chambre. Je n'étais pas particulièrement méfiant mais ce tout petit effort de mémorisation peut sonner l'alarme avant qu'il ne soit trop tard, même si l'interprétation de ces signes reste à la charge de celui qui pratique. Quelqu'un fouillant une chambre peut tout aussi bien être un anonyme cambrioleur qu'un dangereux sectateur en repérage et inversement...
Mais ce soir, le lit n'était pas piégé et il était la seule chose que je souhaitais fréquenter pour le moment.
CHAPITRE QUATRE
Il y a plusieurs arrangements mis en place par Notre Vénérée institution pour garantir la tranquillité des chasseurs comme moi au cours de leurs pérégrinations. L'une d'entre elle est la présence dans la majorité des grandes villes d'agents dormants chargés de tous les problèmes logistiques. De tout petits détails permettent à un œil entrainé de les reconnaitre, cela peut être une lettre effacée sur une enseigne, une bobine de fil sur la devanture d'un magasin ou encore un volet cloué au mur pour l'empêcher de tomber. Ensuite, des phrases codées à l'aide d'expressions, d'intonations de voix et de gestuelle assez subtiles pour passer inaperçue face à un observateur non initié nous permettent normalement de communiquer. En théorie du moins car l'entretient de ces cryptages nécessite de la pratique et la majorité de mes estimés confrères jugent plus rapides de se présenter au temple de Sigmar ou sur la grands place du village pour demander, ou plutôt ordonner qu'on leur apporter de l'huile, du bois et un hérétique.
Je n'avais pas vraiment envie de me mettre en quête de ce contact dès mon arrivée en ville. Il faisait presque nuit et je ne désirais qu'une chose: trouver la meilleur auberge de la ville, prendre enfin un vrai repas avec plus de trois plats et un bon bain avant de dormir dans des draps de soie. L'alter-égo que j'utilisais le plus souvent était celle d'un bretteur Averlander itinérant, assez proche de ma véritable nature pour ne pas être démasqué par une parole de travers. Cet identité appréciait le luxe, la bonne nourriture et les réceptions mondaines et c'est tout naturellement qu'elle se mit en route vers la haute ville, là où selon toute probabilité elle trouverait un établissement à la hauteur de ses attentes. J'arrêtais mon choix après quelques minutes de recherche sur une sorte d'hôtel judicieusement nommé le Poney Rôti. La rue était propre, sentait le tabac et non l'urine comme ailleurs dans la basse-fosse et apparemment, cette auberge était un établissement historique comme indiqué sur la pancarte. Selon la légende, Konrad Von Carstein en personne s'y était arrêté et avait demandé à manger un poney. Les aubergistes l'avaient dupé avec un veau rôti mais l'écriteau ne racontait pas la fin de l'anecdote et restait ouvert à toute sorte d'imagination, ce qui ne manquait pas de me faire sourire. Au moins il y avait entre ces murs une sorte d'humour morbide qui finit de me convaincre de pousser la porte.
Le vent froid fit brièvement irruption avec moi dans la grande salle et une paire de clients se retournèrent. La pièce était à moitié remplie et les consommateurs plutôt aisés à en juger par leurs pourpoints colorés. De la viande grillée et nombre de chopes d'étain emplissaient les tables et me faisaient saliver d'avance. Je fit particulièrement attention à mon entrée en scène et affichait avec l'entrainement de l'habitude l'air confiant mais décontracté de l'officier qui avait l'habitude d'être obéi. Ma tenue avait beau être poussiéreuse, elle n'en restait pas moins exotique et mon petit numéro porta ses fruits car ce fut une serveuse et non un des videurs qui s'avança pour m'accueillir.
Je réservais une chambre avec verrou, un luxe facturé à prix d'or dans ces régions excentrées et demandais à ce que les affaires que j'avais laissées à l'écurie me soient apportées. Quelques dizaines de minutes plus tard, mes bagages arrivèrent et je pus enfin goûter au repos bien mérité. La chambre était propre et chaude, heureusement, étant donné que j'y avais mis le prix. Un accès sur le couloir, un autre sur la rue via les toits de l'auberge qui pouvait avoir son utilité en cas d'évacuation rapide. Il n'y avait pas d'autre précautions à prendre pour le moment excepté garder ma cotte de maille sous mes vêtements et de tout faire pour rester vif et concentré, ce qui passait par l'alimentation et le repos. Le premier besoin fut rapidement comblé lorsque je descendais dans la grande salle pour m'y mêler à l'environnement si particulier de cette ville.
Comme je l'avais déjà remarqué, la salle était à moitié pleine, au total dix personnes, sept clients, deux servantes et une armoire à glace plantée devant la porte du fond. Les cicatrices de ce dernier semblaient indiquer que son travail n'était pas uniquement dû à sa stature et en faisaient une menace potentielle. Les tenues et postures aguicheuses des filles de services en disaient également long sur le genre de services qu'elles pouvaient offrir une fois le service terminé, ce qui pouvait être un danger à long terme sur le repos du corps et de l'âme. Quant aux autres, ils semblaient opulents, déjà bien arrosés et après m'être accordé quelques courtes secondes de réflexions, je me joignis à eux.
De mes précédents contacts avec les locaux, j'avais retiré quelques rudiments d'étiquette régionale. A bien des égards, certains cultes sont bien plus accueillants que les Osterlandër refrognés et hostiles mais il suffisait de savoir s'y prendre. Quelques Reikmarks ou un soupçon d'autorité peuvent suffire pour persuader un paysan grincheux de vous héberger, mais gagner la confiance de marchants déjà assez gras et pourvus en métaux précieux requière une tout autre approche. Il faut savoir dans ces cas deviner les intérêts, orientations politiques de vos interlocuteurs et ceci est d'autant plus indispensable dans le cas d'une conversation que vous voulez désintéressée. Et à moins d'être capable de lire les esprits, il est conseillé d'être capable d'improvisation et d'adaptation. Par exemple, les commerçants, marchands et petits bourgeois ont à cœur leurs propres intérêts et verront probablement d'un mauvais œil toute augmentation de taxes et impôts décidés par les têtes pensantes de la ville.
Le Comte Hans Von Oesterlen était, à mon humble avis, une des meilleur chose qui soit arrivé à la cité depuis bien longtemps. Il avait la stature d'un dirigeant, l'autorité d'un officier et quelques lauriers à son actif mais son attachement à reconstruire sa ville avec l'argent des commerçants le rendait quelque peu impopulaire auprès ce cette tranche de la population. Il se trouve également qu'en matière de dirigeants impopulaires, mon Averland avait été fort bien pourvu et j'avais donc de nombreuses critiques et histoires plus ou moins authentiques à raconter...
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- Ce ne sont que des foutaises!
- Absolument pas Herr Jurgen répondis-je calmement en fixant ma choppe d'un regard absent.
Je me remémorais les derniers détails de mon histoire et poursuivi à voix haute:
- Le Comte Leidorf, Electeur Imperial a bel et bien déclaré la guerre à une race d'hommes-poissons imaginaires car ils lui avaient volé ses sels de bains, et en trois occasions!
- Et le conseil a approuvé? il y a bien des conseillers à la cour de votre comte, non? fit remarquer un deuxième homme. Celui-ci se nommait Gerhart et était notaire à ce que j'avais pu comprendre. Il devait être habitué aux intrigues et manipulations car il se montrait particulièrement méfiant.
- Vous savez bien Herr Gerhart, plus c'est gros et excentrique, plus ça passe, grimaçais-je. Quant aux soi-disant conseillers, ils laissaient Leidorf faire ce qu'il voulait pourvu qu'il les laisse gouverner et se servir dans les caisses...
Ce n'était pas totalement vrai mais ce mélange de flatterie et d'ennemi commun sembla faire son petit effet. Il se détendit assez pour ne pas poser de questions supplémentaires mais garda son air maussade.
- Et vous dites que vous avez travaillé pour ce Leidorf? Comme cela devait être excitant! demanda un troisième jeune homme, plus curieux que les autres. Je me fit pensif et amer pour lui répondre.
- Pas tant que cela en réalité, il m'a fallu trouver des objets inexistants, fabriquer et empailler des animaux imaginaires mais le pire était l'escorte des sels de bains du Comte. Il exigeait qu'ils voyagent lentement et uniquement sous un ciel sans nuages pour ne pas qu'ils perdent leur propriétés... Pas le genre de chose qu'un soldat rêve de faire, pas vrai?!
Mes camarades de tablée émirent de petits rires narquois et se resservirent à boire dans leurs choppes mais cette fois, remplirent la mienne en même temps. Peut-être n'étais-je pas encore accepté mais au moins toléré, ce qui restait relativement rare comme Gerhart me l'avait ironiquement fait remarquer. Malheureusement, le temps et la force de poursuivre cette agréable entrevue commençaient à me manquer. La nuit était déjà bien avancée et mes objectifs étaient largement atteints, même si pour cela j'avais du prendre quelques libertés avec mon code de conduite. L'ivresse se faisait de plus en plus présente et je pris congé de mes compagnons qui en profitèrent pour me lancer quelques remarques acerbes à propos de résistance à l'alcool. Je les acceptais de bon gré et m'engouffrais à l'étage jusqu'à ma chambre.
La marque sur la poignée de la porte n'avait pas bougé et rien n'avait été déplacé dans la chambre. Je n'étais pas particulièrement méfiant mais ce tout petit effort de mémorisation peut sonner l'alarme avant qu'il ne soit trop tard, même si l'interprétation de ces signes reste à la charge de celui qui pratique. Quelqu'un fouillant une chambre peut tout aussi bien être un anonyme cambrioleur qu'un dangereux sectateur en repérage et inversement...
Mais ce soir, le lit n'était pas piégé et il était la seule chose que je souhaitais fréquenter pour le moment.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mar 15 Mai 2012 - 21:50
Ah... Un petit texte charmant
A part une ou deux virgules qui manquent, le reste était très agréable à lire.
PS : merci de faire vivre cette belle section récits en cette période. Thomov pensait que mon retour allait la faire revivre, mais le BAC n'est pas forcément un allié pour se genre d'objectif...
A part une ou deux virgules qui manquent, le reste était très agréable à lire.
PS : merci de faire vivre cette belle section récits en cette période. Thomov pensait que mon retour allait la faire revivre, mais le BAC n'est pas forcément un allié pour se genre d'objectif...
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mar 22 Mai 2012 - 13:58
Yop, yop, yop!
Toujours pas complètement remis à jour, mais je rattrape mon retard tout doucement.
Le chapitre trois est très savoureux je dois dire. Cette dynamique de suivre les deux histoires en parallèle risque de se montrer fort intéressante.
Je lis le reste dès que j'ai un moment
Toujours pas complètement remis à jour, mais je rattrape mon retard tout doucement.
Le chapitre trois est très savoureux je dois dire. Cette dynamique de suivre les deux histoires en parallèle risque de se montrer fort intéressante.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Dim 30 Sep 2012 - 19:41
Ce concours récit n'a mit en appétit... Voilà donc une petite suite, initiée il y a fort longtemps et achevée en parallèle de la participation au récit
Contrarié, c'était le mot. Alexandre était contrarié et trop absorbé dans ses pensées pour prêter attention à son trajet depuis qu'il avait quitté le théâtre avant la fin de la représentation. Son manteau de velours sombre flottait dans son dos alors qu'il arpentait les allées tel un fantôme, indifférent aux mendiants et aux ivrognes qui jonchaient les rues. La représentation de Kurt et Kabel, réécrite par ce damné Tiléen de Guimo Holztsein avait été d'une consternante niaiserie, pire que tout ce qu'il avait pu imaginer. Une apologie de la ferveur religieuse, et de la supériorité de l'humanité sur le reste. Une propagande honteuse qui faisait la joie des prêtres les plus conservateurs mais d'un goût artistique plus que douteux. Heureusement qu'il connaissait dans cette ville des lieux où se produisaient des artistes dignes d'être écoutés.
Les rues du quartier marchant étaient étroites mais très fréquentée la nuit car près d'un bâtiment sur trois était une échoppe ou une taverne. Ca et là, des groupes d'ouvriers et de fermiers sifflaient les filles de joies et des chants, mélodieux ou non, emplissaient l'air. Les senteurs de tabac se mêlaient à la sueur et à la crasse urbaine en ces lieux où toutes les classes sociales se rencontraient. Le vampire bifurqua dans une allée plus large ornée de piliers délabrés sur lesquels le blason Von Carstein était couvert de graffitis. Il croisa un groupe de soldats ivres vêtus de bonnets de fourrure kislevites qui le bousculèrent sans lui prêter la moindre attention et laissaiant planer derrière eux des effluves de kvas. Les mercenaires s'éparpillèrent sur la grande place dans une cacophonie de chansons à boire sous le regard désabusé de la milice. La nuit n'était pas assez avancée pour que ces derniers soient ivres morts mais cela ne saurait tarder.
De l'autre coté de la rue se dressait un imposant bâtiment bâti comme un château avec de hautes grilles de fer en guise de murailles. Derrière ses hautes fenêtres, une réception battait son plein, des mets raffinés étaient servis, les nobles se rencontraient et complotaient, leurs visages dissimulés derrière des subterfuges de bonnes manières aussi surement que s'ils avaient des masques de bal. Il n'y avait en ces lieux que des humains, de simples sacs à viande indifférents au sort de ceux qui les faisaient vivre et qui pourtant faisaient preuve d'un indécent sentiment de supériorité. Il lança un regard indulgent et ironique aux fêtards masqués. Qui étaient les vrais parasites dans cette ville? La musique parvint à ses oreilles exercées, harmonieuse, une performance technique mais sans âme. C'était une mélodie interprétée par une marionnette qui n'était plus libre de donner de son être dans son œuvre. Lui-même avait eu bien assez de décennies d'entrainement pour égaler ce genre de pantin mais il manquait cruellement de créativité lorsqu'il s'agissait de composer ou improviser. Il était semblable à un onyx parfaitement taillé mais ce qu’il recherchait, c’était ce diamant brut, encore prisonnier de la roche où il s'était patiemment épanoui et trop précieux pour y exercer la moindre contrainte.
Ses yeux perçants trouvèrent enfin le petit escalier de pierre, à peine éclairé d'une bougie tremblante qui s'enfonçait sous une maison à l'aspect délabré. Alexandre descendit les marches posa les mains sur le sol et écouta. A l'intérieur, une voix féminine entonnait ces vieux chants traditionnels dont les airs étaient profondément gravés en lui. Il reconnu le Karobneiki, l'histoire de la mythique création des terres gelées de Kislev et de ses premiers habitants. Les battements sourds de dizaines de pieds et de voix plus graves résonnaient dans les pierres en écho à l'hymne de la chanteuse. La nuit d'Essen laissa place aux rues de Praag et Kislev envahies de cavaliers ailés aux mailles brillantes partant en guerre sous les premiers soleils printaniers. Les femmes et enfants en pleurs se massaient autours d'eux pour lancer des gerbes de fleurs et espérer leur retour après les combats contre les maraudeurs du nord. Alexandre pouvait presque y être, partageant leur tristesse et leurs espoirs alors qu’il laissait les paroles le frapper comme les vagues sur un immuable rocher.
Il resta là de longues minutes jusqu'à ce que d'autres pas, d'autres chants ne viennent dans sa direction, et ne rompent le charme. Les vibrations et les voix sur lesquelles il était concentré se troublèrent et il siffla de dépit devant l'intrusion de ces profanateurs. Puis sa colère naissant se résorba d'elle-même, ses crocs se rétractèrent dans sa bouche fermée et ses yeux se posèrent sur la porte, une simple barrière de bois fragile mais paradoxalement une des plus puissantes protections contre lui. Il tourna les talons et disparu dans les ombres comme le spectre qu’il était, sans autre bruit qu’un long soupir.
La nouvelle tomba deux jours plus tard et ce qui s’annonçait comme un mois des plus tranquille ne fut plus qu’un lointain espoir. Le coup de sifflet avait retentit en fin d’après midi alors que l’astre solaire prenait un repos anticipé derrière les nuages noires qui s’accumulaient au dessus des noires forêts du Talabecland. Un de ces sifflets spéciaux que seul lui pouvait entendre et qu’il avait remis à ses serviteurs en cas de menace. La note aigue correspondait à l’instrument d’Orléan, la servante qui tenait la boutique de négoce de grains et avait percé plusieurs mètres de roche pour ensuite résonner dans sa crypte. L’état de concentration extrême dans lequel il était plongé éclata comme un vitrail de cristal soufflé par une explosion et il leva les yeux des plans constellés de lignes, d’arc de cercle et de calculs ésotériques. Il fut un instant en colère d’avoir été tiré aussi brutalement de sa contemplation, tout en sachant pertinemment que cela faisait plusieurs heures qu’il fixait les schémas sans même les voir. Une pause était de toute façon nécessaire, que se soit pour son esprit ou pour son laboratoire qui débordait de projets en cours et d’inventions inconnues inachevées. Il se leva de sa chaise et se mit à arpenter le hall de pierre toujours illuminé. Il passait rapidement d’un objet à un autre, les rangeait selon un ordre que lui seul pouvait connaitre et ce faisant, tentait de faire de même avec ses idées.
Etrange, personne d’autre n’avait rien signalé, pourquoi elle ? Pourquoi cette boutique particulière ? De vieux engrenages se mirent à tourner dans sa tête, enclenchant toujours plus de roues au fur et à mesure que son raisonnement suivait son fil. Elle avait beau être jeune et inexpérimentée, elle connaissait les règles. Quelque chose l’avait interpelé, quelque chose que tous ses serviteurs, Gregor comprit, n’avaient pas vu. La solution lui apparut mais il regretta bien vite de ne pas s’être trompé. Elle connaissait les codes, il lui avait lui-même appris ! Il se félicita de la clairvoyance qui avait été sienne lorsqu’il avait remplacé le vieux chasseur de sorcières qui tenait la place de négoce marqué du fer à cheval par un de propres serviteurs, bien qu’en ces temps, il doutait que quiconque parmi ses ennemis utilise encore ce vieux langage codé.
Morr, Taal, Ursunn et Sigmar réunis ! Un foutu chasseur de sorcière se promenait dans sa ville !
Alexandre restait impassible alors qu’il analysait les choix qui s’offraient à lui. Son système d’alarme avait parfaitement fonctionné mais il état également possible que la brève entrevue d’Orlean avec le chasseur n’ai été qu’un appât destiné à faire sortir de l’ombre le vieux vampire. Qui pouvait avoir intérêt à la voir mort et bien mort ? La liste était bien trop longue et ses sœurs lahmianes y figuraient en nombre bien trop important. Si tel était le cas, les retrouvailles familiales s’annonçaient d’ors et déjà explosives…
CHAPITRE CINQ
Contrarié, c'était le mot. Alexandre était contrarié et trop absorbé dans ses pensées pour prêter attention à son trajet depuis qu'il avait quitté le théâtre avant la fin de la représentation. Son manteau de velours sombre flottait dans son dos alors qu'il arpentait les allées tel un fantôme, indifférent aux mendiants et aux ivrognes qui jonchaient les rues. La représentation de Kurt et Kabel, réécrite par ce damné Tiléen de Guimo Holztsein avait été d'une consternante niaiserie, pire que tout ce qu'il avait pu imaginer. Une apologie de la ferveur religieuse, et de la supériorité de l'humanité sur le reste. Une propagande honteuse qui faisait la joie des prêtres les plus conservateurs mais d'un goût artistique plus que douteux. Heureusement qu'il connaissait dans cette ville des lieux où se produisaient des artistes dignes d'être écoutés.
Les rues du quartier marchant étaient étroites mais très fréquentée la nuit car près d'un bâtiment sur trois était une échoppe ou une taverne. Ca et là, des groupes d'ouvriers et de fermiers sifflaient les filles de joies et des chants, mélodieux ou non, emplissaient l'air. Les senteurs de tabac se mêlaient à la sueur et à la crasse urbaine en ces lieux où toutes les classes sociales se rencontraient. Le vampire bifurqua dans une allée plus large ornée de piliers délabrés sur lesquels le blason Von Carstein était couvert de graffitis. Il croisa un groupe de soldats ivres vêtus de bonnets de fourrure kislevites qui le bousculèrent sans lui prêter la moindre attention et laissaiant planer derrière eux des effluves de kvas. Les mercenaires s'éparpillèrent sur la grande place dans une cacophonie de chansons à boire sous le regard désabusé de la milice. La nuit n'était pas assez avancée pour que ces derniers soient ivres morts mais cela ne saurait tarder.
De l'autre coté de la rue se dressait un imposant bâtiment bâti comme un château avec de hautes grilles de fer en guise de murailles. Derrière ses hautes fenêtres, une réception battait son plein, des mets raffinés étaient servis, les nobles se rencontraient et complotaient, leurs visages dissimulés derrière des subterfuges de bonnes manières aussi surement que s'ils avaient des masques de bal. Il n'y avait en ces lieux que des humains, de simples sacs à viande indifférents au sort de ceux qui les faisaient vivre et qui pourtant faisaient preuve d'un indécent sentiment de supériorité. Il lança un regard indulgent et ironique aux fêtards masqués. Qui étaient les vrais parasites dans cette ville? La musique parvint à ses oreilles exercées, harmonieuse, une performance technique mais sans âme. C'était une mélodie interprétée par une marionnette qui n'était plus libre de donner de son être dans son œuvre. Lui-même avait eu bien assez de décennies d'entrainement pour égaler ce genre de pantin mais il manquait cruellement de créativité lorsqu'il s'agissait de composer ou improviser. Il était semblable à un onyx parfaitement taillé mais ce qu’il recherchait, c’était ce diamant brut, encore prisonnier de la roche où il s'était patiemment épanoui et trop précieux pour y exercer la moindre contrainte.
Ses yeux perçants trouvèrent enfin le petit escalier de pierre, à peine éclairé d'une bougie tremblante qui s'enfonçait sous une maison à l'aspect délabré. Alexandre descendit les marches posa les mains sur le sol et écouta. A l'intérieur, une voix féminine entonnait ces vieux chants traditionnels dont les airs étaient profondément gravés en lui. Il reconnu le Karobneiki, l'histoire de la mythique création des terres gelées de Kislev et de ses premiers habitants. Les battements sourds de dizaines de pieds et de voix plus graves résonnaient dans les pierres en écho à l'hymne de la chanteuse. La nuit d'Essen laissa place aux rues de Praag et Kislev envahies de cavaliers ailés aux mailles brillantes partant en guerre sous les premiers soleils printaniers. Les femmes et enfants en pleurs se massaient autours d'eux pour lancer des gerbes de fleurs et espérer leur retour après les combats contre les maraudeurs du nord. Alexandre pouvait presque y être, partageant leur tristesse et leurs espoirs alors qu’il laissait les paroles le frapper comme les vagues sur un immuable rocher.
Il resta là de longues minutes jusqu'à ce que d'autres pas, d'autres chants ne viennent dans sa direction, et ne rompent le charme. Les vibrations et les voix sur lesquelles il était concentré se troublèrent et il siffla de dépit devant l'intrusion de ces profanateurs. Puis sa colère naissant se résorba d'elle-même, ses crocs se rétractèrent dans sa bouche fermée et ses yeux se posèrent sur la porte, une simple barrière de bois fragile mais paradoxalement une des plus puissantes protections contre lui. Il tourna les talons et disparu dans les ombres comme le spectre qu’il était, sans autre bruit qu’un long soupir.
La nouvelle tomba deux jours plus tard et ce qui s’annonçait comme un mois des plus tranquille ne fut plus qu’un lointain espoir. Le coup de sifflet avait retentit en fin d’après midi alors que l’astre solaire prenait un repos anticipé derrière les nuages noires qui s’accumulaient au dessus des noires forêts du Talabecland. Un de ces sifflets spéciaux que seul lui pouvait entendre et qu’il avait remis à ses serviteurs en cas de menace. La note aigue correspondait à l’instrument d’Orléan, la servante qui tenait la boutique de négoce de grains et avait percé plusieurs mètres de roche pour ensuite résonner dans sa crypte. L’état de concentration extrême dans lequel il était plongé éclata comme un vitrail de cristal soufflé par une explosion et il leva les yeux des plans constellés de lignes, d’arc de cercle et de calculs ésotériques. Il fut un instant en colère d’avoir été tiré aussi brutalement de sa contemplation, tout en sachant pertinemment que cela faisait plusieurs heures qu’il fixait les schémas sans même les voir. Une pause était de toute façon nécessaire, que se soit pour son esprit ou pour son laboratoire qui débordait de projets en cours et d’inventions inconnues inachevées. Il se leva de sa chaise et se mit à arpenter le hall de pierre toujours illuminé. Il passait rapidement d’un objet à un autre, les rangeait selon un ordre que lui seul pouvait connaitre et ce faisant, tentait de faire de même avec ses idées.
Etrange, personne d’autre n’avait rien signalé, pourquoi elle ? Pourquoi cette boutique particulière ? De vieux engrenages se mirent à tourner dans sa tête, enclenchant toujours plus de roues au fur et à mesure que son raisonnement suivait son fil. Elle avait beau être jeune et inexpérimentée, elle connaissait les règles. Quelque chose l’avait interpelé, quelque chose que tous ses serviteurs, Gregor comprit, n’avaient pas vu. La solution lui apparut mais il regretta bien vite de ne pas s’être trompé. Elle connaissait les codes, il lui avait lui-même appris ! Il se félicita de la clairvoyance qui avait été sienne lorsqu’il avait remplacé le vieux chasseur de sorcières qui tenait la place de négoce marqué du fer à cheval par un de propres serviteurs, bien qu’en ces temps, il doutait que quiconque parmi ses ennemis utilise encore ce vieux langage codé.
Morr, Taal, Ursunn et Sigmar réunis ! Un foutu chasseur de sorcière se promenait dans sa ville !
Alexandre restait impassible alors qu’il analysait les choix qui s’offraient à lui. Son système d’alarme avait parfaitement fonctionné mais il état également possible que la brève entrevue d’Orlean avec le chasseur n’ai été qu’un appât destiné à faire sortir de l’ombre le vieux vampire. Qui pouvait avoir intérêt à la voir mort et bien mort ? La liste était bien trop longue et ses sœurs lahmianes y figuraient en nombre bien trop important. Si tel était le cas, les retrouvailles familiales s’annonçaient d’ors et déjà explosives…
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mar 2 Oct 2012 - 19:50
Le retour d'Alexandre ! Je ne sais pas pourquoi, mais je le préfère au purificateur
D'ailleurs, les initiales A. M. ne viendraient-elles pas d'Alexandre Malvoisier ?
J'ai hâte d'avoir la suite, j'aime quand les Lahmianes s'en mêlent
Suite !
D'ailleurs, les initiales A. M. ne viendraient-elles pas d'Alexandre Malvoisier ?
J'ai hâte d'avoir la suite, j'aime quand les Lahmianes s'en mêlent
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mar 6 Nov 2012 - 19:04
La résistance s'organise! A bas l'Empire!
Ceci dit, je ne suis pas extrêmement satisfait du rendu des dialogues. J'espère qu'ils sont assez clairs et qu'il n'y a aucune ambiguïté sur qui parle et quand...
Le Nachrimordheim était un gîte bâti pour héberger les paysans qui venaient à la ville travailler les terres du printemps à l’automne. Il était déserté de sa main d’œuvre en plein hiver mais les propriétaires terriens s’y retrouvaient parfois pour planifier les cultures de l’année suivante et décider des ventes des surplus de stocks de grain. Les personnes présentes cette soirée-ci étaient parfaitement capable de prendre ce genre de décision et c’est ce qui faisait de cette réunion la plus parfaite des couvertures. La salle, située au troisième étage était circulaire et flanquée de colonnades où se devinaient des blasons à moitié effacés. Malgré le feu qui ronronnait doucement dans l’âtre au centre de la pièce et réchauffait les corps des participants, l’atmosphère était glaciale.
De fugaces regards où se lisait l’inquiétude se croisaient, puis les yeux se baissaient quelques secondes et recommençaient leur manège. Tous avaient des raisons d’êtres inquiets, cette réunion n’était pas prévue et la convocation laissait entendre que Malvoisier lui-même serait là. La jeune Orlean était de loin la plus agitée et jetait des regards implorants en direction de sa sœur ainée Angouleme qui tentait sans grand succès de la réconforter. Toutes deux avaient longtemps voyagé avec la caravane familiale avant qu’une attaque de bandits ne les prive de leurs parents alors qu’elles n’avaient qu’une dizaine d’années. Elles n’auraient guère vécu plus longtemps si Gregor ne les avait pas ramassées alors qu’elles tentaient de se cacher dans une étable pour échapper au froid. C’était il y a plus de quinze ans et elles n’avaient jamais voulu repartir, même lorsqu’elles découvrirent la vérité sur l’être qu’elles servaient. Angouleme assimila avec une étonnante facilité les rudiments du calcul et de l’écriture et se vit confié la tâche de remplir les livres de compte des différentes activités et propriétés d’Alexandre Malvoisier. Quant à Orlean, elle démontra de réels dons pour les langues et son maitre lui enseigna plusieurs langages secrets en espérant qu’elle saurait les reconnaitre.
L’homme assis à leur droite répondait au nom de Yelov Rhenser, un homme plutôt petit et trapu à la coupe rase et aux traits anguleux qui portait des bottes de cavalier et un long gambison gris clair frappé au cœur d’une bougie brodée de fils d’or. Il avait la réputation d’être un guerrier redoutable, aussi féroce au combat que pour défendre les intérêts politiques de l’Ordre de la Lumière Eternelle. Ses bras étaient glissés dans de larges manches bouffantes resserrées par des lanières de cuir et reposaient, un sur la garde de son épée et l’autre sur la table de chêne. Ensuite venait la figure bien connue de Gregor qui avait troqué son habit de maitre d’hôtel pour une tenue de voyage. Un manteau de fourrure était passé sur le dossier de son fauteuil comme s’il se préparait à partir et il paraissait avoir pris dix ans depuis la dernière semaine qu’il avait passé à ratisser la ville et interroger ses agents. Il affichait ouvertement son air préoccupé et était en pleine conversation avec un troisième homme au moins aussi vieux que lui et richement habillé. Il ne agissait ni plus ni moins que de Leo Von Graf, le propre chambellan du comte Von Oesterlen. Qu’une figure si importante de la ville soit présente signifiait que leur maitre prenait cette menace très au sérieux, voir qu’il parvenait à en anticiper de nouvelles bien plus inquiétantes et aucune de ces possibilité ne les réjouissait.
La porte de la salle s’ouvrit à la volée et arracha un sursaut à l’assemblée. Nul n’avait entendu les escaliers grincer ni le loquet tourner. Leur maitre s’avança enfin dans la lumière, sa présence moins imposante que par le passé même s’il restait aussi séduisant qu’à l’accoutumé. Un port altier et un visage noble, de hautes pommettes qui mettait en valeur ses yeux vert émeraude et de longs cheveux noirs attachés dans leur longueur par ruban de soie blanche tressé. Il dévisagea chacun des conjurés qui baissèrent instinctivement les yeux en signe de soumission face au grand prédateur qu’il était. Il prit un fauteuil et s’installa entre De Graf et Gregor avant d’enfin rompre le silence de sa voix suave et centenaire en adressant un sourire complice à ses agents.
- Mes amis, merci d’avoir pu vous libérer et me consacrer un petit peu de votre précieux temps…
Bien entendu, il savait que sa volonté faisait loi et que tous désiraient probablement être partout sauf ici, à tenter de comprendre la nature la menace qui planait sur lui. De petits rires courtois fusèrent néanmoins et l’ambiance parut se réchauffer.
- Comme vous le savez, repris-il, un élément étranger s’est introduit en ville à une date inconnu et a été… repéré alors qu’il tentait de prendre contact avec un agent aujourd’hui décédé du Marteau d’Argent.
- Ser ? Comment ce répurgateur a-t-il été identifié ? hasarda De Graf après un moment de silence.
- Excellente question et je vous remercie de l’avoir posé mon cher… Orlean, mon enfant pourriez-vous nous raconter votre exploit ?
La jeune femme nerveuse parvint à se ressaisir et se leva pour faire face à l’assemblée. Elle prit une grande inspiration et commença à réciter le discours qu’elle avait soigneusement préparé en vue de ce moment.
- Ser. Il y a six jours, un homme vêtu comme un moine en robe s’est présenté au comptoir et à commencé à parler aux employés. Il se présenta comme Frère Stinner du monastère de Sarceroff. Il demanda à ce que puisse lui être vendu du bois car ses frères ne pouvaient aller en couper à cause des loups. Ensuite il demanda soixante livres de grain pour remplacer leurs provisions qui avaient été dévorées par les rats.
Orlean avala difficilement sa salive et chercha l’assentiment de sa sœur qui guettait la réaction de Malvoisier mais ce fut Rhenser qui l’interpela :
- Est-ce là tout ce que nous avons ? Un moine passant commande pour des provisions d’hiver ? Toute cette panique parce qu’une petite écervelée a vendu du bois et du grain ?! Ser, ce n’est pas sérieux !
- Et pourtant cela me suffit Yelov, le coupa calmement Alexandre. Le vampire reporta son attention sur Orlean, tendue et au bord des larmes suite à l’altercation. Rasseyez-vous mon enfant, et veuillez excuser Sir Rhenser. Il est simplement un peu trop zélé quand l’heure est à la réflexion.
Il appuya cette dernière remarque d’un regard autoritaire qui ôta au Templier toute volonté de poursuivre le débat. Il marqua une nouvelle pause ponctuée d’un imperceptible soupire
- J’ai formé Orlean précisément pour ce moment et elle ne m’a pas déçu. Tous ceux qui ne sont pas versé dans la science des langues secrètes ne peuvent rien y déceler et c’est ce qui fait tout son intérêt. Ce code est simple, il fonctionne par association d’idée, expliqua-t-il à l’assemblée dubitative. Nous avons dans la même phrase vendu, bois et loup soit l’association chasse corruption et feu… Ensuite rat, provision et remplacer pour discret, renfort et futur. Cela ne laisse pas l’ombre d’un doute pour moi, ça et le fait que les répurgateurs ont une forteresse sous une des iles d’Altdorf et qu’elle est connue d’eux seuls comme le monastère de Sarceroff…
- Le nom qu’il a donné, Ser ? demanda la timide voix d’Angouleme
- Faux, comme le reste, répondit Gregor, et tous les réfugiés portent des haillons avec lesquels rapiécer un capuchon, nous ne sommes même pas sûr qu’il soit bel et bien à un moine, ni à quoi il ressemble tout court.
- Et entre les réfugiés de Kislev, les bouseux Sylvaniens et les mercenaires qui vont et viennent… il peut être n’importe qui, n’importe où… continua Yelov
- Il ne s’est présenté ni aux temples, ni à la commanderie de l’Ordre, acheva De Graf.
- Donc pour faire simple, nous n’avons rien, conclu Malvoisier.
Les autres échangèrent des regards gênés et fixèrent leur maitre en quête d’un début de réponse qui ne tarda pas.
- Je n’avais pas grand espoir de le retrouver ainsi de toute façon… Quelqu’un assez intelligent et discret pour utiliser ce vieux code ne ferait pas l’erreur de se présenter à quiconque comme Répurgateur. Ce qui m’inquiète, ce n’est pas de savoir qu’il est en ce moment dans ma ville, c’est le fait qu’il n’y a aucune raison qu’il y soit, hormis pour moi bien entendu… ajouta le vampire avec une pointe d’agacement à peine voilé dans la voix.
Il laissa à ses serviteurs un bref instant pour surmonter leur angoisse naissante et se plaça face à la fenêtre comme pour admirer quelque chose que lui seul était capable de voir. Puis d’une voix calme et posée, il acheva de donner ses directives sans même regarder ses serviteurs.
- Je veux savoir ce qu’il sait et pourquoi il est là ! Gregor et Yelov, vous vous rendrez à Bechafen, Il y a sans doute fait halte pour se ravitailler s’il vient d’Altdorf. Trouvez-moi tout ce que vous pouvez. Vous en profiterez pour confirmer l’envoi des mille livres de blé demandés par le vicomte. Leo, vous me trouverez tous les écrits des procès pour sorcellerie et hérésie des cinq dernières années. Que tous agissent comme d’accoutumé mais prêtent attention durant les offices et les tribunaux.
Alexandre congédia l’assemblée d’un geste silencieux et le raclement des chaises sur le sol de bois lui fit écho. Ils sortirent en silence, soulagés d’échapper enfin à l’humeur massacrante de leur sombre maitre et le laissèrent seul avec ses doutes et ses questions sans réponses. Dehors, un chasseur attendait, un prédateur traquait et les deux étaient patients. Puisse-t-il ne pas y avoir d’autres mauvaises rencontres, se surprit-il à espérer.
Ceci dit, je ne suis pas extrêmement satisfait du rendu des dialogues. J'espère qu'ils sont assez clairs et qu'il n'y a aucune ambiguïté sur qui parle et quand...
CHAPITRE SIX
Le Nachrimordheim était un gîte bâti pour héberger les paysans qui venaient à la ville travailler les terres du printemps à l’automne. Il était déserté de sa main d’œuvre en plein hiver mais les propriétaires terriens s’y retrouvaient parfois pour planifier les cultures de l’année suivante et décider des ventes des surplus de stocks de grain. Les personnes présentes cette soirée-ci étaient parfaitement capable de prendre ce genre de décision et c’est ce qui faisait de cette réunion la plus parfaite des couvertures. La salle, située au troisième étage était circulaire et flanquée de colonnades où se devinaient des blasons à moitié effacés. Malgré le feu qui ronronnait doucement dans l’âtre au centre de la pièce et réchauffait les corps des participants, l’atmosphère était glaciale.
De fugaces regards où se lisait l’inquiétude se croisaient, puis les yeux se baissaient quelques secondes et recommençaient leur manège. Tous avaient des raisons d’êtres inquiets, cette réunion n’était pas prévue et la convocation laissait entendre que Malvoisier lui-même serait là. La jeune Orlean était de loin la plus agitée et jetait des regards implorants en direction de sa sœur ainée Angouleme qui tentait sans grand succès de la réconforter. Toutes deux avaient longtemps voyagé avec la caravane familiale avant qu’une attaque de bandits ne les prive de leurs parents alors qu’elles n’avaient qu’une dizaine d’années. Elles n’auraient guère vécu plus longtemps si Gregor ne les avait pas ramassées alors qu’elles tentaient de se cacher dans une étable pour échapper au froid. C’était il y a plus de quinze ans et elles n’avaient jamais voulu repartir, même lorsqu’elles découvrirent la vérité sur l’être qu’elles servaient. Angouleme assimila avec une étonnante facilité les rudiments du calcul et de l’écriture et se vit confié la tâche de remplir les livres de compte des différentes activités et propriétés d’Alexandre Malvoisier. Quant à Orlean, elle démontra de réels dons pour les langues et son maitre lui enseigna plusieurs langages secrets en espérant qu’elle saurait les reconnaitre.
L’homme assis à leur droite répondait au nom de Yelov Rhenser, un homme plutôt petit et trapu à la coupe rase et aux traits anguleux qui portait des bottes de cavalier et un long gambison gris clair frappé au cœur d’une bougie brodée de fils d’or. Il avait la réputation d’être un guerrier redoutable, aussi féroce au combat que pour défendre les intérêts politiques de l’Ordre de la Lumière Eternelle. Ses bras étaient glissés dans de larges manches bouffantes resserrées par des lanières de cuir et reposaient, un sur la garde de son épée et l’autre sur la table de chêne. Ensuite venait la figure bien connue de Gregor qui avait troqué son habit de maitre d’hôtel pour une tenue de voyage. Un manteau de fourrure était passé sur le dossier de son fauteuil comme s’il se préparait à partir et il paraissait avoir pris dix ans depuis la dernière semaine qu’il avait passé à ratisser la ville et interroger ses agents. Il affichait ouvertement son air préoccupé et était en pleine conversation avec un troisième homme au moins aussi vieux que lui et richement habillé. Il ne agissait ni plus ni moins que de Leo Von Graf, le propre chambellan du comte Von Oesterlen. Qu’une figure si importante de la ville soit présente signifiait que leur maitre prenait cette menace très au sérieux, voir qu’il parvenait à en anticiper de nouvelles bien plus inquiétantes et aucune de ces possibilité ne les réjouissait.
La porte de la salle s’ouvrit à la volée et arracha un sursaut à l’assemblée. Nul n’avait entendu les escaliers grincer ni le loquet tourner. Leur maitre s’avança enfin dans la lumière, sa présence moins imposante que par le passé même s’il restait aussi séduisant qu’à l’accoutumé. Un port altier et un visage noble, de hautes pommettes qui mettait en valeur ses yeux vert émeraude et de longs cheveux noirs attachés dans leur longueur par ruban de soie blanche tressé. Il dévisagea chacun des conjurés qui baissèrent instinctivement les yeux en signe de soumission face au grand prédateur qu’il était. Il prit un fauteuil et s’installa entre De Graf et Gregor avant d’enfin rompre le silence de sa voix suave et centenaire en adressant un sourire complice à ses agents.
- Mes amis, merci d’avoir pu vous libérer et me consacrer un petit peu de votre précieux temps…
Bien entendu, il savait que sa volonté faisait loi et que tous désiraient probablement être partout sauf ici, à tenter de comprendre la nature la menace qui planait sur lui. De petits rires courtois fusèrent néanmoins et l’ambiance parut se réchauffer.
- Comme vous le savez, repris-il, un élément étranger s’est introduit en ville à une date inconnu et a été… repéré alors qu’il tentait de prendre contact avec un agent aujourd’hui décédé du Marteau d’Argent.
- Ser ? Comment ce répurgateur a-t-il été identifié ? hasarda De Graf après un moment de silence.
- Excellente question et je vous remercie de l’avoir posé mon cher… Orlean, mon enfant pourriez-vous nous raconter votre exploit ?
La jeune femme nerveuse parvint à se ressaisir et se leva pour faire face à l’assemblée. Elle prit une grande inspiration et commença à réciter le discours qu’elle avait soigneusement préparé en vue de ce moment.
- Ser. Il y a six jours, un homme vêtu comme un moine en robe s’est présenté au comptoir et à commencé à parler aux employés. Il se présenta comme Frère Stinner du monastère de Sarceroff. Il demanda à ce que puisse lui être vendu du bois car ses frères ne pouvaient aller en couper à cause des loups. Ensuite il demanda soixante livres de grain pour remplacer leurs provisions qui avaient été dévorées par les rats.
Orlean avala difficilement sa salive et chercha l’assentiment de sa sœur qui guettait la réaction de Malvoisier mais ce fut Rhenser qui l’interpela :
- Est-ce là tout ce que nous avons ? Un moine passant commande pour des provisions d’hiver ? Toute cette panique parce qu’une petite écervelée a vendu du bois et du grain ?! Ser, ce n’est pas sérieux !
- Et pourtant cela me suffit Yelov, le coupa calmement Alexandre. Le vampire reporta son attention sur Orlean, tendue et au bord des larmes suite à l’altercation. Rasseyez-vous mon enfant, et veuillez excuser Sir Rhenser. Il est simplement un peu trop zélé quand l’heure est à la réflexion.
Il appuya cette dernière remarque d’un regard autoritaire qui ôta au Templier toute volonté de poursuivre le débat. Il marqua une nouvelle pause ponctuée d’un imperceptible soupire
- J’ai formé Orlean précisément pour ce moment et elle ne m’a pas déçu. Tous ceux qui ne sont pas versé dans la science des langues secrètes ne peuvent rien y déceler et c’est ce qui fait tout son intérêt. Ce code est simple, il fonctionne par association d’idée, expliqua-t-il à l’assemblée dubitative. Nous avons dans la même phrase vendu, bois et loup soit l’association chasse corruption et feu… Ensuite rat, provision et remplacer pour discret, renfort et futur. Cela ne laisse pas l’ombre d’un doute pour moi, ça et le fait que les répurgateurs ont une forteresse sous une des iles d’Altdorf et qu’elle est connue d’eux seuls comme le monastère de Sarceroff…
- Le nom qu’il a donné, Ser ? demanda la timide voix d’Angouleme
- Faux, comme le reste, répondit Gregor, et tous les réfugiés portent des haillons avec lesquels rapiécer un capuchon, nous ne sommes même pas sûr qu’il soit bel et bien à un moine, ni à quoi il ressemble tout court.
- Et entre les réfugiés de Kislev, les bouseux Sylvaniens et les mercenaires qui vont et viennent… il peut être n’importe qui, n’importe où… continua Yelov
- Il ne s’est présenté ni aux temples, ni à la commanderie de l’Ordre, acheva De Graf.
- Donc pour faire simple, nous n’avons rien, conclu Malvoisier.
Les autres échangèrent des regards gênés et fixèrent leur maitre en quête d’un début de réponse qui ne tarda pas.
- Je n’avais pas grand espoir de le retrouver ainsi de toute façon… Quelqu’un assez intelligent et discret pour utiliser ce vieux code ne ferait pas l’erreur de se présenter à quiconque comme Répurgateur. Ce qui m’inquiète, ce n’est pas de savoir qu’il est en ce moment dans ma ville, c’est le fait qu’il n’y a aucune raison qu’il y soit, hormis pour moi bien entendu… ajouta le vampire avec une pointe d’agacement à peine voilé dans la voix.
Il laissa à ses serviteurs un bref instant pour surmonter leur angoisse naissante et se plaça face à la fenêtre comme pour admirer quelque chose que lui seul était capable de voir. Puis d’une voix calme et posée, il acheva de donner ses directives sans même regarder ses serviteurs.
- Je veux savoir ce qu’il sait et pourquoi il est là ! Gregor et Yelov, vous vous rendrez à Bechafen, Il y a sans doute fait halte pour se ravitailler s’il vient d’Altdorf. Trouvez-moi tout ce que vous pouvez. Vous en profiterez pour confirmer l’envoi des mille livres de blé demandés par le vicomte. Leo, vous me trouverez tous les écrits des procès pour sorcellerie et hérésie des cinq dernières années. Que tous agissent comme d’accoutumé mais prêtent attention durant les offices et les tribunaux.
Alexandre congédia l’assemblée d’un geste silencieux et le raclement des chaises sur le sol de bois lui fit écho. Ils sortirent en silence, soulagés d’échapper enfin à l’humeur massacrante de leur sombre maitre et le laissèrent seul avec ses doutes et ses questions sans réponses. Dehors, un chasseur attendait, un prédateur traquait et les deux étaient patients. Puisse-t-il ne pas y avoir d’autres mauvaises rencontres, se surprit-il à espérer.
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Seulement de nos jours il y a de moins en moins de techniciens pour le combat à pied. L'esprit fantassin n'existe plus. C'est un tort.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 10 Nov 2012 - 14:09
Suite très intéressante
A part quelques points manquants, cela est toujours aussi agréable de te lire
Suite !!
A part quelques points manquants, cela est toujours aussi agréable de te lire
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- SenghienGarde des cryptes
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Dim 30 Déc 2012 - 15:57
Petit retour sur notre ami l'humain qui ne chôme pas non plus...
Lorsque vous débarquez dans un nouveau lieu inconnu et donc hostile où vous souhaitez rester plus de quelques heures, il est préférable de suivre quelques règles élémentaires. Dans mon cas, l’anonymat en est une mais même sans être estampillé Répurgateur, il arrive que les évènements échappent à votre contrôle. Si, où plutôt lorsque cela arrive il est recommandé d’avoir sous la main quelques atouts non dévoilés car, au risque de me répéter, on est jamais plus vulnérable que lorsqu’on se croit en sécurité chez soi. Fort heureusement, il est assez facile d’augmenter vos chances en cas affrontement lorsque vous vous battez sur un terrain que vous avez préparé. J’étais alors installé au premier étage d’un entrepôt qui correspondait à toutes mes attentes, excepté pour le luxe. Herr Jurgen s’était avéré être un riche marchand de vin et autres mets de luxe, particulièrement paranoïaque lorsque qu’il s’agissait de vols de marchandises. Il ne me fallut guère d’astuce pour le convaincre qu’il était plus sage de garder quelqu’un sur les lieux ou d’y installer quelques dispositifs pour prévenir les incursions nocturnes…
L’entrepôt ne comptait qu’une seule entrée surmontée d’une fenêtre de verre. L’accès au niveau supérieur se faisait par un escalier collé au coté est et facilement observable depuis le plancher de l’étage. Les murs de l’entrepôt étaient de bon chêne, solides et renforcés de paille pour empêcher le froid d’entrer. Ceci, ainsi que les braseros du rez-de-chaussée destinés à aider à la préservation des produits faisait de cette remise un lieu bien plus chaud que bien des établissements dotés de cheminées à bois. De plus, tout intrus aurait eu fort à faire avec plusieurs serrures sur chacune des deux portes et il n’y avait presque rien à ajouter à l’exception d’une issue dissimulée et de quelques clochettes d’alarme. Mes quartiers, justes pourvus d’une malle, d’une couche de paille et d’un atelier bien fourni seraient, pour les prochains mois ce qui se rapprocherait le plus de la sécurité.
Votre deuxième tâche, après vous être implanté est de repérer les personnes susceptibles de détenir les bonnes informations. C’est une phase d’observation, plus ou moins longue et pénible. Vous pouvez tout aussi bien guetter dans le froid en pleine hiver, déguisé en mendiant pour identifier les petits criminels locaux avec pour seule chaleur une infecte herbe à fumer moisie, ou bien passer plusieurs jours à manger et boire à l’œil lors de grandes célébrations. Si l’un de ces cadres est plus agréable que l’autre, je ne sais toujours pas lequel est le plus dangereux. Se rapprocher de ces ressources demande ensuite un petit peu d’astuce. Commencer par tisser des liens et en dire juste assez sur vous pour piquer leur intérêt et il y a de fortes chances qu’ils finissent par vous demander des services. Ensuite seulement vous pourrez poser les questions qui vous intéressent. Si vous avez par exemple laissé entendre à un marchand de produits de luxes que vous avez trempé dans des affaires de « commerce détaxé » et autres manœuvres en marge de la loi pour le compte de vos anciens employeurs, alors il vous gardera en mémoire lorsqu’il aura des ennuis. C’est une approche lente et peu fiable, mais qui a le mérite de ne pas éveiller les soupçons. A recommander donc, particulièrement quand vous avez le temps de faire les choses bien.
Les ennuis arrivèrent bien vite mais ils n’étaient au départ pas miens, et ce n’était pas cher payé pour mettre le doigt sur ce qui m’intéressait.
C’était une fin d’après midi. La nuit était déjà tombée et ma remise n’était éclairée qu’à la chandelle. Une impressionnante prime avait été offerte pour la capture d’un célèbre voleur dont j’entendais parler pour la première fois. Absolument aucune information utilisable excepté qu’il portait un masque et un manteau noir, en plus de laisser un peu de sable sur les lieux de ses méfaits. La prime était de trois mille Reikmarks et bien trop élevée pour que les autorités ou le guet l’ai offerte. Sans doute un très riche bourgeois s’était-il fait alléger de quelques œuvres d’art ou pierreries et désirait plus que tout laver son honneur. Résultat, tous les mercenaires et gens d’arme de la ville ratissaient les rues à la recherche du fantôme. On avait également arrêté et tabassé les habituels détrousseurs, dont la bande qui occupait le porche sous la grange en face de mon repère. Au moins cette nuit ne viendraient-ils pas vainement tenter de forcer la porte. Une bonne chose de faite et une nuit tranquille en perspective, pensais-je lorsque j’entendis le cliquetis de la porte principale. Je me levais d’un bond et soulevais une lame de plancher pour surveiller le nouvel arrivant lorsque je vis Jurgen entrer, tout couvert de fourrures et le visage suant malgré le froid. Quelque chose de grave avait dû arriver pour qu’il fasse l’effort de courir jusqu’ici mais je pensais qu’il ne faisait qu’une inspection surprise de ses réserves. Il prononça mon nom, d’abord d’un ton hésitant puis plus pressé, presque pris de panique. Je descendis vivement les escaliers et arrivai à la hauteur de la porte où il était resté, comme pour surveiller la place plongée dans les ténèbres. Lorsqu’il fut sûr de ne pas avoir été suivi, il se dissimula vivement à l’intérieur de l’entrepôt mais laissant la porte entrebâillée. Il n’avait plus le port confiant et avait laissé ses airs de propriétaire qu’il transportait avec lui où qu’il aille. Il était simplement soucieux et sans ressource mais parut reprendre confiance lorsqu’il m’aperçut:
- Lucic, je suis soulagé de vous trouver ici !
Je devinais plus que je ne compris cette phase tant il fut rapide.
- Herr Jurgen, que se passe-il ? répondis-je en affichant mon habituel air préoccupé, qui cette fois n’était pas totalement feint.
Il déglutit avant de reprendre d’un air à la fois conspirateur et honteux.
- Vous souvenez-vous notre première rencontre au Poney Rôti ? vous avez, heu laissé entendre que vous aviez rendu des services en… disons marge de la légalité ?
A ce moment, brille en vous la même satisfaction que le voleur qui vient d’ouvrir son coffre. Le poisson est ferré, il reste à le remonter. Sans montrer mon excitation grandissante, je baissais la voix et jetais quelques regards furtifs vers la rue pour faire bonne impression.
- Je vous arrête de suite Herr, si vous voulez tuer quelqu’un, je ne suis pas la personne qu’il vous faut et je ne veux pas entendre plus…
Montrer que vous avez des principes et une certaines forme d’honneur peut vous donner un ascendant moral sur des personnes qui rechignent à franchir la ligne. Vous montrez ainsi que vous n’êtes pas un homme de main et qu’on peut, à ce titre vous faire plus confiance qu’au premier criminel venu. Sans compter que cela peut aussi déstabiliser votre interlocuteur et le rendre plus réceptif à vos exigences.
- Non non non ! vous n’y êtes pas du tout, je ne veux tuer personne, enfin, pas au point de passer à l’acte bien sûr ! J’ai… voyez–vous une amie qui a des problèmes et j’avais espéré que vous pourriez l’aider…
Quelque chose d’inattendu mais rien de surprenant. Le pouvoir, l’argent et les femmes, voila les principales raison pour lesquels les hommes vont se fourrer dans de sales affaires. Je souris et paru soulagé de cette réponse. Jurgen se retourna précipitamment et fit une série de signes fort peu subtils en direction de l’ouest, à grand renfort de sifflements. Une silhouette encapuchonnée passa la porte d’une allure peu assurée et le marchand la referma aussi sec, étouffant enfin les bourrasques de vent glacial qui faisaient danser les flammes. Un silence gêné s’installa quelques secondes alors que je balayais successivement Jurgen et la femme dissimulée jusqu’à ce qu’elle se découvre enfin. Elle était jeune, mais son âge était difficile à estimer en raison des coups qu’elle avait reçu au visage et aurait pu être fort désirable si en cet instant, une grimace de souffrance ne déformait pas ses traits. Elle serait son manteau de la main gauche tandis que son bras droit, étrangement tordu pendait sans vie à son coté. Pas besoin d’être expert pour deviner qu’elle avait été molestée et je leur fis signe de monter à l’étage. Jurgen, étonnamment attentionné, mena l’inconnue jusqu’à une couche et commença ses explications embarrassées alors que j’examinais ses blessures, et plus particulièrement l’épaule qui avait pris une teinte violacée.
- Lucic, voici Leyna, ma jeune sœur, m’annonça-t-il d’un air grave.
@Arken: Ce petit bout de récit traîne depuis plus d'un mois et j'ai eu en effet beaucoup de mal à m'y replonger. Ceci dit la plupart des fautes sont impardonnables, les procédure, tellement à la mode n'ont pas été respectées
En tout cas merci beaucoup pour cette relecture (même si à la base c'est mon boulot)
CHAPITRE SEPT
Lorsque vous débarquez dans un nouveau lieu inconnu et donc hostile où vous souhaitez rester plus de quelques heures, il est préférable de suivre quelques règles élémentaires. Dans mon cas, l’anonymat en est une mais même sans être estampillé Répurgateur, il arrive que les évènements échappent à votre contrôle. Si, où plutôt lorsque cela arrive il est recommandé d’avoir sous la main quelques atouts non dévoilés car, au risque de me répéter, on est jamais plus vulnérable que lorsqu’on se croit en sécurité chez soi. Fort heureusement, il est assez facile d’augmenter vos chances en cas affrontement lorsque vous vous battez sur un terrain que vous avez préparé. J’étais alors installé au premier étage d’un entrepôt qui correspondait à toutes mes attentes, excepté pour le luxe. Herr Jurgen s’était avéré être un riche marchand de vin et autres mets de luxe, particulièrement paranoïaque lorsque qu’il s’agissait de vols de marchandises. Il ne me fallut guère d’astuce pour le convaincre qu’il était plus sage de garder quelqu’un sur les lieux ou d’y installer quelques dispositifs pour prévenir les incursions nocturnes…
L’entrepôt ne comptait qu’une seule entrée surmontée d’une fenêtre de verre. L’accès au niveau supérieur se faisait par un escalier collé au coté est et facilement observable depuis le plancher de l’étage. Les murs de l’entrepôt étaient de bon chêne, solides et renforcés de paille pour empêcher le froid d’entrer. Ceci, ainsi que les braseros du rez-de-chaussée destinés à aider à la préservation des produits faisait de cette remise un lieu bien plus chaud que bien des établissements dotés de cheminées à bois. De plus, tout intrus aurait eu fort à faire avec plusieurs serrures sur chacune des deux portes et il n’y avait presque rien à ajouter à l’exception d’une issue dissimulée et de quelques clochettes d’alarme. Mes quartiers, justes pourvus d’une malle, d’une couche de paille et d’un atelier bien fourni seraient, pour les prochains mois ce qui se rapprocherait le plus de la sécurité.
Votre deuxième tâche, après vous être implanté est de repérer les personnes susceptibles de détenir les bonnes informations. C’est une phase d’observation, plus ou moins longue et pénible. Vous pouvez tout aussi bien guetter dans le froid en pleine hiver, déguisé en mendiant pour identifier les petits criminels locaux avec pour seule chaleur une infecte herbe à fumer moisie, ou bien passer plusieurs jours à manger et boire à l’œil lors de grandes célébrations. Si l’un de ces cadres est plus agréable que l’autre, je ne sais toujours pas lequel est le plus dangereux. Se rapprocher de ces ressources demande ensuite un petit peu d’astuce. Commencer par tisser des liens et en dire juste assez sur vous pour piquer leur intérêt et il y a de fortes chances qu’ils finissent par vous demander des services. Ensuite seulement vous pourrez poser les questions qui vous intéressent. Si vous avez par exemple laissé entendre à un marchand de produits de luxes que vous avez trempé dans des affaires de « commerce détaxé » et autres manœuvres en marge de la loi pour le compte de vos anciens employeurs, alors il vous gardera en mémoire lorsqu’il aura des ennuis. C’est une approche lente et peu fiable, mais qui a le mérite de ne pas éveiller les soupçons. A recommander donc, particulièrement quand vous avez le temps de faire les choses bien.
Les ennuis arrivèrent bien vite mais ils n’étaient au départ pas miens, et ce n’était pas cher payé pour mettre le doigt sur ce qui m’intéressait.
C’était une fin d’après midi. La nuit était déjà tombée et ma remise n’était éclairée qu’à la chandelle. Une impressionnante prime avait été offerte pour la capture d’un célèbre voleur dont j’entendais parler pour la première fois. Absolument aucune information utilisable excepté qu’il portait un masque et un manteau noir, en plus de laisser un peu de sable sur les lieux de ses méfaits. La prime était de trois mille Reikmarks et bien trop élevée pour que les autorités ou le guet l’ai offerte. Sans doute un très riche bourgeois s’était-il fait alléger de quelques œuvres d’art ou pierreries et désirait plus que tout laver son honneur. Résultat, tous les mercenaires et gens d’arme de la ville ratissaient les rues à la recherche du fantôme. On avait également arrêté et tabassé les habituels détrousseurs, dont la bande qui occupait le porche sous la grange en face de mon repère. Au moins cette nuit ne viendraient-ils pas vainement tenter de forcer la porte. Une bonne chose de faite et une nuit tranquille en perspective, pensais-je lorsque j’entendis le cliquetis de la porte principale. Je me levais d’un bond et soulevais une lame de plancher pour surveiller le nouvel arrivant lorsque je vis Jurgen entrer, tout couvert de fourrures et le visage suant malgré le froid. Quelque chose de grave avait dû arriver pour qu’il fasse l’effort de courir jusqu’ici mais je pensais qu’il ne faisait qu’une inspection surprise de ses réserves. Il prononça mon nom, d’abord d’un ton hésitant puis plus pressé, presque pris de panique. Je descendis vivement les escaliers et arrivai à la hauteur de la porte où il était resté, comme pour surveiller la place plongée dans les ténèbres. Lorsqu’il fut sûr de ne pas avoir été suivi, il se dissimula vivement à l’intérieur de l’entrepôt mais laissant la porte entrebâillée. Il n’avait plus le port confiant et avait laissé ses airs de propriétaire qu’il transportait avec lui où qu’il aille. Il était simplement soucieux et sans ressource mais parut reprendre confiance lorsqu’il m’aperçut:
- Lucic, je suis soulagé de vous trouver ici !
Je devinais plus que je ne compris cette phase tant il fut rapide.
- Herr Jurgen, que se passe-il ? répondis-je en affichant mon habituel air préoccupé, qui cette fois n’était pas totalement feint.
Il déglutit avant de reprendre d’un air à la fois conspirateur et honteux.
- Vous souvenez-vous notre première rencontre au Poney Rôti ? vous avez, heu laissé entendre que vous aviez rendu des services en… disons marge de la légalité ?
A ce moment, brille en vous la même satisfaction que le voleur qui vient d’ouvrir son coffre. Le poisson est ferré, il reste à le remonter. Sans montrer mon excitation grandissante, je baissais la voix et jetais quelques regards furtifs vers la rue pour faire bonne impression.
- Je vous arrête de suite Herr, si vous voulez tuer quelqu’un, je ne suis pas la personne qu’il vous faut et je ne veux pas entendre plus…
Montrer que vous avez des principes et une certaines forme d’honneur peut vous donner un ascendant moral sur des personnes qui rechignent à franchir la ligne. Vous montrez ainsi que vous n’êtes pas un homme de main et qu’on peut, à ce titre vous faire plus confiance qu’au premier criminel venu. Sans compter que cela peut aussi déstabiliser votre interlocuteur et le rendre plus réceptif à vos exigences.
- Non non non ! vous n’y êtes pas du tout, je ne veux tuer personne, enfin, pas au point de passer à l’acte bien sûr ! J’ai… voyez–vous une amie qui a des problèmes et j’avais espéré que vous pourriez l’aider…
Quelque chose d’inattendu mais rien de surprenant. Le pouvoir, l’argent et les femmes, voila les principales raison pour lesquels les hommes vont se fourrer dans de sales affaires. Je souris et paru soulagé de cette réponse. Jurgen se retourna précipitamment et fit une série de signes fort peu subtils en direction de l’ouest, à grand renfort de sifflements. Une silhouette encapuchonnée passa la porte d’une allure peu assurée et le marchand la referma aussi sec, étouffant enfin les bourrasques de vent glacial qui faisaient danser les flammes. Un silence gêné s’installa quelques secondes alors que je balayais successivement Jurgen et la femme dissimulée jusqu’à ce qu’elle se découvre enfin. Elle était jeune, mais son âge était difficile à estimer en raison des coups qu’elle avait reçu au visage et aurait pu être fort désirable si en cet instant, une grimace de souffrance ne déformait pas ses traits. Elle serait son manteau de la main gauche tandis que son bras droit, étrangement tordu pendait sans vie à son coté. Pas besoin d’être expert pour deviner qu’elle avait été molestée et je leur fis signe de monter à l’étage. Jurgen, étonnamment attentionné, mena l’inconnue jusqu’à une couche et commença ses explications embarrassées alors que j’examinais ses blessures, et plus particulièrement l’épaule qui avait pris une teinte violacée.
- Lucic, voici Leyna, ma jeune sœur, m’annonça-t-il d’un air grave.
@Arken: Ce petit bout de récit traîne depuis plus d'un mois et j'ai eu en effet beaucoup de mal à m'y replonger. Ceci dit la plupart des fautes sont impardonnables, les procédure, tellement à la mode n'ont pas été respectées
En tout cas merci beaucoup pour cette relecture (même si à la base c'est mon boulot)
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Dim 30 Déc 2012 - 17:03
La section récit se réveille à nouveau j'ai l'impression... Mais ne vas pas trop vite, tu pourrais tomber du lit :
Et voilà quelques autres petites fautes que j'ai relevé :
J'ai l'impression que tu as voulu aller trop vite pour poster ta suite. Surtout au début, tu as d'énormes phrases dépourvues de virgules et de points qui alourdissent le récit. Donc je te conseille de faire une bonne relecture pour clarifier et corriger tout ça, car je n'ai relevé que quelques fautes, je n'ai pas fait gaffe s'il y en a d'autres.
Mais pour finir sur du positif, ta suite est intéressante, et j'aime bien l'idée de présenter ce chapitre sous forme de leçon au lecteur
C'est soit le chêne qui est solide, et dans ce cas il n'y a pas de virgule, soit ce sont les murs de l'entrepôt, et dans ce cas il y a un -s-Les murs de l’entrepôt étaient de bon chêne, solide et renforcés de paille
Cette phrase n'a pas de sens correct. Peut-être le "qui" à transformer en "que" ? Sinon, ce que je n'ai pas compris ce que tu voulais dire.Si vous avez par exemple laissé entendre à un marchant de produits de luxes qui vous avez trempé dans des affaires de « commerce détaxé » et autres manœuvres en marge de la loi pour le compte de vos anciens employeurs, alors il vous gardera en mémoire lorsqu’il aura des ennuis.
je suppose qu'il manque le mot "nuit" ...Au moins cette ne viendraient-ils pas
A par la petite faute de frappe soulignée, je pense que tu devrais séparer le dialogue et la petite phrase de récit. Le seul bout de récit autorisé dans les dialogues sont les verbes de parole ou le ton pris par la personne, ce qui n'est pas le cas ici.- Lucic, je suis soulagé de vous trouver ici ! Je devinais plus que je ne compris cette phase tant il fut rapide.
Soit c'est moi qui ne connais pas cette expression, soit le mot "sous" n'a rien à faire là.la même satisfaction que le voleur qui vient d’ouvrir sous coffre.
Soit c'est des "signes forts et peu subtils", soit c'est "fort peu subtils" et dans ce cas là il n'y a pas de -s- à "fort" car c'est l'expression "fort peu".fit une série de signes forts peu subtils
le -qu'- introduit une subordonnée, donc un groupe verbal sans lien d'accord avec ce qui précède. Donc c'est "qu'elle avait reçu". Il faut mettre un -s- seulement si c'est dans un cas de figure comme celui-ci : "elle les avait reçus"en raison des coups qu’elle avait reçus
Et voilà quelques autres petites fautes que j'ai relevé :
Je souris et paru soulagé de cette réponse.
pour piquer leurs intérêt
mais laissant la porte entrebâillé.
répondis-je en affichait mon habituel air préoccupé
J'ai l'impression que tu as voulu aller trop vite pour poster ta suite. Surtout au début, tu as d'énormes phrases dépourvues de virgules et de points qui alourdissent le récit. Donc je te conseille de faire une bonne relecture pour clarifier et corriger tout ça, car je n'ai relevé que quelques fautes, je n'ai pas fait gaffe s'il y en a d'autres.
Mais pour finir sur du positif, ta suite est intéressante, et j'aime bien l'idée de présenter ce chapitre sous forme de leçon au lecteur
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Ven 18 Jan 2013 - 19:16
CHAPITRE HUIT
La première barge du printemps était bien en avance sur la saison cette année. L’imposant navire avait jeté l’ancre à quelques milles en aval de Mordheim la Maudite. Il attendait que vienne la nuit pour tenter de se glisser silencieusement entre les mailles du filet de pierre et de fer corrompu qui l’attendait, ultime obstacle entre lui et la richesse promise. Chaque œil et oreille de l’équipage était braqué vers les berges que la glace avançait de plusieurs mètres dans le lit du fleuve Styr et d’où, à tout moment la mort pouvait venir. Les hommes, pourtant aguerris étaient aussi tendus que les câbles qui retenaient la cargaison et sursautaient à chaque grincement de la coque. Puis vint l’instant fatidique, l’ancre fut relevée, les arbalètes chargées et les croyants prièrent pour être épargnés lors de leur brève traversée de l’enfer. La liorne se mit en mouvement dans une série de craquements et de bruits de remous pour pivoter et présenter sa proue sculptée d’un marteau à la muraille effondrée de la ville. Elle lutta pendant quelques minutes contre les courants mais son timonier était on ne peut plus compétent. Compétent et inconscient diraient certains, aussi inconscient que tous les hommes qui s’étaient portés volontaires pour cette périlleuse expédition hivernale, lorsque la glace peut soudainement immobiliser un navire et le laisser à la merci des bêtes et des brigands. Glissant toutes lumières éteintes telle une baleine peinte de noir sur l’eau sombre, la liorne passa sans encombre la première brèche, précipitant sa cargaison et son équipage vers un futur incertain.
Peu trouvaient le courage de traverser la Cité des Damnés mais Hreidmar Barikson était de ceux-là. Le navigateur était à son poste sur le gaillard arrière, scrutant les ponts que les humains de l’équipage ne pouvaient que vaguement discerner et guidant habilement le navire entre les piliers effondrés. D’un rythme saccadé, le banc de propulsion s’animait comme les lents battements d’un cœur de bois usé mais vaillant pour entrainer les vis sans fin située à la poupe de la barge. Pour avoir déjà effectué cette traversée, le nain savait jouer habilement avec les courants pour épargner d’inutiles efforts aux rameurs. Non pas qu’il avait pitié des humains sous sa responsabilité, mais parce que cette vigueur économisée pouvait faire la différence s’il avait besoin d’une brusque pointe de vitesse, au cas où une horde de mutants décide de se laisser tomber d’un pont en quête de chair fraiche. Hreidmar jeta un nouveau regard vers le point de passage suivant, corrigea sa trajectoire et demanda un effort supplémentaire à la propulsion pendant quelques secondes avant de les mettre brièvement au repos. La masse de la barge la fit glisser paresseusement sous les piliers d’un nouveau pont qui masqua brièvement la lune et jeta sur le navire sa chape de ténèbres étouffantes. Les hommes sentirent plus qu’ils ne virent le changement de luminosité. Ils se saisirent nerveusement de leurs armes et brandirent de lourds pavois garnis de pointes vers le ciel, boucliers bien dérisoires contre la terreur qui commençait déjà à les gagner.
Il fallait faire vite, ou leurs nerfs allaient craquer et ce ne serait qu’une question de seconde avant que leurs hurlements n’attirent sur eux les monstruosités qui hantaient encore la ville, cinq cent ans après la catastrophe. Un nouvel ordre de sa part et son second se glissa furtivement jusqu’à un homme tremblant qu’il guida fermement vers le pont inférieur. Si le silence n’avait pas été de mise, Hreidmar se serait volontiers séparé d’une volée de remarques déplacées mais cette fois, il ne fit que retenir un grognement dédaigneux. Enfin, il aperçu l’horizon, une minuscule trouée entre la rive défoncée et l’ombre méphitique du Roc, l’imposante ile de granit verdâtre qui trouait le fleuve telle un bubon sur la peau d’un pestiféré. Parfois, cela pouvait avoir du bon de ne jouir que de la médiocre vision des humains. Combien se seraient jeté à l’eau ou seraient devenus fous s’ils avaient seulement entraperçu le hideux promontoire constellé de fissures d’où sortait une lueur maladive ? Il avait entendu dire que même les locaux évitaient ce lieu, cette griffe si corrompue dans cette ville pourtant maudite que même lui répugnait à laisser la liorne s’en approcher. Néanmoins, seconde après seconde, leur délivrance approchait et la trouée se faisait de moins en moins inaccessible. Il accéléra la cadence des rameurs qui mirent une volonté insoupçonnée à tourner de plus en plus vite le vilebrequin. La liorne s’ébroua si vigoureusement que des vagues blanches apparurent à la proue et Hreidmar dû se saisir du gouvernail à deux mains pour contrôler la barge dans les derniers violents remous de la brèche sud.
Et tout fût fini. Comme une outre percée, la bulle d’angoisse éclata et les hommes vidèrent enfin leurs poumons comme s’ils avaient oublié de respirer durant l’heure qu’avait duré leur traversée. Quelques encouragement fusèrent ça et là, quelques félicitations au pilote et l’équipage repris son travail avec entrain, voulant à tout prix mettre le plus de distance possible entre eux et la ville. Les mats furent déployés, les voiles sorties et Hreidmar put enfin laisser son poste à son second. Toute cette agitation lui avait donné soif.
Le fleuve restait la voie la plus rapide vers l’Ostermark, potentiellement la plus rentable mais également la plus dangereuse, ce qui n’est pas peu dire lorsqu’on considère les risques des routes forestières. Seuls les plus désespérés s’aventuraient donc à passer par Mordheim mais cela pouvait s’avérer payant, en particulier si la barge arrivait à Essen avant les caravanes terrestres et pouvait ainsi gonfler ses prix en raison du grand besoin des populations isolées à la sortie de l’hiver. Hreidmar avait pour cette raison eu toute latitude pour fixer le tarif de son contrat, lequel incluait également une généreuse commission sur toutes les marchandises vendues une fois arrivé à destination.
De quoi se faire une petite fortune en or pour retourner en grandes pompes à la forteresse, se dit-il songeur en faisant mousser sa bière dans sa choppe.
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Ils avaient passé la ville-cratère, il en était sûr. Voila plusieurs heures qu’il n’avait pas senti l’odeur enivrante de la Pierre-ciel exciter ses narines. De la poussière, rien de plus, songea-t-il. Juste assez pour émoustiller ses sens et lui faire perdre concentration, pas assez, trop dispersée pour en tirer profit. Mais qu’est ce que cela avait dû être juste après l’impact ! De telles richesses à porté de tous ceux assez courageux pour se baisser et ramasser la pierre ! Assez de butin pour transformer un guerrier en seigneur et permettre à un chef de le rester… Cette dernière pensée dévala le long de son échine et laissa son corps parcouru d’un frisson qui le fit soudainement et douloureusement revenir à lui à lui. Il devait s’occuper et raccrocher sa conscience se à quelque chose de tangible pour que l’amertume ne le gagne pas. Il choisit le bout de parchemin dont il connaissait le contenu par cœur, enfermé dans le tube d’acier étanche qui reposait devant lui dans les ténèbres de la caisse de bois où il voyageait. Il en relu mentalement le message, déchiffrant de mémoire l’écriture nerveuse ponctuée de tâches d’encre verte, sans s’attarder sur les menaces dissimulées dans chaque phrase. C’était sa mission, pas une tâche des plus facile mais si on avait tant tenu à le voir mort, on ne se serait pas donné tout se mal pour l’expédier si loin.
Il retourna la lettre et se remémora la carte grossière dessinée au dos qui représentait la petite portion de l’empire humain qui l’intéressait. Ils appelaient la ville-cratère Mordheim et à partir de là, ils continueraient jusqu’à la cité-surface d’Essen. Encore sept jours de voyage se rappelait-il, sept jours à attendre dans sa boite avant de retrouver la liberté. Sept jours qu’il mettrait à profit pour trouver une bonne excuse pour rester à Essen, ne pas suivre le fleuve vers Waldenhoff et ne jamais arriver à Drakenhoff.
Il devait revoir sa situation d’un œil neuf, trouver vite un échappatoire. Il s’assit donc en tailleur et posa ses pattes sur ses genoux, puis grignota une bouchée de ses galettes de blé.
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Ven 18 Jan 2013 - 20:42
Toujours aussi bien écrit mon cher ! Ou en tout cas, mieux que la dernière fois !
J'aurais juste une petite demande... Est-ce possible de faire un récap des persos/évènements ? Parce qu'à chaque fois j'ai l'impression d'avoir une autre histoire sous les yeux, surtout que tu n'es pas le seul que je lis
Et toi qui s'impatientait de voir le section abandonnée, je t'invite à lire la suite que je viens de poster
Suitesuitesuitesuitesuite !!
J'aurais juste une petite demande... Est-ce possible de faire un récap des persos/évènements ? Parce qu'à chaque fois j'ai l'impression d'avoir une autre histoire sous les yeux, surtout que tu n'es pas le seul que je lis
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 19 Jan 2013 - 15:04
Rien que pour vos yeux, parce qu'une "bonne" carte vaut mieux qu'un pavé:
Voila, j'espère que tu y voit plus clair Arken, même si j'admet qu'il fait de bons yeux pour déchiffrer.
en gros, en rouge le trajet du répurgateur
noir celui du vampire (qui reste bien sagement en ville en fait)
vert le nain-marinier et jaune son pas si mystérieux passager clandestin
A partir du prochain chapitre, tout le monde devrait être là pour la première phase.
Pour la liste des personnages principaux, elle est sur le premier post du sujet, crée à peu près au même moment où je t'ai demandé de faire de même sur ton récit
Sengh' "Qu'est ce qu'on fait pas pour satisfaire ses fans"
PS: Je lance également un concours, j'ai besoin d'un nom pour une lahmiane.
Voila, j'espère que tu y voit plus clair Arken, même si j'admet qu'il fait de bons yeux pour déchiffrer.
en gros, en rouge le trajet du répurgateur
noir celui du vampire (qui reste bien sagement en ville en fait)
vert le nain-marinier et jaune son pas si mystérieux passager clandestin
A partir du prochain chapitre, tout le monde devrait être là pour la première phase.
Pour la liste des personnages principaux, elle est sur le premier post du sujet, crée à peu près au même moment où je t'ai demandé de faire de même sur ton récit
Sengh' "Qu'est ce qu'on fait pas pour satisfaire ses fans"
PS: Je lance également un concours, j'ai besoin d'un nom pour une lahmiane.
Vous êtes née récemment, vous êtes avide de faire vos preuves et d'une loyauté aveugle envers votre matriarche?
Vous êtes doté d'un talent pour les intrigues, les complots et justifiez d'un moins dix ans d’expérience dans ce domaine?
Postulez pour devenir l'antihéros et participez à la traque d'un dangereux renégat*!
*Risques de mort définitive, de démembrements, décapitation, brûlures, perforation inclus dans le contrat
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 19 Jan 2013 - 18:32
Je t'aurais bien proposé Topaze, mais elle est encore sous contrat avec moi
Tu veux un nom avec quelle origine ?
Merci pour ta jolie pitite carte
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 19 Jan 2013 - 19:08
Arken a écrit:Merci pour ta jolie pitite carte
Mais de rien
Pour l'origine,je pense impériale ou kislev.
S'il y a un brin d'histoire en prime ça pourrait avoir une petite incidence sur le récit...
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Sam 19 Jan 2013 - 19:37
Proposition :
Viktoria, appartient ou appartenait à la sororité du Pinacle d'Argent. Experte en manipulation.
*Pour Viktoria, tapez 1*
PS : Dis-le si tu veux plus de détails
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*Pour Viktoria, tapez 1*
PS : Dis-le si tu veux plus de détails
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Re: Le Bon, le Traître et le Non-mort
Mer 10 Avr 2013 - 19:24
CHAPITRE NEUF
Plus qu’un rivet. Lentement, précautionneusement, Heechrigar faisait jouer la lame de son poignard dentelé sur le pas des vis qui maintenaient clos son compartiment de voyage. Son casque reposait par terre, pour ne pas masquer le peu de luminosité qui entrait par le couvercle légèrement entrouvert. Totalement sortie, la vis tomba et il l’attrapa au vol d’un mouvement fluide avant d’appliquer une légère pression sur le couvercle qui craqua imperceptiblement lorsqu’il se déboita. Il prit une grande inspiration et ramassa son équipement qu’il avait fourré dans une peau de mouton remplie d’air en prévision du débarquement. La cale était déserte. La première cargaison de denrées alimentaires avait déjà été débarquée, il ne restait sur le navire que les marchandises les plus précieuses, gardées à l’abri le temps que les acheteurs viennent jusqu’au vendeur. Heechrigar se hissa dans la cale et retomba sur le pont aussi silencieusement que sa carrure de colosse le lui permettait avant d’allumer un petit bâtonnet d’encens qu’il jeta dans la caisse pour masquer son odeur. Cinq autres formes encapuchonnées se livraient au même rituel dans la cale et vinrent l’entourer lorsque ce fut finit. D’une bonne tête plus petits que le chef à la fourrure noire, les skavens gardaient les pattes jointes, dissimulées dans leur manches et la plupart ne s’étaient pas encombrés d’armure. Ils paraissaient tellement fragiles, et pourtant terriblement mortels.
Heechrigar pivota avec l’assurance de longues années de survie pour ne pas exposer son dos à ses subordonnés et les évalua du regard. Il connaissait bien Chang-Qee, comme lui un survivant du désastre de Kriekenkaztel. A sa gauche son apprenti du moment, Hiirceek, un jeune raton craintif toujours dans l’ombre de son maître. Quant aux trois jeunes assassins du clan Setek, ils étaient sa principale préoccupation. Ils n’avaient pas dit un mot depuis qu’il les avait rencontré lors la première réunion avec le prophète mais n’avaient cessé de communiquer entre eux par signes et brefs couinements inintelligibles.
Heechrigar se redressa de toute sa hauteur, une patte sur le manche de son poignard et montra les dents. Ses sbires se roulèrent en boule, sans exception, en signe de soumission et lui présentèrent leur gorge. Aucun des rats présents ne voulut ou ne put soutenir le regard impitoyable de leur supérieur. Le moment n’était pas à la rébellion, tous savaient qu’ils n’avaient pas le temps pour cela. La triade s’éclipsa en premier et gagna prestement la sécurité relative des eaux glacées du Styr pour sécuriser le quai désert. A leur signal, les derniers skavens sautèrent du bateau sur la terre ferme. La triade avait déjà disparu à la recherche d’un abri temporaire avant de trouver une place plus adaptée à leur mission.
Chang-Qee émit un long sifflement menaçant en fixant la route de terre qui remontait vers la ville, là où les assassins avaient disparu. Nul doute qu’il ne se serait pas permis ce geste s’ils avaient étés présents, pensa Heechrigar. Cela leur faisait un adversaire commun et pour l’instant, une raison de moins de se mettre mutuellement un coup de couteau entre les omoplates. Chang-Qee croisa le regard de son chef en quête de son approbation et vit qu’ils avaient eu la même idée…
Chang Qee s’avança, toujours en prenant garde de rester dans le champ de vision d’Heechrigar. Le Technomage, dans la force de l’âge il y avait trois mois de cela n’était plus que l’ombre de lui-même. Des touffes de fourrure blanches étaient apparues et il s’était mis à se ronger les griffes jusqu’à devoir se remplacer trois doigts par des prothèses de cuivre. Mais son regard n’avait jamais été aussi déterminé, et jamais Heechrigar n’avait vu pareille lueur de folie chez un des siens. Pourtant, tous deux étaient à Kriekenkaztel. Face à l’horreur sans nom qui avait été déchainée, Heechrigar s’était réfugié sur un îlot de déni et la rationalité. Chang-Qee avait été emporté par la vague de folie qui avait englouti la Grande armée d’Invasion et en avait réchappé de justesse. Il en était resté passablement traumatisé et son comportement était devenu plus imprévisible.
Malgré l’insistance du Prophète pour inclure Chang-Qee dans son groupe, Heechrigar ne permettrait pas qu’il mette en péril sa mission et plus important encore, sa propre survie.
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La triade avait fait main basse sur un abri tout à fait convenable. La cave d’une vieille grange à quelques dizaines de mètres des murailles, profondément enterrée et protégée du froid. Comme l’avait exigé le prophète, l’abri fut vite transformé en base arrière sur laquelle ils pourraient s’enfuir, voir se replier s’ils pouvaient. En une semaine seulement, Hiirceek avait aménagé le sous-sol pour le rendre plus fonctionnel et creusé deux autres pièces, motivé par les coups de bâton de son maître lunatique. La triade quant à elle avait réussi à creuser sans broncher plusieurs passages secrets, dont un menait jusqu’aux égouts de la ville.
Après huit jours, Chang Qee, mû par une étrange inspiration avait terminé de recouvrir les murs de glyphes de protection, certains arborant le sceau triangulaire du Rat Cornu, d’autres plus ésotériques aux multiples branches et symboles ondulés. Quelques heures plus tard, Heechrigar avait terminé avec le plus grand soin l’assemblage d’un curieux appareil circulaire de bronze et de laiton qui se mit à bourdonner lorsqu'il y imprima une légère pression. Un léger nuage de fumée verte, nauséabonde et étrangement phosphorescente s’éleva dans la cave mal éclairée pour prendre la forme voûtée du très-redouté Teer-Aquol. Le prophète immatériel montra les crocs et sa voix outrée résonna dans les esprits de ses serviteurs prosternés autour de son image.
« Ce que nous cherchons est avec vous ! Vous ne deviez pas aller au Mort-Carstein avant mon ordre-signal ! »
Teer-Aquol senti le doute et la surprise non feinte de ses subordonnés et en fut un instant troublé. Se pouvait-il qu’ils ne se soient pas encore rendus en Sylvanie et que le livre se soit trouvé depuis tout ce temps en territoire impérial ? Il força son chemin dans l’esprit grand ouvert d’Heechrigar et sut que ses larbins ne lui avaient pas désobéi (et ne l’avaient pas trahi au passage). Mort-Carstein avait eu le livre et quelqu’un lui avait volé… très récemment, entre aujourd’hui et le dernier solstice d’été, lorsque le Rat Cornu lui avait envoyé ses visions. Ce voleur avait très certainement tiré parti du chaos engendré par l’invasion de Vardek Crom pour piller en toute sérénité les chambres fortes de Drakenhoff et dérober ce qu’il cherchait.
Et ce voleur devait être proche, très proche de ses agents. Son sourire féroce s’élargit et ses séides reculèrent imperceptiblement, toujours déconcertés par les raisons de son monologue. Le Prophète coupe court à la période de flottement en se redressant de toute sa taille et faisant son ton le plus menaçant :
« Coureurs ! Continuez à bien me servir et je vous récompenserais, trahissez-trompez et mille morts ne seront pas assez ! »
Le prophète les laissa assimiler ses dernières menaces pendant une dizaines de battements de coeur et continua :
« Voyez et apprenez ce que je veux ! Trouvez-rapportez, vite-vite ! »
Les skavens présents tombèrent à plat ventre et se tordirent sur le sol de terre alors que le prophète imprimait dans leur esprit l’objet de toutes ses convoitises. L’image d’un livre à la couverture ancienne dont ni la forme, ni la taille n’étaient clairement visibles. Seulement un pentagramme asymétrique avec un œil au centre et un nom qui ne voulait rien dire dans aucunes des langues qu’ils connaissaient.
La nuit suivante, Heechrigar ne dormit que très peu, perplexe devant les événements de la journée. Ils n’iraient pas en Sylvanie, promesse d’une mort très certaine mais ils devaient retrouver un simple livre, dans une ville de plusieurs milliers de chose-hommes. Le sommeil le prit alors qu’il continuait à se demander quelle tâche était la plus ardue. Tous méditaient ou dormaient, personne ne vit Chang-Qee s’agiter au milieu de ses cauchemars et se réveiller plusieurs fois, les yeux vitreux et le regard fou.
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